mercredi 14 août 2019 - par Sylvain Rakotoarison

Pierre Richard, le clown distrait et ses 7 pépites

« Je ne suis pas un homme de texte. Je m’intéresse plus aux sentiments, à l’émotion du moment qu’aux mots. Donc, je peux dire n’importe quel mot. Pour moi, ce qui compte, c’est la sincérité avec laquelle je le dis. (…) Je peux dire "carburateur" alors que cela n’a aucun rapport avec ce que je dois dire. Je ne m’en aperçois pas. » (Pierre Richard, le 16 décembre 2006 sur France 2).



L’acteur Pierre Richard fête son 85e anniversaire ce vendredi 16 août 2019 (il est né à Valenciennes). Comment peut-on être si original avec un nom si commun ? Pierre Richard est une sorte de compromis entre Louis de Funès, version soumise et distraite, et Jacques Tati, version cinéma parlant. Comme ce dernier, il a réalisé quelques films, mais c’est surtout comme acteur qu’il est éclatant.

Il est le petit-fils du patron d’une usine dans le Nord : « C’est vous dire que je n’ai pas tellement suivi son chemin. ». Sa famille n’était pas très heureuse quand il a choisi la comédie : « J’étais fâché pendant quinze ans, jusqu’au moment où j’ai fait mon premier film. ». Il est un acteur assez particulier et original dans le cinéma français. Parce qu’il a sa manière très personnelle de jouer. Tout en sensibilité, tout en émotion.

Ses duos sont irrésistibles : avec Mireille Darc, avec Jane Birkin, mais aussi avec des hommes, avec Jean Carmet, avec Pierre Palmade, et surtout, avec Gérard Depardieu. Jetant au fond d’une oubliette le concept du clown triste, Pierre Richard invente le clown distrait.

Enfin, le clown distrait seulement dans la première de sa carrière. Il n’était déjà plus très jeune, il a brillé dans ces rôles dans les années 1970 et 1980, il avait déjà la quarantaine, voire la cinquantaine déjà. Gesticulateur, avec ses grandes jambes, une stature qui s’impose sans en imposer, du mime parfois, un peu à la Charlie Chaplin. Tout en silence.

Forcément que le public l’aime : timide, modeste, distrait, maladroit, malchanceux, il a tout pour plaire, tout pour réaliser ce phénomène d’identification, aucune arrogance, aucune suffisance, de la gentillesse à revendre et un cœur immense. S’il faut résumer, je choisis deux films : "Le Grand Blond avec une chaussure noire" et "La Chèvre". Mireille Darc et Gérard Depardieu. Sans compter tous les autres acteurs succulents (Bernard Blier, Jean Rochefort, Paul Le Person et Jean Carmet pour le premier, Michel Robin et Corynne Charby pour le second, pour les deux, une apparition de Robert Dalban).

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Dans la seconde partie de sa carrière, il est l’acteur "vieux". Je l’ai découvert avec un téléfilm en Robinson Crusoé. Il n’a pas changé dans le comportement (il reste toujours un grand enfant rêveur) mais son apparence a transmuté. Le voici en vieillard, avec une barbe blanche, comme l’avait laissé pousser aussi l’ami Jean-Pierre Marielle. Ses yeux sont toujours aussi brillants et farceurs, son sourire irrésistible, mais il apparaît "vieux".

Mais pourquoi donc ces acteurs laissent-ils pousser leur barbe blanche ? Tout le monde ne peut pas rivaliser avec le Père Noël. Et pour Pierre Richard, cela peut lui faire le look d’un vieil anarchiste de droite solitaire et désabusé de la vie, ce que le sourire scintillant, heureusement, dément immédiatement.

Je propose ici sept occasions où Pierre Richard a été, selon moi, extraordinaire. Bien sûr, c’est un choix personnel, donc subjectif et arbitraire, mais ce sont des films ou prestations que j’ai adorés et qui tiennent grâce à l’aura de Pierre Richard.


1. "Le Grand Blond avec une chaussure noire" (sorti le 6 décembre 1972)

Ce film réalisé par Yves Robert (avec une collaboration avec Francis Veber pour le scénario) est un film "culte". Un faux agent pour rendre confuse une situation déjà confuse. Avec une suite, "Le retour du Grand Blond" (1974).






2. "La course à l’échalote" (sorti le 8 octobre 1975)

Réalisé par Claude Zidi, le film reprend les mêmes ficelles comiques que "La moutarde me monte au nez". Pierre Richard joue avec une Jane Birkin pleine de charme et un commissaire perplexe, Michel Aumont.






3. "Le coup du parapluie" (sorti le 8 octobre 1980)

Un film comique réalisé par Gérard Oury, qui met en scène Pierre Richard, acteur de pacotille devant singer un tueur à gages, avec un vrai tueur à gages, avec Valérie Mairesse, et aussi Gérard Jugnot, Dominique Lavanant, Robert Dalban, etc.









4. "La Chèvre" (sorti le 9 décembre 1981)

Film réalisé par Francis Veber, parmi les plus réussis de Pierre Richard, avec un humour subtil très rafraîchissant. Le duo Pierre Richard et Gérard Depardieu fonctionne à merveille (le rêveur maladroit et le réaliste sérieux) et a donné "Les Compères" (1983) et "Les Fugitifs" (1986), toujours de Francis Veber. Pour l’anecdote, il faut savoir que le duo initialement pressenti était très différent, Jacques Villeret pour le rôle de Pierre Richard et Lino Ventura pour celui de Gérard Depardieu.









5. "Robinson Crusoé" (diffusé le 22 décembre 2003 sur France 2)

Ce téléfilm réalisé par Thierrry Chabert reprend le livre très célèbre de Daniel Defoe (qui fut le livre fétiche de Michel Déon). Pierre Richard apparaît ici dans un rôle inédit pour lui.






