lundi 31 mars 2008 - par Emile Mourey

La résurrection de Lazare dans l’Evangile de Jean

Voila bien le récit le plus controversé des Evangiles qui fait se diviser nos contemporains. Tandis que les uns ironisent, les autres regrettent les temps bénis où l’on ne se posait pas toutes ces questions. Il suffit pour s’en convaincre de consulter les ouvrages de plus en plus nombreux que les maisons d’édition publient sur Jésus. Or, le débat est forcément faussé pour la simple raison que les intervenants appuient leurs certitudes et leurs raisonnements sur des traductions imparfaites d’un texte original hébreu qui, comme l’explique le professeur Tresmontant, ne nous est pas parvenu. A cela s’ajoute la confusion qu’entretiennent les exégètes. Contrairement à tout ce qui a été dit, les Evangiles ont été écrits ainsi dès l’origine et la plus grande erreur qu’on puisse faire serait de sous-estimer l’intelligence de leurs auteurs. Le problème est qu’ils ne pensaient pas comme nous, aujourd’hui, nous pensons et qu’ils n’écrivaient pas comme nous, aujourd’hui, nous écrivons.

« Le village de Béthanie était proche de Jérusalem, à environ quinze stades (moins de 3 km, Jn 11, 18). C’était le village de Marie et de Marthe, sa sœur.  » (Jn 11, 1)
Etymologiquement, Béthanie signifie la maison d’Anne. Suivant mon interprétation que j’ai développée par ailleurs, Anne est la vieille population juive qui, dans le protévangile de Jacques, est restée fidèle aux Juifs déportés à Babylone et qui les a accueillis à leur retour (première dispersion). Marie est la jeune population qui a soutenu ses prêtres lors de l’affaire de l’aigle d’or et qui, après la répression d’Hérode de l’an - 4, a dû s’exiler (deuxième dispersion). Marthe est la population qui l’a accueillie (cf. mon Histoire du Christ, tome 1, chapitre 18).

« Jésus aimait Marthe, et sa sœur, et Lazare.  » (Jn 11, 5)
Ouvrons le Dictionnaire du Nouveau Testament de Xavier Léon-Dufour. Nous y lisons : Lazare, en grec Lazaros, de l’hébreu èl âzâr. Ouvrons la Bible. Nous y lisons : « Yahvé dit à Moïse : "Prends Ieschoua (Josué) - l’esprit est en lui -. Pose tes mains sur lui. Dis-lui de se mettre debout face au grand prêtre Eléazar, devant tout le peuple rassemblé. Puis, de façon que tout le monde voie, donne-lui tes ordres afin de lui transmettre de ton autorité sur les fils d’Israël." Eléazar, le prêtre, demandera alors à Yahvé de faire connaître sa décision par la voie de l’oracle. Quand cela sera fait, les fils d’Israël se mettront sous les ordres de Ieschoua (Josué). Il leur donnera l’ordre d’entrer et il leur donnera l’ordre de sortir. » (Nbre 27, 16-23). C’est ainsi que se déroula la cérémonie de transmission des pouvoirs entre Moïse et Josué.

Que l’on compare maintenant le texte de l’Ancien Testament au miracle de la résurrection de Lazare. Ieschoua (Jésus) se rend devant le tombeau où repose Lazare (en hébreu : Eléazar). Toute la communauté est présente. Ieschoua lève son regard vers le ciel comme pour demander au Père de lui donner un peu de son autorité. Puis, il le remercie d’avoir exaucé sa demande, c’est-à-dire de lui avoir accordé le pouvoir sur les fils d’Israël pour les faire entrer ou sortir du tombeau. « Ieschoua ordonne alors : "Eléazar, viens... sors !" » (Jn 11, 1-44)

Flavius Josèphe écrit que de son temps, on voyait encore le tombeau du grand prêtre Eléazar à Gabata. Où se trouve Gabata ? Personne n’a pu me le dire. Mais si Gabata et Béthanie sont une même localité, ce n’est pas un Lazare inconnu qui est sorti du tombeau, mais le grand prêtre Eléazar de l’Ancien Testament en personne, avec toute sa semence, c’est-à-dire avec toute sa descendance spirituelle jusqu’aux maîtres de la parole transpercés ou brûlés vifs par Hérode le Grand en l’an - 4.

