jeudi 31 juillet 2014 - par C’est Nabum

La Courtoisie fout le camp

Après vous ... Je n'en ferai rien ! 

La politesse du cœur.

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Autrefois, la noblesse du cœur se traduisait par un comportement emprunt de générosité et de délicatesse vis-à-vis de ses pareils. Un individu, pour être honnête aux yeux de ses semblables, devait être porteur du talent social de la civilité. Aujourd'hui, dans nos cités, sur nos routes, dans les entreprises, dans les écoles ou dans les rues, ce noble sentiment est presque perçu pour un anachronisme improductif, inutile et parfaitement déplacé.

La courtoisie, puisque c'est d'elle qu'il est question, était parvenue à s'émanciper des effets de cour, des aménités de classes et des courbettes de componction pour s'étendre à toute la population d'une société où chacun avait sa part de considération et voyait en l'autre son compatriote. Je vous parle d'un temps où l'individu ne se déterminait pas par une appartenance religieuse, un train de vie, une tribu vestimentaire, un groupe ethnique ou un clan idéologique.

Contrairement à l'interprétation abusive des admirateurs du mari de la chanteuse, courtoisie n'a pas pour étymologie la juxtaposition de deux termes : « court et toise ». Bien trop de gens extrapolent et font, de cette merveilleuse qualité, l'affreuse capacité de considérer son semblable à l'aune d'une taille de référence : l'un de ces innombrables marqueurs sociaux qui désormais nous distinguent, nous séparent en segments socio-professionnels, nous classent , nous compartimentent, nous catégorisent selon nos parcours scolaires, spirituels, culturels et surtout financiers.

Cette approximation lexicale justifierait le mépris dont usent à loisir ceux qui se sont élevés dans notre société par la seule vertu de l'argent et qui toisent avec condescendance ceux qui n'ont pas le même train de vie. Elle peut tout autant expliquer les regards de haine que portent aux mécréants, ceux qu'une foi quelconque fait planer au-dessus des pauvres miséreux qui se refusent à croire en la transcendance.

La courtoisie est cette politesse raffinée qui, spontanément, fait de l'autre l'égal de sa propre personne, sans la moindre considération vaseuse, pompeuse et fallacieuse. Nul besoin de connaître son prochain pour lui offrir cette reconnaissance qui ne tient compte ni de la fortune ni de la réputation ni de l'origine pas plus que des croyances. Nul besoin de juger, jauger, évaluer au préalable ! La courtoisie ne se mesure pas !

Les insultes à l'affabilité sont nombreuses et le lieu de l'expression sublime de tous ses contraires n'est plus le seul espace routier. Si cette qualité, issue de la chevalerie, n'avait sans doute pas supporté le passage au cheval-vapeur - la voiture étant vite devenue le réceptacle idéal de la grossièreté, de la goujaterie, de l'égoïsme rustre- l'évolution de l'espèce a franchi, depuis longtemps, les limites de ce cadre, pour faire du piéton un malotru ordinaire.

Croiser un humain est désormais une aventure risquée pour peu qu'il soit différent de vous. La taille, l'âge, la provenance, la vêture, la démarche et bien d'autres critères encore, font que vous serez ignoré, méprisé, insulté ou bousculé. Les chances d'être salué s'amenuisent de jour en jour ; la probabilité d'une agression verbale ou physique augmentant de manière inversement proportionnelle. Les risques explosent si vous avez l'idée saugrenue de vous aventurer dans un espace sur lequel un groupe humain a fait main basse .

Même nos chers marchés sont devenus une mine de grise mine. La multiplication des files d'attente permet à certains virtuoses de l'irrévérence de multiplier les occasions de discourtoisie. Des retraités, forcément pressés d'en finir, qui doublent, interrompent une commande pour demander, sur le champ, un prix pourtant ardoisé ou retrouvent leurs jambes pour « sauter » un client. Des gens importants qui passent là , simplement pour se faire voir et qui s'exaspèrent de cette insupportable promiscuité. Ils traversent du regard cette plèbe goguenarde : ces gens du peuple, ces gens de si peu..

