vendredi 24 février 2012 - par Taverne

Le rade des villes et le rade des champs

Voilà un titre curieux ! On pense spontanément à Jean De La Fontaine, le Rat des villes et le Rat des champs. Et on a raison. C'est un hommage aussi à la vie dans les bistrots des villes et des campagnes. Que l'on oppose trop souvent à tort. En effet, ne trouve-t-on pas autant de savoureuses brèves de comptoir à la ville et à la campagne ? Jeux de mots aidant, un hommage est aussi rendu à la troupe de Deschamps et à Benoît Urbain.

Il existe peut-être quelque part, au fond d'un bourg ou d'une cambrousse, un rade qui se nomme "Au pt'it bonheur", du nom du groupe qui fit son succès avec "J'veux du soleil" et auquel appartenait Benoît Urbain, comme accordéoniste. Mais, les accordéonistes, en trouve-t-on encore beaucoup aujourd'hui dans les bistrots ? Qu'importe ! Cette chanson rend hommage à tous les bistrots, de tous lieux et de toutes époques et surtout à toute la faune qui la fréquente.

Le rade des villes et le rade des champs (écouter la chanson ici)

Dans mon rade des villes,
Il y a Benoît Urbain
Ce nom lui va très bien.
Dans mon rade des villes,
On joue des vaudevilles.

Dans mon rade des champs,
C’est la troupe Deschamps
Qui vient à la veillée
Pour nous émerveiller.
Dans mon rade des champs.

Quand mon rade des villes
Par les soirs radieux file,
Il devient un radeau
Cap sur l’Eldorado !

Quand mon rade des champs
Nous récite des chants,
De belle Antiquité,
Je voudrais tout quitter.

Tout quitter pour partir
Loin du rade des champs
Et pour ne plus pâtir
De ce monde méchant.

Tout quitter pour aller
Loin du rade des villes
A Venise ou Séville
Cela peut bien m’aller.

On pourra voir un lien direct entre cette chanson et la précédente. A trop fréquenter les rades, on peut être émêché. Mais c'est surtout aux émêchés de l'existence que la chanson s'adresse. A ces êtres usés avant l'âge à cause des vicissitudes de leur rude existence. La vie dans la rue, la faim, l'alcool aussi bien sûr. La bougie de leurs vies est émêchée, elle ne fait plus qu'une petite flammèche.

Emêchés (écouter la chanson ici)

I

Vous êtes éméché.
La vie n’est plus flammèche.
Vous rallumez la mèche.

Dans la nuit, la bougie
Vient éclairer ton bouge.
Tu sens que le sol bouge.

Ou bien ce sont tes pieds
Qui cherchent à voler.
Qu’est-ce que vous voulez ?

Il faut que l’on soit saoul.
Sous la jupe de la vie,
Pour en voir les dessous.

II

Vous êtes éméchée.
Vous n’êtes plus pimbêche,
Et vous voilà de mèche

Avec, là, la lie
De toute l’Humanité.
On sonne l’halali

De toutes vos vanités !
Car à l’heure des cloches
Vous voilà invitée.

Et vous videz vos poches
A la Cour des miracles
Où le vin est oracle.

III

Vous êtes aviné.
Vous l’aurez deviné.
Dans le fond raviné

Du rade, les buveurs d’eau
Ne prennent pas le radeau
De nos Eldorados.

Les peaux-rouges criards
Ne les ont pas pour cible.
Ils ne sont point sensibles
Aux poivrots égrillards.

Ah ! J'oubliais : c'est ma quatrième collaboration avec Sylvain Mérezette alias SYLMER, le 4ème album amateur sur Jamendo. je vous laisse découvrir ou redécouvrir les précédents. Bonne écoute !

Pour accéder à l'ensemble de l'album :

 

 



3 réactions


  • Georges Yang 24 février 2012 08:52

    Vous auriez pu éviter d’emblée l’allusion à Jean de Lafontaine, les lecteurs cultivés ou les anciens ont tout de suite compris ! Cela fait redondant !

    D’autre part, rades des villes ou des champs peuvent avoir leur charme, le rade est un lieu d’habitués et d’initiés, mais en plus de la complicité, d’un pool commun d’anectotes, de sensibilité commune, aux champs, il existe encore, un patois, qui hélas se perd et qui ne concerne que les gens du coin

    Quand on va dans un rade de la Plaine Saint Denis rempli de caboverdiens, tout le monde se tait à l’entrée d’un intrus, puis les conversations reprennent en portugais des îles,

    On a, on avait, la même chose en Alsace, en Lorraine (où le patois se perd), dans le Nord et bien sûr en Corse


  • Gabriel Gabriel 24 février 2012 08:56

    Grisaille économique, désertification de nos campagnes, de nos villages, les petits bistrots  ferment jour après jour. Lieux de rencontre, comme les marchés, c’est une partie de notre histoire qui agonise, un patrimoine social qui disparaît. Là, où les anciens venaient taper la belote ou empiler les dominos, là où la prime jeunesse villageoise se défoulait sur l’unique flipper et les derniers baby-foots écoutant la musique d’un vieux juke-box crachotant ses vinyles. Lieu de rassemblement de petits commerçants et artisans qui à l’heure de l’apéro refaisaient le monde sous l’œil critique de l’unique et indéboulonnable pilier de comptoir et le sourire bienveillant du touriste de passage. Ces endroits là, c’est un peu la poésie de ce pays, l’agora de nos ancêtres …


  • restezgroupir44 restezgroupir44 24 février 2012 17:55

    La grande distribution a souvent mauvaise presse en France, et ce n’est pas à tort : mal bouffe, disparition de la concurrence, chômage, etc...tels sont les maux de notre société auxquels elle est souvent associée.

    Pour autant, peut-on affirmer qu’elle est à l’origine de la disparition des commerces de proximité en milieu rurale et par voie de conséquence, de la désertification rurale ? Non, je ne le crois pas. La grande distribution a certainement accéléré le phénomène mais n’en est pas à l’origine. 

    On compte en France 30 644 communes rurales qui couvrent 82 % du territoire et regroupent seulement 1/4 de la population. 1 habitant sur 4 vit dans une commune rurale alors que l’on ne compte qu’un établissement commerciale sur 6 et un salarié sur 10 dans les communes rurales (chiffres PME/TPE en bref, n° 21, janvier 2007,Le commerce dans les communes rurales : un nouveau visage ? - Ministère des PME, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales). 


    Il n’empèche que la tendance commence à s’inverser vu les prix des carburants , beaucoup de ruraux recommencent à (re) découvrir le charme des commerces de proximité lieux d’échanges et de convivialité.

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