mercredi 25 septembre 2019 - par C’est Nabum

Le Festival sur l’eau

La plus grande scène qui soit

« Vous serez mieux sur les bateaux à passagers. Vos histoires ne peuvent intéresser la grande foule du Festival ! » La sentence est tombée, me voilà animateur des balades sur l’eau. J’avoue avoir été partagé par ce qui passait certainement pour une relégation ou bien une mise à l’écart. Puis je me suis dit qu’il y avait là un public captif, qui durant 30 minutes, n’aurait pour alternative que de m’écouter ou de quitter le navire…

Bien sûr, il convenait pour moi de leur concocter un supplice sans pareil pour leur faire regretter leurs longues minutes de queue et d’attente avant que d’embarquer. Les moins vernis héritant alors du bateau qui pour cette balade, avait un bonimenteur à son bord. Décidément, certains jouent vraiment de malchance ! C’est la loi de la loterie en somme.

Pour les perdants, la potion amère était toujours la même. Une présentation décalée de l’équipage (quelques-uns m’acceptaient volontiers à leur bord pour profiter d’un moment de répit pour des cordes vocales mises à rude épreuve avec le vent d’Est et le bruit ambiant). Un exposé plus ou moins long sur l’histoire de la navigation sur la Loire, quelques anecdotes au gré des embarcations croisées ou des évènements se déroulant sur les flots avant que d’entrer en enfance avec un conte. Le choc est effectivement rude pour qui n’a pas été prévenu.

Le plus grand rival dans cette histoire est sans nul doute ce maudit téléphone portable que j'exècre de toutes mes forces. Entre les selfies, les films interminables et ceux qui même devant un spectacle somptueux, inhabituel et chamarré trouvent le moyen de répondre à leurs messages sans rien regarder ni écouter, il y a de quoi avoir envie de passer par-dessus bord ce maudit engin.

Ceci me pousse parfois à mettre en scène ce tueur d’intelligence et de savoir-vivre en disant un conte qui s’achève par un geste devenu hérétique : « le jet d’un téléphone sur le plancher du bateau ». Sacrilège diront les uns, folie penseront les autres qui prendront alors soin de protéger leur trésor en l’éloignant de ce mauvais diable.

Pour les autres, l’expérience ne fut semble-t-il pas aussi redoutable qu’ils le craignaient. Ils apprirent des choses, ils rirent avant de s’émouvoir et purent ainsi enrichir leurs connaissances durant une Fête. Une expérience peu banale en somme quand l’objectif n’est certes pas celui-là. Qu’importe, je ne déroge jamais à mes convictions, dans les flonflons il faut toujours une petite voix inaudible pour apporter un peu de lumière.

Je me gausse ! En fait ce fut toujours un vrai bonheur que cette demi-heure passée avec des gens différents, qui ne se connaissaient pas, qui ne savaient pas au juste ce qui les attendait. Les remerciements étaient au rendez-vous tout comme ce geste maladroit mais généreux de vouloir me donner une pièce que je refusais à chaque fois invitant ceux-là à me payer un canon (ce qui ne pouvait se faire en cet endroit).

Par contre, l’aventure me laissa exsangue physiquement, une véritable épreuve pour la voix et un rythme endiablé qui me voyait terminer la journée épuisé. Je ne fis jamais de vieux os sur la fête, je prie ceux qui espéraient m’y voir de m’en excuser. J’avais besoin d’aller me reposer, de retrouver quelques forces pour recommencer le lendemain.

Stakhanoviste du conte, j’avais présagé de mes forces et de ma capacité à tenir le choc. Heureusement que le bonheur était au rendez-vous. Tant pis pour ces scènes qui me furent refusées, la mienne était la plus grande et la plus belle de toutes : La Loire !

Navigablement leur.

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