D'une manière quasiment systématique, c'est la file d'attente : la queue, le mal absolu. Juste retour des choses diront les tenants de l'à-peu-près. Triste incivilité de la bande, de la foule qui attend et doit en supporter d'autres qui entravent ce droit inaliénable à la ruse. On se bouscule, on se marche sur les pieds ou les spatules, on rejoint un éclaireur opportun, on bloque un groupe rival pour favoriser les siens ; on ne se regarde pas, on se parle pas, on triche !

Descendre d'un métro ou d'un tramway est devenue une opération guerrière. Face à vous, un mur de futurs passagers si pressés qu'ils ne pensent même pas vous laisser sortir. Ils vous barrent l'issue. Pire même, ils vous passent sur le corps pour entrer avant que vous ne puissiez esquisser le moindre mouvement de fuite. Ne vous aventurez pas à un sourire ou à bonjour : la ville est devenue un champ de bataille ! Face à vous, une horde innombrable d'ennemis potentiels ….

L'art de bien vivre ensemble, cette amabilité générale, cette convenance des bonnes manières, cette aménité bienveillante a beau multiplier ses synonymes ad libitum, elle se cogne désespérément à l'immense variété des grossièretés sociales, des impertinences comportementales que notre vocabulaire moderne a su synthétiser sous le vocable explicite de « Connerie ! ». Ce terme générique regroupe tout ce que nous sommes devenus, façonnés que nous sommes par une société qui divise, sépare, distingue, fragmente, émiette à loisir.

Ne désespérons pas de l'humanité cependant ; des gens se lèvent de-ci de-là sur la toile pour élever le débat et refuser toutes nos bassesses, pour relever cette toise et sourire à tous leurs semblables. La Fraternité est inscrite sur les frontons de nos institutions, il est grand temps de lui redonner ses lettres chevaleresques. Commençons, dès aujourd'hui, par nous dire bonjour dans la rue. Voilà bien un geste révolutionnaire qui pourrait, à moyen terme, faire vaciller un système qui se nourrit de nos divisions.

Courtoisement vôtre

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33 réactions


  • Gabriel Gabriel 31 juillet 2014 10:47

    Bonjour Nabum,

    La courtoisie a disparue balayée par l’individualisme. De plus en plus de personnes se croit seule au monde. Cela va des seigneurs qui se garent sur une place handicapé ou n’importe où quitte à gêner les autres parce qu’ils vont faire leurs petites emplettes ou chercher leurs gosses à la sortie de l’école mais qu’ils ou elles sont trop fainéants pour bouger leurs gros culs et marcher 50 mètres. En passant par ceux qui ne savent plus dire bonjour, au revoir, pardon ou merci car tout leur est dû étant donné qu’ils payent. N’oublions pas l’australopithèque des boutiques qui bouscule tout le monde, insulte les caissières et essayent de griller une place ou deux dans les files d’attentes. Un petit clin d’œil aux beaufs de paliers ou de camping qui se comportent comme des porcs sonores jusqu’à point d’heure n’ayant rien à foutre de leurs voisins. Un coucou aux parents irresponsables et cons d’admiration devant leurs progénitures incorrectes et insupportables, mais à qui ils donnent toujours raison face à l’adulte agressé par leurs chérubins débiles. Et enfin, pour abréger cette liste des incivilités, qui malheureusement serait très longue, les crasseux qui jettent leurs papiers, mégots, crachats et autres joyeusetés où ils se trouvent mais surtout pas chez eux...


    • C'est Nabum C’est Nabum 31 juillet 2014 11:10

      Gabriel


      Hélas, mille fois hélas ...

      Ajoutons les malotrus qui viennent déverser des injures quand ils ne sont pas d’accord avec le texte qu’un inconnu a souhaité leur offrir. Pourquoi venir cracher son venin ainsi ?

      Pourquoi salir, injurier, bousculer ... Quel plaisir ?

      C’est le signe d’une société qui explose

    • ppazer ppazer 31 juillet 2014 12:30

      C’est sûr, c’était mieux avant. Comme toujours.


