vendredi 22 janvier 2010 - par Taupo

Galerie de membres, partie 2 : Sauropsidés

(Auteur : Vran)

Pas une remarque de mauvais goût, pas une seule réaction choquée ou amusée, pas même un automate avide de mots-clés me conjurant une énième fois d’augmenter le volume de mon corps caverneux subnombrillaire… Grande a été ma déception devant le manque d’enthousiasme suscité par mon précédent billet. Mais qu’à cela ne tienne, si visiblement, l’Aedeagus n’a pas su éveiller l’intérêt (mis à part peut-être chez un ministère préférant le “funny” au “funky” et incapable de faire la différence entre une libellule et un papillon…), peut-être ce second épisode parviendra-t-il à titiller vos pupilles et le morceau de système nerveux qui se cache derrière. Finis, donc, les arthropodes et leurs membres chitineux, place aux écailleux squamates.

Dualité pénienne :

Attention, une particularité peut en cacher une autre. Chez les squamates (serpents et lézards), le pénis n’est pas un, mais plutôt deux demis. On parle en effet d’hémipénii car l’organe copulateur de ces animaux est composé de deux parties indépendantes, placées de façon symétrique sur le bas ventre. Du fait de cette morphologie originale, c’est tout l’appareil reproducteur qui s’organise, à la manière de nombreux autres organes, en deux sous-systèmes identiques disposés selon un plan de symétrie bilatérale (car rappelons le, les squamates font partie du grand groupe des bilatériens). 

Photographie des deux hémipénii et schéma de l’appareil reproducteur du lézard anolis carolinensis (Images : Gary Nafis et David Crews)

 

 Ainsi, chaque testicule est relié à un seul hémipénis via un canal déférent qui leur est propre, il n’existe pas de sinus urogénital commun comme chez les autres vertébrés (cliquez sur le schéma au dessus pour l’agrandir). Par conséquent, le sperme issu du testicule droit sera toujours expulsé via l’hémipénis droit et réciproquement pour le gauche. Un seul testicule étant mis à contribution à chaque rapport sexuel, l’animal “décidera” duquel utiliser en choisissant l’hémipénis à introduire. De manière générale, les squamates aiment d’ailleurs alterner l’usage de leurs hemipenii lors de leurs ébats successifs. “De manière générale” seulement, car une étude menée sur le serpent jarretière thamnophis sirtalis suggère que dans certaines conditions (notamment en cas de fortes températures), l’hémipénis droit, et par conséquent le testicule droit, serait utilisé préférentiellement à son homologue gauche. Il semblerait même que tout l’appareil génital droit soit de taille significativement supérieure, et fournisse de meilleurs résultats reproductifs que l’autre. Cette particularité n’est pas sans rappeler celle des oiseaux (proches parents des squamates), chez qui ce sont les femelles qui possèdent un appareil reproducteur asymétrique dont l’ovaire droit est atrophié et non fonctionnel.

Des formes et des couleurs :

Enfin, pour ne pas être en reste face aux épineux Aedagi des arthropodes, les hemipenii de squamates se présentent sous des formes très variées selon les espèces et peuvent également arborer de nombreux pics, crochets et dents en tout genre, pour le plus grand déplaisir des femelles.

 

Différentes morphologies hémipéniennes de serpent
(Schéma : http://www.une.edu.ve/)

 

Sur ces quelques images qui ne manqueront pas, j’en suis sûr, d’embellir votre journée, je vous laisse reprendre une activité cérébrale normale et vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour un nouvel opus consacré aux originaux et impressionnants pénis d’oiseaux. Ce prochain épisode marquera également le retour de la guerre des sexes et du conflit évolutif, phénomènes déjà évoqués précédemment dans la série.

 

Références :
  • Are snakes right-handed ? Asymetry in hemipenis size and usage in gartersnakes (thamnophis sirtalis). R.Shine, M.M.Olsson, M.P.LeMaster, I.T.Moore and R.T.Mason. Behavioral ecology. 2000.
  • Hemipenile Preference : Stimulus Control of Male Mounting Behavior in the Lizard Anolis carolinensis. D.Crews. Science. 1978.
 