La parabole de la résurrection de Lazare/Eléazar est un véritable appel à l’insurrection que l’Evangile de Jean lance par Jésus interposé aux Juifs en exil, et en particulier aux victimes de la tyrannie d’Hérode. Il demande tout simplement au grand prêtre Eléazar - aux prêtres que ce dernier a spirituellement engendrés - de ressusciter, de sortir du tombeau, véritable miracle. Il demande au clergé en exil, issu de la semence spirituelle du grand prêtre Eléazar, de prendre, en Judée, la tête du mouvement insurrectionnel.

« Lorsque le Salut de Yahvé (Iechoua/Jésus) s’était annoncé, Marthe avait aussitôt prévenu sa jeune sœur Marie et celle-ci s’était levée bien vite. Elle était tombée aux pieds du Salut de Yahvé et elle lui avait dit : "Seigneur, si tu avais été là, mon frère Lazare (les maîtres de la parole exécutés par Hérode avec leurs séminaristes en l’an - 4) serait toujours là." Et tous les Juifs pleuraient avec elle. Jésus avait été troublé dans son esprit. Il avait grondé en lui-même (contre le pouvoir hérodien) et il avait pleuré (sur la jeunesse assassinée par Hérode). Les Juifs disaient : "Voyez comme ils étaient aimés." » (Jn 11, 20-36). Il faut, en effet, se rappeler que lors de l’affaire de l’aigle d’or, Yahvé n’était pas intervenu pour sauver les prêtres de la fureur d’Hérode ce qui pouvait laisser supposer qu’ils n’étaient plus aimés.

Dès lors qu’on a compris que la résurrection de Lazare est un appel au soulèvement, ou plutôt au réveil d’une opposition politique contre le pouvoir des fils d’Hérode, la logique de l’Histoire s’impose à l’esprit.

A Béthanie, la foule afflue de toutes parts pour assister à la cérémonie du sacre. Suivant l’exemple des rois d’Israël, Jésus reçoit l’onction sainte que lui répand sur les pieds Marie, la Jérusalem exilée. Le conseil nazaréen de la révolution - dans lequel Jésus fait ses oeuvres, comme Yahvé fait ses oeuvres dans le peuple élu - le conseil nazaréen clandestin, dis-je, est rassemblé autour de la table. Les prêtres (Lazare), relevés par Jésus, sont présents. La cité d’accueil (Marthe) où s’est installé le siège du gouvernement théocratique provisoire sert les convives (Jn 12, 1-3).

A Jérusalem, les grands prêtres au pouvoir, inquiets de ce tumulte, tiennent conseil. Ils décident d’étouffer dans l’œuf la tentative d’insurrection et pour cela de tuer encore une fois Lazare (Jn 12, 10).

Mais le Salut de Yahvé prend de vitesse les Pharisiens. Aucune lance, aucune flèche, aucun obstacle ne peut arrêter le souffle de la liberté qui s’engouffre dans la ville. L’esprit et la parole de Yahvé (Ieschoua/Jésus) se répand dans le peuple. On brandit des rameaux de palmiers et on s’écrie : « Hosanna ! » (Jn 12, 12-13)

Le Sanhédrin se rend compte qu’il n’est plus maître de la situation. Tout dépend de l’attitude que vont prendre les Hellénistes qui sont dans la ville.

Mais voilà que le Salut de Yahvé vient à eux et leur dit : « L’heure est venue de choisir entre le pouvoir impie et le pouvoir (essénien) des justes. L’heure est venue de conduire une autre politique : celle qui élève l’homme vers Dieu. Que ceux qui ont peur sachent qu’en voulant conserver la vie dans le déshonneur, en réalité ils la perdent. Quant à ceux qui perdront la vie en me suivant, ils gagneront la vie éternelle. » (Jn 12, 25)

A ce moment-là, Jésus sent tressaillir en lui tous les martyrs du prochain combat. Troublé, il lève son regard vers le Père et lui dit : «  Père, sauve-moi dans cette heure ! car l’heure pour laquelle je suis là est maintenant arrivée. Que ton nom soit glorifié !  »