    • mmbbb 31 juillet 2014 19:19

      vous avez aussi les ecolos de merde ces beaufs d’ecolos qui nous font chier J habite pres de Lyon et j’ai eu affaire a quelques problemes Certains cyclistes ne respectent pas le code de la route et vous passe sur les pieds j’ai eu des altercations et certaines femmes « liberees » sont aussi connes et grossieres que les hommes L’egalite des sexes ne souffrent pas de discrimination dans ce cas J’ai ecris a la Mairie de Lyon qui m ’ a repondu . Quant aux australopitheques de boutique j’ai carrement repris le sac depose sur la balance d’une femme agee qui m’avait bouscule et pris ma place alors que je laissais une distance de courtoisie afin de ne pas coller a la personne qui me precedait Elle fut etonnee de ma reaction tres vive et destabilisee par les regards des autres clients elles ne s’attendaient pas a ce genre de reaction Mais cette societe est une societe de merde merde dans les esprit et merde sur les trottoirs Deja etant interne j’ai decouvert cette mentalite petite ou deja certains jeunes sont tres cons mais tres cons.


    • mmbbb 31 juillet 2014 19:26

      c’est une simple constatation Les francais n’ont peu de civilite et neglige le bien commun Nous vivons comme des porcs et deja Mozart soulignait la salete de Paris J’ai traverse l’allemagne en train je comme dans d’autres pays c’est le respect du bien public qui permet ce vouloir vivre en commun C’est aussi simple que cela mais cessons de donner des lecons quelques qu’elles soient au monde entier Ce serait la moindre des choses 


    • Rensk Rensk 31 juillet 2014 21:45

      Faire « la loi » soi-même est interdit par la loi et ce n’en en rien être courtois...

      Prendre une fois un train dans un pays étranger et prétendre que le pays est meilleurs que le vôtre c’est de la croyance, du lèche-cul mais en aucun de la courtoisie...


    • Pepe de Bienvenida (alternatif) 1er août 2014 14:13

      L’idée des « porcs sonores » m’a fait repenser à ce qui s’est passé dans mon coin d’origine, et à l’influence de l’argent sur la courtoisie et le respect.
      Je suis né sur une plage tranquille d’Andalousie. Au début, les rares touristes qui s’aventuraient aussi loin étaient chaleureusement accueillis, et l’estime était réciproque. Puis, parce que certains autochtones y trouvaient leur compte et les touristes trouvaient là un moyen de défouler les frustrations d’une année de travail, on est passés à des hordes servilement accueillies. Le hic, c’est que ces touristes-là sont venus avec une idée marchande de l’échange, et que pour eux l’argent laissé sur place était une licence pour faire n’importe quoi. Et comme dans toute famille d’habitants du pays, il y a ceux qui vivent de ce tourisme et ceux qui pourraient très bien vivre sans, c’est l’option « faut bien faire avec » qui s’est finalement imposée. Mais quelque chose s’est perdu en route, et cette perte a laissé des traces qui réapparaîtront le jour où l’argent ne servira plus à lubrifier artificiellement les rapports. Et j’ai l’impression que, sous une forme ou une autre, c’est partout un peu pareil.


    • mmbbb 1er août 2014 19:52

      Lorsque vous sortez d’une gare vous voyez tout de suite la mentalite du pays Lorsque les personnes prennent soin de leur environnement immediat vous avez quand meme plus de chance de tomber sur des personnes respecteuses et courtoises ayant une elegance de vie Cela ne m’a jamais enchanter de vivre dans des rues degueullasses comme a Lyon Il y des signes qui ne trompent pas des principes qui peuvent se degager mais ce n’est pas un loi absolue 


  • Pascal L 31 juillet 2014 11:10

    Il me semble qu’il s’agit d’une conséquence d’un système économique ou la prédation l’emporte sur la création de richesse. Ce système réussit à une infime partie de la population. Le problème est que beaucoup voudraient faire de même et évitent de critiquer ceux qui vivent de la prédation. Il est beaucoup plus simple de s’en prendre à ceux que l’on considère comme socialement inférieurs et qui pourraient être des concurrents. On va donc critiquer les étrangers qui viennent consommer des prestations sociales plutôt que ceux qui ont mis en place un système injuste. Le Front National l’a très bien compris et en a fait son fond de commerce.

    L’absence de courtoisie est un marqueur de la montée de cet individualisme qui est aussi un racisme. Cette attitude est encouragée par l’attitude d’une bonne partie de nos gouvernants qui nous font penser que la seule morale possible s’énonce « Je fais ce que je veux et j’em… tout le monde ».

    • C'est Nabum C’est Nabum 31 juillet 2014 13:47

      Musima


      Merci à vous d’avis pris le temps d’un long commentaire particulièrement pensé.
      C’est également une forme de courtoisie et je vous en remercie chaleureusement.