9 réactions


  • LE CHAT LE CHAT 22 janvier 2010 14:27

    Au secours , les sauriens sont des adeptes de pratiques SM ! smiley my gode !


  • Nautile 22 janvier 2010 16:37

    J’aime bien celui qui ressemble à une anémone de mer ....
    Enfin quand je dis j’aime bien, c’est une façon de parler !

    Si je comprends bien, l’évolution nous a fait un mauvais coup !
    Fusionnant notre appareil urogénital en un ustensile à mono usage ( j’ai failli écrire usage unique !). Je n’ose imaginer notre vie de primate mâle si nous pouvions alternativement exploiter le coté gauche puis le coté droit. Sans aller jusqu’à utiliser les deux cotés simultanément puisqu’il faudrait pour cela disposer d’un fusil à deux canons ou d’un double fusil ...

    je m’égare ... la fatigue de la semaine sans doute !
    Merci en tout cas pour ces articles passionnants. Que je consulte la plupart du temps sur SSAFT.

    Mon préféré : l’histoire de la plume !! Je me suis régalé.


  • djanel Le viking- djanel du viking-chaise 22 janvier 2010 16:49

    .

    .

    OK, j’aime bien lire vos articles. Nous y apprenons beaucoup de choses. Il ne faut pas conclure qu’avec une petite quantité de commentaires, vos articles sont peu lus. Chaque fois que j’en vois un, je viens le lire sans laisser de commentaire. Par celui-ci, je vous encourage à continuer.

    Merci pour tous vos efforts de vulgarisation.

    Si l’on peut faire une commande, j’aimerais que vous nous expliquiez le comportement du frelon géant du Japon avec les abeilles et comment celle-ci se défendent contre lui avec beaucoup d’efficacité. Dans ce documentaire en lien ici, il y a aussi une étrange symbiose entre une orchidée qui attire les abeilles avec des odeurs de frelon pour qu’elle viennent l’attaquée et un moine qui en profite pour les capturer. Étrange et merveilleux à la fois.


  • sissy972 22 janvier 2010 18:20

    Pas évident de mettre un préservatif sur deux demi-pénis.
    Je suis tout à fait d’accord avec vous, de voir tous ces zizis a embelli ma journée.
    J’ attends avec impatience l’article sur les pénis d’oiseaux. 
    J’ aime beaucoup votre article, la connaissance doit être à tous les niveaux et commenter des articles de bestioles avec le sexe à l’ air est plus problématique qu’autre chose à moins d’être féru de petites bêtes.
    Très belles photos également.
    Shawford a très bien écrit ce que pense la majorité des lecteurs de vos articles.
    Bonne journée
    Sylvia


    • Lachésis 22 janvier 2010 20:27

      Vous risquez d’attendre longtemps, la plupart des oiseaux n’ayant pas de pénis (à part me semble-t-il les cygnes...) :p néanmoins leur sexualité mériterait aussi largement un article !


    • sissy972 23 janvier 2010 00:54

      Bonsoir Lachesis
      Vous n’avez pas lu l’article ? l’auteur a écrit que prochainement il ferait un article sur les pénis d’oiseaux !


    • Lachésis 23 janvier 2010 17:06

      pas la dernière phrase, j’avoue. Mais il me semble bien que la plupart des oiseaux ayant un cloaque, beaucoup sont tout simplement dépourvu de virilité... Et je viens de revérifier en survolant les sites web sur le sujet , c’est bien ça (même s’il existe des exceptions... Après sans parler de pénis, je ne sais pas, peut-être allons-nous découvrir que c’est joli un cloaque d’oiseau mâle... Même si en attendant je nourris quelques doutes :p )


  • hans 24 janvier 2010 21:51

    Cher Taupo ne vous découragez pas vos articles sont lus et surement relus mais ne vous basez pas sur les votes, il y a des lecteurs qui ne savent ou ne peuvent répondre, moi j’adore mais je ne suis pas la en permanence, je vous remercie pour vos efforts très importants, c’est beau.


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