jeudi 26 avril 2018 - par

Les cinquante ans de « 2001 »

« 2001 » de Kubrick a cinquante ans. Bien entendu, on a le droit de ne pas aller au cinéma, de prétendre que le dernier bon film que l'on ait vu soit « Tabarin fait des crêpes » (de 1918) ou rappeler que les ptits z-oiseaux, les ptites fleurs émerveillent bien plus que des ombres lumineuses mouvantes sur écran blanc dans des salles noires. Auquel cas il vaut mieux éviter de s'ennuyer à regarder « 2001 » qui n'a pas d'histoire à proprement parler, pas ou peu de personnages attachants, ou marqués par un certain pessimisme sur l'homme : de l'os qui tue le tigre dans la première partie aux missiles nucléaires en orbite autour de la terre il n'y a pas tant de différences que cela, ou d'évolution réelle...

 

...Finalement nous en sommes toujours à interdire notre « point d'eau » aux autres.

 

Ce chef d’œuvre de la Science Fiction tourné par un génie maniaque est de ces films que l'on ne devrait voir qu'au cinéma, la télévision l'abîme. De nos jours la plupart des films sont prévus pour êtres regardés en dévédé dans le salon et non dans une salle de cinoche, une expérience n'ayant rien à voir. « 2001 » est un peu plus qu'un film avec un début, un milieu et une fin, c'est de l'esthétisme. Il n'y a pas d'interprétations une et unique, chacun peut y voir ce qu'il y trouve. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Kubrick a enlevé le maximum de dialogues, dont des dialogues explicatifs prévus au départ, et des éléments de compréhension qui forcément au bout d'un moment auraient fait vieillir le film beaucoup plus.

 

C'est une œuvre d'art où le personnage psychotique que l'on trouve dans tous les films du père du « docteur Folamour » est un ordinateur rendu fou par des ordres contradictoires et sa haute idée de la « mission » qui lui est allouée.

 

Le bruit et la fureur qui toujours à un moment explosent dans les films de Kubrick, révélant les hypocrisies sociales, les faussetés, les mensonges sont bel et bien présents dans « 2001 » mais d'une toute autre manière.

 

Kubrick devait montrer des « aliens », des astroports sur une musique beaucoup plus « classique » pour ce genre de films et non sur des extraits d’œuvres de Ligeti ou Richard Strauss. Et le « fœtus astral » devait faire exploser des bombes nucléaires à la surface de notre planète afin de nous forcer à une renaissance radicale. Tous éléments qui étaient dans le scénario de Arthur C Clarke et que celui-ci recyclera dans le roman paru peu de temps après, livre marqué par une obsession pédagogique compulsive et un léger désir de revanche sur les décisions prises par Kubrick avec lesquelles il n'était pas d'accord.

 

Ce film il faut dire prend son spectateur pour un adulte, un adulte normalement doté d'une cervelle en état de marche. Et ce contrairement aux producteurs de 2018 pour lesquels un long métrage, toute petite partie de la chaîne commerciale, se doit d'être pour toute la famille afin de vendre un maximum de billets et de friandises avant. Bien entendu, je ne nie pas le fa it qu'aller au cinéma soit aussi pour se divertir mais parfois une réalisation peut amener à réfléchir et, ou s'émerveiller. Surtout si la personne allant au cinéma a dépassé l'âge de sa puberté depuis longtemps déjà.

 

Kubrick aurait bien aimé que l'on pense que cette œuvre est née d'un raisonnement intellectuel et de choix mûrement réfléchis alors qu'il ne s'agit que d'une longue liste d'intuitions, y compris pour le montage actuel du film. Au départ celui-ci était beaucoup plus linéaire et puis face aux remontées de spectateurs venant voir « 2001 » comme un trip psychédélique, le cinéaste a compris ce vers quoi il pouvait aller, de même pour l'utilisation de la musique classique projetée sur les premiers « rushes » comme le faisait tous les techniciens à l'époque qui mettaient les disques leur tombant sous la main dans le studio de mixage.

 

Enfin, on a bel et bien le droit de s'emmerder devant « 2001 », il n'y a pas d'émerveillement obligatoire, pas de chef d’œuvre obligatoire même. Mais alors que faites-vous encore ici à la fin de cet article ...

 

Illustration du haut prise ici (station spatiale en double roue)

 

illustration du bas – monolithe, empruntée ici

 

Sic Transit Gloria Mundi, Amen

Amaury - Grandgil

 




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