      Je vous souhaite une belle et bonne journée

  • kalachnikov lermontov 31 juillet 2014 12:15

    Salut Nabum ;

    C’est la bienveillance qui a disparu, la courtoisie en étant l’accessoire. Et cela s’accompagne d’un réflexe tribal, un repli sur la proximité la plus ...proche.


    • C'est Nabum C’est Nabum 31 juillet 2014 13:48

      lermontov


      Ainsi les malotrus sont malveillants et voient le mal partout ...

      Tout va de mal en pis

    • kalachnikov lermontov 31 juillet 2014 14:00

      @ Nabum

      Pas forcément. Mais quand l’exception devient une règle, c’est qu’il y a autre chose en jeu.
      Et donc, ce ne sont pas là des malotrus, qui ont toujours été, mais autre chose, des malveillants et plus sûrement des effrayés et dépassés par les choses. Je ne sais pas, regardez sur ce forum lui-m^me, la façon des gens de se parler, d’argumenter. Par ex, juste les posts qui vous sont personnellement destinés dans l’intention de vous blesser.


  • Luc le Raz Luc le Raz 31 juillet 2014 12:40

    Quand, en voiture, je fais signe à des piétons qu’ils peuvent traverser devant moi ; beaucoup sont tellement étonnés, qu’ils ne disent même pas « merci ». smiley


  • ETTORE ETTORE 31 juillet 2014 12:55

    Eh bien, nous aurions du garder le port du chapeau !

    Au moins nous aurions pu faire un geste élégant en nous découvrant.
    maintenant, tête nue, les cerveaux fuient et rien pour arrêter l’hémorragie . 

  • alberto alberto 31 juillet 2014 13:57

    La courtoisie ?

    Y a des radio pour ça !

    Salut Nabum...  smiley


  • C'est Nabum C’est Nabum 31 juillet 2014 15:11

    Albarto


    La radiographie donne des clichés pas fameux

  • Ruut Ruut 31 juillet 2014 17:04

    La courtoisie c’est dire merci (amen) lorsque nous nous en prenons plein la gueule ?
    Non merci.
    Si tu te prend une baffe tend l’autre joue. (ça peut durer longtemps)


    • L'enfoiré L’enfoiré 31 juillet 2014 20:19

      Puis, on arrive à se haïr.

      En fait, il y a plusieurs manières de répondre au manque de courtoisie.
      - Passer inaperçu.
      - Faire semblant qu’on n’a pas compris
      - Répondre au dent pour dent
      - Répondre par de l’humour bien choisi.
      Je ne suis pas pour le triomphe des gentils, mais pour celui qui parvient à faire tourner les tables, qui renvoie la balle d’où elle est partie, c’est à dire, un endroit qu’elle n’aurait jamais dû quitter.
      Je l’ai dit, je n’aime pas le foot, parce que courir après une balle et puis l’envoyer à un autre, sans avoir l’assurance de l’avoir en retour... très peu pour moi. smiley

    • L'enfoiré L’enfoiré 31 juillet 2014 20:21

      Comment répondre à un index lever ?

      Simple montrer l’auriculaire vers le bas, et « tendrement » le faire évoluer de gauche à droite.
      C’est tellement plus sympa. smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2014 07:18

      Ruut


      La loi de la jungle en somme ...

      C’est la fin de la civilisation

  • alberto alberto 31 juillet 2014 20:33

    Nabum, j’oubliai...

    « L’hypocrisie est une politesse que le vice rend à la vertu » !

    Tu t’en souviens : Rochefoucauld, peut-être ?


  • Pepe de Bienvenida (alternatif) 1er août 2014 13:19

    Est-ce que la courtoisie se perd vraiment ? Nous avons tous un jour ou l’autre changé de file dans un ralentissement, et quelqu’un nous a aimablement laissé passer. De la même manière nous avons renvoyé l’ascenseur sans que ce soit à la même personne. Dans ce sens, courtoisie rime avec solidarité.
    Par contre, je ne sais pas pour vous, mais si j’ai repéré dans le rétro quelqu’un qui slalome entre les files pour gagner des places, comme généralement il a tendance à forcer (discourtoisement justement) le passage, je maintiens l’étanchéité de ma file et là, c’est l’état de ma bagnole qui procure un avantage psychologique smiley


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