Du haut du ciel, une voix descend qui dit : «  Ainsi qu’il a déjà été glorifié (par le sacrifice des maîtres de la parole, de la jeunesse et par la grande manifestation qui suivit en l’an - 4), ainsi il doit être de nouveau glorifié. »
La foule croyait que c’était un coup de tonnerre, mais Jésus lui dit : « Ce n’est pas à moi que la voix s’est adressée mais à vous. Il vous appartient de choisir : ou bien vous me suivez en masse, ou bien vous ne me suivez pas. Mais sachez qu’à ceux qui me suivront, je promets quoi qu’il arrive, la vie éternelle. » (Jn 12, 27-32)

Bref, c’est une grande manifestation populaire que voulait déclencher, à Jérusalem même, le conseil nazaréen dans lequel Jésus faisait ses oeuvres. Cette grande manifestation a-t-elle atteint son objectif ? Tout porte à croire que non. Flavius Josèphe n’en parle pas. Le grand prêtre Caïphe envisage tranquillement la condamnation à mort de Jésus (Jn 11, 50). Et le texte évangélique conclut : «  Bien qu’il ait fait tant de choses devant eux, ils ne croyaient pas en lui.  » (Jn 11, 37).

Au IVe siècle, les Gaulois du pays éduen comprenaient encore assez bien le sens de la parabole. Revenus en Palestine dans la suite de l’impératrice Hélène, c’est une étonnante scène qu’ils ont sculptée sur la façade de l’église du Saint-Sépulcre.

Le messie annoncé par Jean, voici qu’il est arrivé à Jérusalem. Le Christ de Gourdon, de Chalon et d’Autun a ouvert le livre des Ecritures. Il fait le signe que les Esséniens avaient dit qu’il ferait pour se faire reconnaître. Le clergé bien vivant de la dispora de Bibracte a ouvert la tombe de Lazare. Hélas, Lazare sentait mauvais. A genoux, aux pieds du Christ éduen, la vieille Jérusalem implore le sauveur et lui demande de ressusciter son clergé. Cette sculpture appartient au style des monuments éduens.



47 réactions


  • Méric de Saint-Cyr Méric de Saint-Cyr 31 mars 2008 11:16

    En somme, votre interprétation de ce chapitre 11 de l’évangile de Jean revient à en faire un récit symbolique, volontairement "codé". Un message politique travesti sous la forme d’un récit mythique.

    J’aime assez cette approche, si c’est bien ce qu’il fallait comprendre.

    Dans la mesure où il n’existe aucune preuve de l’existence historique de Jésus et où tous les historiens sérieux (c’est-à-dire non inféodés aux croyances invérifiables véhiculées par le christianisme, vaste délire collectif) ont abouti à la conclusion que jésus n’est pas autre chose qu’un mythe, voir dans ces récits un ensemble de messages codés à portée sociale et / ou politique est sans doute une très bonne explication. En tout cas, beaucoup plus vraisemblable que de prendre les texte au pied de la lettre.

    Pendant la guerre 39-45, la BBC diffusait des messages codés que seuls les intéressés pouvaient comprendre. Il y eu ainsi les célèbres phrases prononcées par le général De Gaulle : les carottes sont cuites, il n’y a plus de tabac dans la tabatière…

    Votre article fait le pendant à un autre article publié ici-même aujourd’hui sur Benoît 16. C’est amusant. Je veux dire que même si un jour il est définitivement prouvé que Jésus n’a JAMAIS existé, ce n’est malheureusement pas demain la veille qu’on sera débarrassé de ce virus, de ce fléau que sont les religions !


    • Emile Mourey Emile Mourey 31 mars 2008 13:50

      @ Meric de Saint-Cyr

      Vous dites : En somme, votre interprétation de ce chapitre 11 de l’évangile de Jean revient à en faire un récit symbolique, volontairement "codé". Un message politique travesti sous la forme d’un récit mythique.J’aime assez cette approche, si c’est bien ce qu’il fallait comprendre.

      En effet, vous avez bien compris, mais qui contient toutefois une réalité historique vécue avec des hommes qui se battent pour leurs idées jusqu’au sacrifice de leur vie.

       


  • chmoll chmoll 31 mars 2008 12:18

    j’confirme ,lazare est ressuscité dimanche il était au PMU,il buvait l’sang du seigneur avec un glaçon


  • LE CHAT LE CHAT 31 mars 2008 12:50

    le dernier des poilus est bien mort sans avoir égalé Mathusalem , mais 110 ans c’est déjà un bel âge !

