mardi 19 avril 2011 - par Vincent Delaury

« Scream 4 » est un cours de cinéma !

Dix ans se sont écoulés depuis les horribles massacres commis à Woodsboro par le tueur au masque blanc. Mais alors que Sidney Prescott y revient pour le lancement de son premier livre, il semblerait que Ghostface ait le désir de se joindre à la fête pour de nouveau terroriser les teenagers de la ville. Du sang, des larmes et des cris. Wes Craven, avec son 4e opus de Scream, reprend les ingrédients de sa fameuse saga parodique et horrifique en se payant même le luxe de réemployer les acteurs vétérans (Neve Campbell, Courteney Cox, David Arquette) de la formule initiale afin de contenter les fans. Bref, on reprend les mêmes et on recommence le jeu de massacre, jouant sur le principe de la répétition du même et de la variation autour d’un même thème : la peur.

Scream 4 de Wes Craven est un film artistiquement assez vain (une répétition en boucle des codes de l’horreur et des situations des films précédents) mais il n’est pas sociologiquement sans intérêt. Du 3 sur 5 pour moi. Craven, vieux de la vieille du cinéma d’horreur, est un malin qui saisit l’air du temps. Déjà, avec son premier Scream (1996), il réalisait un film référentiel ludique qui démontait de l’intérieur la mécanique de l’horreur au cinéma. Nourri par les canons du genre (Psychose, Le Voyeur, L’Etrangleur de Boston, Massacre à la tronçonneuse, Halloween, Freddy…), son film anthologique partait de la représentation des peurs primales en peinture (cf. le fameux masque de Ghostface en référence au Cri de Munch, 1893) et surtout au ciné pour mieux rire de nous-mêmes : des spectateurs voyeurs à tendance sadomasochiste que nous sommes - « Dans notre inconscient, chacun de nous tue et viole  » (Freud). Et, dans Scream 4, le bougre en remet une couche ! Non seulement il ironise sur le film d’horreur - son regard postmoderne sur le genre fait feu de tout bois -, mais, en plus de ce méta-cinéma, Wes absorbe le tout-à-l'image actuel. Dans une mise en abyme vertigineuse, son film autoréflexif se nourrit des classiques du passé, dont les siens (La Dernière maison sur la gauche, La Colline a des yeux, la 1ère trilogie Scream), mais également du tropisme hollywoodien qu’est la figure désormais incontournable parce que bankable du remake. En outre, chez le public, notamment ado, le cinéma trouve une extension infinie avec Internet, via YouTube, les blogs et les réseaux sociaux (Facebook et Twitter). Il s’immisce partout et est lui-même infiltré par d’autres régimes d’images (séries TV, jeux vidéo, streaming, webcam, tabloïds people, vidéosurveillance, etc.). Ce qui n’est pas sans danger car la déréalisation de la violence extrême, souvent véhiculée par ces supports et déclinée ad nauseam dans des images dérivées d’images, brouille plus que jamais les pistes entre fiction et réalité. Notre regard peut s’aveugler à force de trop voir d’horreur médiatisée. (Attention spoiler) C’est le cas de la jeune tueuse glaçante et robotique de Scream 4. En vouant un culte aux images et à la célébrité pour laquelle elle est prête à tout, Jill Kessler (Emma Roberts) a définitivement basculé dans un monde parallèle d’une cruauté abyssale.

Craven, en vieux sage, met donc en garde. On se souvient alors d’un propos de son confrère Joe Dante (« Si vous voulez savoir ce qui se passe dans un pays à n’importe quel moment, regardez ses films d’horreur. »*) et on se dit que c’est vrai. Face à cette monstruosité de « l’image anesthésiante », on comprend alors mieux la geste revival de certains jeunes cinéastes (Alexandre Aja, Neil Marshall, Christopher Smith…) cherchant à revenir à un âge classique où l’horreur montrée faisait vraiment peur et non pas rire avec cynisme ; on flippe vraiment devant The Descent (2005) ou La Colline a des yeux version 2006. Mais c’est peu dire que leurs aînés (le Craven de la franchise Scream, le Romero anthropologue de Diary of the Dead), la société du spectacle ainsi que la vogue du gorno** (Hostel, Saw, etc.) ne les aident pas à retrouver cet un âge innocent, voire naïf, du film d’épouvante originel. Bon courage à eux !

* Cité par Bill Krohn, in Bush et les zombies, Cahiers du cinéma n°609, février 2006, page 25.

** Contraction de gore et de pornographie de l'image.

 



5 réactions


  • globulos nilasse 19 avril 2011 10:37

    je l’ai maté en stream,c’est pas un chef d’oeuvre,mais il n’est pas mauvais non plus. 


  • le poulpe entartré 19 avril 2011 11:30

    Et pendant ce temps, comme le fait si bien le footbaballe, on vous roule dans la farine. Encore une bouse de diversion.


  • patroc 19 avril 2011 16:25

     Sympa de parler de « the descent » qui est un petit chef d’oeuvre de suspense horreur (les « the descent » 1 et 2 à la suite, c’est tip top pour une soirée !).. J’ai vu « scream4 » : c’est bien, entre pastiche et sérieux, craven maîtrise le sujet et bien sûr, j’ai été incapable de trouver les assassins !.. Un bon petit film de suspense avec humour (le flic toujours avec un temps de retard, les scènes du début,..).. Pas mal.. 


  • Pol-Adolf Staline Pohl-Adolph Stahline 19 avril 2011 23:37

    Pffff... Ca vaut pas Rambo 6, qui est en préparation : « Rambo botte le cul de Khadafi ».

    GHOST FACE, J’VAiS LUI PÉTER SA GUEULE, COLONEL TRAUTMAN !!!!!


  • Prometheus Jeremy971 24 avril 2011 22:12

    J’ai bien aimé le coup de l’urinoir... Je savais pas qu’on pouvait faire ça avec.

    Et j’ai découvert qu’on pouvait se mettre des caméras n’importe où : dans des bottes de foin sur la tête, dans le c..


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