6. "Pierre et fils" (créée le 21 septembre 2006 au Théâtre des Variétés à Paris)

Dans une pièce de théâtre mise en scène par Christophe Duthuron et écrite par Pierre Palmade et Christophe Duthuron, le duo Pierre Palmade et Pierre Richard fonctionne, lui aussi, très bien. L’effet comique est garanti par l’inversion des rôles : Pierre Richard, le père, est l’homme enfant, clochard irresponsable et rêveur, tandis que Pierre Palmade, le fils, est l’homme adulte, patron d’un supermarché, rationnel et sérieux. C’est Isabelle Mergault qui a trouvé le titre. La pièce se structure sous forme de dix sketchs, un peu comme les pièces avec le duo Pierre Palmade et Michèle Laroque.

Voici deux répliques savoureuses de Pierre Richard. La première : « In vino veritas, in Bordeaux veritas, in whisky whiskas, bien entendu ! ». La seconde : « Tu n’as pas eu de père, alors tu n’as pas eu de repère ! ».









7. "King Guillaume" (sorti le 28 janvier 2009)

Réalisé par Pierre-François Martin-Laval, le film fait apparaître une île bretonne au milieu de nulle part dont Pierre-François Martin-Laval, petit banlieusard, conducteur de petit train, marié à Florence Foresti, joueuse de tuba, devient le roi. Dans cette île vit toute une communauté assez étrange, Pierre Richard, Isabelle Nanty (Pamela !), Omar Sy, et aussi Rufus.






Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (02 août 2019)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Claude Zidi.
Pierre Richard.
Lino Ventura.
Line Renaud.
Jean Lefebvre.
John Wayne.
Kirk Douglas.
Élie Kakou.
Jean Bouise.
Pierre Desproges.
Anémone.
Gérard Oury.
Zizi Jeanmaire.
Jean-Pierre Marielle.
"Les Éternels".
Jacques Rouxel.
François Berléand.
Niels Arestrup.
"Acting".
"Quai d’Orsay".
Michel Legrand.
Gérard Depardieu.
Maria Pacôme.
Ennio Morricone.
Francis Lai.
Bernadette Lafont.
Pauline Lafont.
Marthe Mercadier.
Jean Piat.
Jacques Brel.
Charles Aznavour.
Charlie Chaplin.
Maurice Chevalier.

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6 réactions


  • Surya Surya 14 août 2019 13:28

    J’adore Pierre Richard, et suis une fan absolue, et depuis sa sortie, du « Grand Blond » (mais pas du Retour, que je n’ai aimé), c’est vous dire le nombre de fois que j’ai vu ce film, je ne m’en lasserai jamais,

    et aussi de « La Moutarde... » qui m’a fait hurler de rire.

    J’aime beaucoup « Le Jouet » aussi, le premier film de Veber si mes souvenirs sont bons, un film bien plus profond qu’il n’y parait au premier abord. L’enfant (je crois bien que l’acteur est devenu webmaster ou quelque chose comme ça) qui se rend compte que le pouvoir de l’argent rend froid et insensible au sort des autres, et que l’argent peut tout acheter, y compris l’obéissance, mais pas la tendresse et la sincérité. Ce n’est pas du tout un « petit » film. Pourquoi ne même pas l’avoir cité, alors que vous illustrez votre article avec une photo tirée du film ?

    J’ai été un peu déçue par « Le Coup du Parapluie » par contre. 

    « Comment peut-on être si original avec un nom si commun ? » Alors là il va falloir que vous m’expliquiez, parce que je ne comprends pas... Vous êtes à la limite en train de l’insulter, lui et son immense talent, en disant ça. Déjà, je ne vois pas en quoi son nom est « commun », non c’est vrai, en quoi c’est « commun » de s’appeler comme ça ?

    De plus je ne vois pas le rapport avec le fait d’être original ou pas. En plus si ça se trouve il n’est pas du tout original dans la vie, alors associer son vrai nom avec les rôles fictifs qu’il joue (magnifiquement) au cinéma, non, je vois pas... 


    « Tout le monde ne peut pas rivaliser avec le Père Noël »

    alors là cette remarque (un peu déplacée) tombe comme un cheveu (ou plutôt un poil de barbe) dans la soupe, ça n’a rien a faire dans l’article, c’est clair que vous n’avez dit cela que pour pouvoir glisser le lien vers l’un de vos articles. C’est dommage. Tiens ça me fait penser que j’ai pas de citation du Clan des Siciliens à glisser dans ce commentaire...


    Les plus grands acteurs sont capables de tout jouer, la comédie, les drames... Souvenez vous de la surprise qu’à produite Coluche quand est sorti « Tchao Pantin », personne ne pensait qu’il pouvait être aussi crédible dans un rôle tragique. Tout le monde était scotché. Eh bien pareil pour Pierre Richard, mais aussi Gérard Depardieu (un des plus grands du cinéma français, je l’adore, que dis-je ! je le vénère) et bien d’autres. Vous les mettez dans n’importe quel personnage, et il vous font un numéro de génie absolu. 


  • nono le simplet 14 août 2019 16:40

    il est mort ?


  • Abou Antoun Abou Antoun 14 août 2019 20:43

    Pierre Richard est un personnage sympathique. Il n’a qu’un inconvénient, surtout pour un ’comique’ ; il n’est pas vraiment drôle.


    • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 14 août 2019 20:58

      @Abou Antoun

      Salut. Alors là pas d’accord. Vais pas m’étaler mais Surya le fait très bien. J’adore son côté burlesque.


  • Waspasien 15 août 2019 12:23

    Et moi je vais faire une oraison pour Pierre-marcel Chemugle : tourneur-Fraiseur chez Renault...


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