samedi 28 novembre 2015 - par Theothea.com

« Nema » de Koffi Kwahulé façon violence tragi-comique

Quand, au travers d’un texte à la fois poétique et charnel, une metteuse en scène incite ses comédiens à s’emparer de la sensualité inhérente pour exprimer celle-ci avec humour distancié dans une sorte de tourbillon identitaire, la violence consubstantielle à l’humanité depuis l’origine des temps a, alors, beau jeu théâtral de faire rire car rien n’est en effet plus libérateur que de fantasmer avec cette inéluctable condition qu’il serait totalement vain de dénier au nom de la morale ou de la volonté.

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NEMA
photo © Cie Oui aujourd’hui

Qu’importe, d’ailleurs, qu’elle s’appelle agressivité, harcèlement, domination ou tout autre déclinaison du principe de s’arroger le droit de rabaisser autrui jusqu’à l’aliéner à son propre contentement, ce dernier sera sans cesse confronté à une contrepartie aboutissant, en définitive, à l’insatisfaction généralisée se transmettant de génération en génération.

En effet, que l’on soit homme ou femme, le syndrome du sado-masochisme finit toujours par trouver son terrain de prédilection répétitive contre laquelle le meilleur remède envisageable serait, en conséquence, sa prise de conscience universelle et intemporelle.

Dans cette perspective, quoi de mieux donc que le rire pour en découvrir l’ensemble des facettes les plus sournoises, les plus pernicieuses, les plus perverses ?

Ainsi, tant qu’à en faire une démonstration illustratrice, l’auteur Khoffi Kwahulé choisit de positionner deux couples qu’il fait interagir continûment, en multipliant et croisant les relations d’asservissement social et de désirs intimes.

Face à eux, une mère possessive en charge de perpétuer le vice abusif ainsi qu’une secrétaire contrainte de s’accommoder au mieux des fourches caudines hiérarchiques.

A partir de ce schéma scénographique, place aux comédiens pour pousser à la caricature toujours plus diabolique contrastée par une perception onirique et délirante de la responsabilité.

Le ressenti et l’interprétation des séquences proposées se veulent tellement ouverts à toute subjectivité que l’auteur a préféré ne pas distribuer explicitement les rôles dans son texte ( Nema, Idalie, Marie, Taos, Benjamin & Nicolas ), en laissant ainsi les artistes et les spectateurs libres d’actualiser, à chaque représentation, la cohérence implicite des répliques.

Dans la conviviale salle du Hublot (Colombes) où le rythme du jeu se veut musical comme le jazz qu’affectionne le dramaturge ivoirien, et enlevé comme l’improvisation suscitée par Marie Ballet, quel meilleur symbole que les bouquets floraux pour servir de lien d’excuses à un art de vivre à la fois dégénérescent et traumatisant ?

Ces fleurs sont censées venir mettre du baume sur les cœurs et corps meurtris jusqu’à oser, néanmoins, dévoiler leur emblème métaphorique probablement à l'origine de tous les maux terrestres ainsi que de leurs jeux relationnels insidieux, à savoir celle d’entre elles nommée fort malignement « La fleur du mâle ». 

photos © Cie Oui aujourd'hui 

NEMA - ***. Theothea.com - de Koffi Kwahulé - mise en scène Marie Ballet - Compagnie "Oui aujourd'hui" avec Marion Amiaud, Aurélie Cohen, Mattieu Fayette, Jean-Christophe Folly, Emmanuelle Ramu & Ombeline de la Teyssonnière - création au Hublot (Colombes) puis Théâtre de l’Opprimé (Paris)

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NEMA
photo © Cie Oui aujourd’hui



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