     

    cet article prouve bien que les curés nous racontent n’importe quoi depuis des lustres !


    • Philou017 Philou017 31 mars 2008 15:45

      La version de Mourey n’est qu’une interprétation qui ne prouve rien. Si l’Eglise a souent interprété les textes dans un sens qui l’arrangeait, je ne crois pas que ce soit le cas pour les miracles.

      L’Eglise en parle peu, d’ailleurs, car elle serait bien en peine d’en donner un début d’explication. Ca ne cadre pas avec sa version simpliste et assez réductrice de la vie.

      Il y a eu des cas finalement assez nombreux de miracles, notamment ceux de Lourdes, reconnus par les médecins eux-même. Cela devrait vous faire réfléchir.

      "un miracle n’est que l’expression de quelque chose que l’on ne comprend pas".


    • LE CHAT LE CHAT 31 mars 2008 17:00

      @PHILOU

      Cette définition est d’ailleurs valable pour les croyants comme pour les athées !

      par exemple le PSG champion de France , ça tiendrait du miracle ! et je pense pas qu’un dieu irait dans le Kop avec les supporters !


    • Philou017 Philou017 31 mars 2008 17:09

      Pas si difficile. Il faudrait simplement disqualifier les 19 équipes qui le précedent.


    • Emile Mourey Emile Mourey 31 mars 2008 16:02

      @ Constant danslayreur

      Vous me reprochez d’avoir écrit : « Au moment où j’écris ce texte, je ne sais pas comment il sera reçu. Peut-être faudra-t-il plus de vingt ans pour qu’on le prenne en considération. »

      Je veux dire par là que, comme cela fait trente ans que je dis que Bibracte ne se trouve pas au mont Beuvray et que, malgré toutes les preuves que j’apporte, on persiste toujours dans l’erreur, il ne faudra pas s’étonner s’il faudra plus de vingt ans pour qu’on comprenne cet article.


    • Emile Mourey Emile Mourey 31 mars 2008 19:41

      Depuis 19 heures, les commentaires concernant mon article de ce 31 mars "la résurrection de Lazare" sont masqués, apparemment sans raison. Avez-vous constaté le fait ? Quelqu’un peut-il m’en donner la raison ?

      l’auteur


  • vincent p 31 mars 2008 19:33

    Je trouve que votre texte est intéressant à lire, au sujet de la résurrection de Lazare, de l’ordre du possible de l’envisageable, mais pas à vous juger où à le piétiner, le monde moderne se porte déjà si mal comme cela, pauves gens du Tibet, de Chine, où d’ailleurs...

    Cordialement,


  • Emile Mourey Emile Mourey 31 mars 2008 19:45
    Depuis 19 heures, les commentaires concernant mon article de ce 31 mars "la résurrection de Lazare" sont masqués, apparemment sans raison. Avez-vous constaté le fait ? Quelqu’un peut-il m’en donner la raison ?

    l’auteur


  • Boileau419 Boileau419 1er avril 2008 04:47

    Béthanie peut aussi s’interpréter comme "la maison du pauvre"...

     


    • Boileau419 Boileau419 1er avril 2008 04:48

      Vous faites des paraphrases de l’Evangile qui sont bien osées, ce me semble...


    • Emile Mourey Emile Mourey 1er avril 2008 09:30

      @ Boileau419

      Comme je l’ai reconnu dans ma réponse au commentaire précédent, il s’agit d’une maladresse de ma part. J’ai, en effet, présenté dans cet article, comme une citation, un passage de mon livre qui n’était présenté que comme une interprétation. Il n’empèche que je persiste à dire que cette interprétation est très proche du texte original. La nuance qu’il faudrait apporter est la suivante. L’auteur de cet évangile qui, selon moi, est Jean-Baptiste présente dans ce texte un modèle de manifestation pacifique. C’est la foule qui porte Jésus. Un Jésus, non pas guerrier comme Josué, mais monté tranquillement sur un âne. Où est le motif d’arrestation ? Et en plus, ce Jésus vient pour donner sa vie et non pour réclamer la tête ou la démission de ses adversaires. Pour donner sa vie, c’est-à-dire que l’auteur de l’évangile anticipe l’arrestation et la condamnation à mort et comme, logiquement, c’est cela qui devrait se produire, cela voudrait dire que ce texte est une prophétie qui avait toutes les chances d’être vérifiée par les faits.

