vendredi 21 juin 2013 - par

Margin call..

A la veille d'un cataclysme, Margin call plonge le spectateur au coeur du cynisme du capitalisme made in Wall Street..

La brutalité de l'absence de scrupules est l'une des caractéristiques des puissants qui dirigent le monde.. Vérité universelle mise en situation dans cette peinture cinématographique de haute volée.. J.C Chandor se glisse discrètement dans un milieu froid et bestial où seule la préservation des intérêts financiers est le seul absolu admissible, acceptable.. Glacial.. Le brillant réalisateur et scénariste n'épargne rien au spectateur.. Du cynisme arrogant de Wall Street pour qui les gens ordinaires ne sont pas seulement sans aucune valeur, ils sont inexistants.. Quand ils ne sont redevables..

Margin Call ou à l'aune d'un cataclysme financier et économique historique.. Tout commence par une purge.. Un tiers des employés d'une firme est viré, sans ménagement.. Situation classique et cyclique où l'emploi que l'on a est aussi précaire que les millions que l'on gagne.. Du personnel jetable donc, comme partout ailleurs en cette époque étrange.. Et le discours culotté de ce manager, incarné par un Kevin Spacey au sommet, qui pleure l'agonie de son chien tout restant d'acier devant l'expulsion sauvage de ses agents.. Normal.. Parfaitement normal.. Ici, la normalité est pervertie à l'extrême.. Intelligemment.. Impitoyablement..

Puis, vient cette découverte qui au-delà de la prise de conscience des conséquences d'une irresponsabilité collective et assassine, soulève l'unique question qui vaille d'être posée et réfléchie, comment sortir presque indemne de la catastrophe à venir que l'on a provoqué.. Pour dire les choses aussi froidement que les principaux protagonistes, comment peut-on sauver les centaines de millions de dollars d'actifs de la firme.. Trahison, mise à mort, enterrement, jalousie, détestation, opportunisme.. La morale wallstreetisante dans ce qu'elle a de terrifiant..

Margin Call est maitrisé, efficace, et complexe.. La pléiade d'acteurs loin d'un défilement de stars dont Hollywood nous a souvent accoutumé, de Jeremy Irons - superbe patron de la fameuse firme qui fait penser à Lehmann Brothers - à Demi Moore, requin au féminin, en passant par Zachary Quinto, jeune premier en plein apprentissage de la rudesse d'un univers fou et hors-monde, livre une prestation juste et quelques fois géniale..

Ce que l'on retient entre autre chose de Margin Call, c'est que les riches, qui jouent avec l'existence des personnes ordinaires qu'ils méprisent profondément, ne sont jamais perdants, et jouissent d'une permanente incompréhensible impunité.. Aussi que l'agitation politique post-apocalypse n'a d'égale que l'hystérique soif de profits des financiers.. Et la loi dans ce foutoir est abattue à l'ombre de la zone grise juridique dans laquelle le législateur consciemment ou pas a voulu qu'elle s'emprisonne..

Margin Call, bouscule et, signe d'un trait abrute l'indigence humaine d'un capitalisme génocidaire.. Et quand l'on voit à quel point il n'a pas provoqué plus que ça d'enthousiasme populaire, contrairement aux blockbusters stupides, on ne peut s'empêcher de penser que les gens ordinaires en général méritent bien la merde dans laquelle ils sont noyés..




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