      Modèle de manifestation pacifique. Et en effet, Flavius Josèphe rapporte quelques manifestations pacifiques tout à fait caractéristiques préfiguant d’une façon étonnante nos grèves du travail ou de la faim, dont une, en particulier, qui força l’admiration de l’occupant romain et le fit même céder.

      Jean (Jean-Baptiste) fut-il un précurseur, un maître en guerre psychologique, peut-être bien.


    • Emile Mourey Emile Mourey 1er avril 2008 09:31

      préfigurant


  • iomej 1er avril 2008 09:47

    Je ne peux pas m’empêcher de trouver cette lecture de la résurrection de Lazare très alambiquée, très tirée par les cheveux. Chacun naturellement peut interprêter les textes de la manière qu’il veut ou qu’il peut, littérale ou symbolique, et leur donner le sens qui lui convient le mieux... jusqu’à délirer.


    • Emile Mourey Emile Mourey 1er avril 2008 09:58

      @ Iomej

      Votre remarque me semble assez pertinente. Je vous signale l’ouvrage de Maurice Mergui "Un étranger sur le toit" qui traite de l’exégèse juive et de l’interprétation des textes du Nouveau Testament. Bien que je ne sois pas inspiré par cet ouvrage que je n’ai connu qu’après la rédaction de mes thèses, l’auteur met bien en évidence la complexité de la pensée juive de cette époque.


    • iomej 1er avril 2008 10:46

      Je ne suis pas du tout qualifié en exégèse de la bible et des évangiles. Ce qui me "gêne" le plus dans votre article est que la lecture de textes sacrés a essentiellement, pour moi, une portée individuelle... et très exceptionnellement collective. Elle peut dévoiler un sens pour soi dans un cheminement personnel. Et un sens parmi bien d’autres.

      Les miracles relatés dans les évangiles, pour moi du moins, ont été rajoutés par les rédacteurs pour les besoin de leur cause. Ils ont eu recours au merveilleux comme dans les contes pour enfants. Pour autant, ces récits de miracle ont peut-être une signification. La "résurrection" de Lazare, impossible physiquement, signifie sans doute qu’un individu peut être ouvert, re- suscité, sorti de son ego, au seul contact d’un "maître", d’un être régénéré. C’est ce qui est censé se produire dans certains courants initiatiques ou d’enseignement, et cela se produit parfois aussi dans la vie de tous les jours quand la rencontre avec un être change le cours de notre vie, nous fait sortir d’une phase d’arrêt et de macération ou de pourrissement.

      De manière générale, je m’en tiens le plus souvent dans l’approche de ce que je ne comprends pas à cette recommandation que font les soufis : "Ne crois jamais rien qui soit contraire au bon sens".


  • Spartakus FreeMann Spartakus FreeMann 1er avril 2008 10:20

    Monsieur Mourey, vous écrivez : "sur des traductions imparfaites d’un texte original hébreu". Texte original hébreu, il me semble que vous vouliez plutôt écrire "araméen". Différence de marque si je puis dire.

    Spartakus


    • Emile Mourey Emile Mourey 1er avril 2008 10:51

      @ Spartakus FreeMann

      Non, pas du tout. Dans son "Christ hébreu" le professeur Tresmontant a clairement démontré que le texte grec qui nous est parvenu est une traduction presque mot à mot d’un original qui ne pouvait être qu’en hébreu. Maurice Mergui, hébraïsant, l’affirme aussi ainsi que, je crois, André Chouraqui et d’autres. L’araméen était la langue parlée mais l’hébreu était toujours connu des lettrés. C’était d’ailleurs la seule langue qui permettait de lire les livres saints car je ne crois pas que l’araméen ait été, à ce moment-là, une langue écrite. Enfin l’hébreu étant la langue sacrée et sanctifiée par la tradition, les évangiles, dès lors qu’on comprend qu’ils ont été rédigées ainsi, à l’origine, ne pouvaient l’être qu’en hébreu.


    • Spartakus FreeMann Spartakus FreeMann 1er avril 2008 11:38

      Monsieur Mourey,

       

      L’Araméen est également une langue écrite, pour s’en convaincre il suffit de se reporter aux divers Targoum. L’hébreu dit "carré", la langue sacrée par excellence, n’était que peu utilisée, voire pas du tout, par le peuple, surtout à cette époque ; et même les lettrés n’utilisaient que rarement cette écriture. L’araméen n’est pas différent dans sa graphie, cela dit. Le point important repose dans le caractère vernaculaire et populaire. Si l’on veut toucher le peuple de la Palestine à cette époque, l’on se doit de lui parler en Araméen et non dans la langue des scribes. Au risque de postuler que Jésus le Christ n’était qu’un agitateur aristocratique, ce qui serait un peu, mais pas trop, à l’encontre de "son" message.

      Je vous reporte, monsieur Mourey, au Talmud, où l’on glose un peu, ici et là, sur Jésus Panthera et autres Jésus...


    • Emile Mourey Emile Mourey 1er avril 2008 12:48

       

      @ Spartakus FreeMann

       Que voulez-vous que je vous réponde. Je ne suis pas spécialiste des questions que vous soulevez. Tout ce que je crois savoir est que le Talmud est apparu après 70, après la guerre de Jérusalem, notamment dans les écoles de Sephoris et de Tibériade, pour préserver la pensée juive que la chute de Jérusalem avait failli faire disparaître, tout au moins en Palestine (alors que le judaïsme messianique continuait son essor dans la diaspora). Que je suis bien obligé de faire confiance aux linguistes, notamment hébraïsants, qui argumentent et qui prouvent leur argumentation en l’exposant dans des ouvrages, ce qui n’est pas toujours le cas de Wikipedia. Que le professeur Tresmontant – page 198 de son ouvrage – réfute les thèses des siècles passés que vous évoquez. Qu’avant la destruction du temple, les textes hébreux étaient, selon lui, traduits oralement en araméen pour être compris par le peuple et qu’il était interdit de mettre par écrit en araméen ces textes sacrés.


    • Spartakus FreeMann Spartakus FreeMann 1er avril 2008 13:36

      Vous dites "Qu’avant la destruction du temple, les textes hébreux étaient, selon lui, traduits oralement en araméen pour être compris par le peuple et qu’il était interdit de mettre par écrit en araméen ces textes sacrés". Et je suis tout à fait d’accord. Mais, alors, ne pensez-vous pas que les enseignements de Jésus durent se retrouver plus logiquement en langue araméenne et non par écrit hébreu carré ? Si je vous suis bien, ces enseignements étaient-ils si sacrés qu’ils devaient requérir absolument l’écriture sacrée, ou bien devaient-ils être diffusés largement et donc être propagés en araméen ? Ou les deux coinjointement ?

      Le Talmud, comme le judaïsme post-Temple sont deux tentatives de recoller le savoir perdu. Cependant, Qûmran et Nag-Hammadi et donc les Esséniens sont-ils gyrovagues ou centripètes de ce mouvement de conservation de la Connaissance ?


    • Emile Mourey Emile Mourey 1er avril 2008 14:27

      @ Spartakus FreeMann

      Je pense que si les évangiles ne nous sont parvenus qu’en grec, la raison en est que c’est dans cette langue qu’ils ont été le plus largement diffusés et conservés et, probablement beaucoup plus dans la diaspora qu’en Palestine. Il semble même qu’ils soient tombés dans l’oubli en Palestine, mais non dans le pays éduen, ce qu’illustre le voyage de l’impératrice Hélène en Palestine pour retrouver et mettre en valeur les lieux saints.

      Je ne suis pas contre le fait qu’il ait existé des textes écrits en araméen au temps de Jésus-Christ mais, comme l’explique Tresmontant, ce n’est qu’en hébreu qu’on pouvait vraiment comprendre et interpréter les textes anciens et en écrire de nouveau dans le même style. Tresmontant insiste bien sur le fait que Jérusalem était certainement à cette époque un des lieux le plus important regroupant un très large public de lettrés.


    • Spartakus FreeMann Spartakus FreeMann 1er avril 2008 16:51

      Vous dites : "Je ne suis pas contre le fait qu’il ait existé des textes écrits en araméen au temps de Jésus-Christ mais, comme l’explique Tresmontant, ce n’est qu’en hébreu qu’on pouvait vraiment comprendre et interpréter les textes anciens et en écrire de nouveau dans le même style."

      En fait, je ne comprends pas bien.

      Cependant, il existe des hébraïsants - chrétiens ou non - qui s’essayent à retrouver les racines hébraïques (et araméennes, j’insiste par Bélénos !) dans le Nouveau Testament. Une connaissance avait commencé à entreprendre cet travail - un peu dans le sens de Chouraqi d’ailleurs, mais en moins professionnel. Il en ressortait des éléments assez intéressants, de nouvelles lectures se proposaient alors au lecteur.

      Pour finir, j’aime lorsque vous proposez des lectures symboliques (ou interprétatives) des Écritures. Vous êtes dans la veine de la Kabbale et de la Gnose, qui s’essayent à voir un sens au-delà du sens


  • Spartakus FreeMann Spartakus FreeMann 1er avril 2008 10:51

    Je pense que l’article, et les autres thèses de M. Mourey, concernant les diverses "sectes" juives de l’époque de Jésus le Christ sont pour le moins réducteurs. Parler des Esséniens, des Sadducéens, des Pharisiens et des Sicaires sans replacer ces mouvements dans leurs objectifs et stratégies, dans leur milieu culturel, cela revient à herméneutiser dans le vide.

    Les pharisiens - pour couper court le cheveu - sont les ancêtres de nos rabbins actuels et kashers. La pensée pharisienne représentait la sortie du pouvoir spirituel du Temple de Jérusalem. Jésus s’il parlait de détruire celui-ci, parlait également de le reconstruire ; s’il se révolte contre les pratiques connexes du Temple, il dissert avec les Sages en son sein. En ce sens, Jésus digne rejeton de David ne peut être que du côté du Temple. Si l’on regarde les personnes qui soutiennent Jésus dans sa démarche qui remarque-t-on ? Des riches, des membres des familles des prêtres du Temples, mais aussi des collecteurs d’impôts ; Jésus est donc soutenu par la classe dirigeante. Jésus, dans les écrits torves et dénaturés, qui nous sont parvenus ne se bat pas contre Rome - qui est alors la seule puissance esclavagiste et impie à régner sur Jérusalem - mais contre l’iniquité de son Temps (que l’on me suive ici).

    Jésus s’il était bien de son temps et de la Palestine ne pouvait s’exprimer avec ses "amis" qu’en araméen, langue populaire ; par contre, s’il était bien Charpentier, il devait sans aucun doute possible connaître l’Hébreu. Que ce que l’on nomme aujourd’hui "Canon" soit une traduction d’une traduction de ce que l’homme qui a vu Dieu a dit à celui qui le suivait, peut-on espérer qu’un fragment de la lumineuse lettre vivifiante de l’hébreu soit passé ?


    • vincent p 1er avril 2008 12:30

      Si l’on regarde aujourd’hui les personnes qui soutiennent d’abord Jésus dans leur vie qui rejette-t-on d’abord en premier dans ce monde ? Les premiers ou les derniers ?

      Jésus n’a pas toujours était bien soutenu et suivi dans son esprit par la classe dirigeante de son temps, c’est-à-dire par ceux qui avaient beaucoup trop d’intérêts à perdre à cause de sa foi, je dirais même qu’il a eu bien plus de problèmes avec les gens bien établis de son temps, c’est-à-dire les gens riches et bien pensants, les faux docteurs, qui préfèrent davantage marchander les corps et des Ames, comme encore aujourd’hui hélas !

      Je pense que l’article, et les autres thèses de M. Mourey, ne sont pas toujours pour le moins réducteurs,
      vous même herméneutiser souvent dans le plein ?

       


    • Spartakus FreeMann Spartakus FreeMann 1er avril 2008 14:23

      "Je pense que l’article, et les autres thèses de M. Mourey, ne sont pas toujours pour le moins réducteurs, vous même herméneutiser souvent dans le plein ?" - Non, j’herméneutise totalement plein, là est la différence


  • vincent p 1er avril 2008 17:42

    Quelle prétention en effet !


  • ledefricheur 1er avril 2008 21:56

    OK ! Bon commentaire mais il serait nécessaire d’élever un débat verrouillé par les esprits de systèmes...

    Les documents existent permettant de montrer les fondements du dogme religieux... Seulement voilà, nous sommes, plus ou moins mais surtout plus, limités par un manège d’idées reçues et de lieux communs nous donnant à penser que nous savons ?... En fait, RIEN !

     Une recherche exhaustive dans l’analyse des matériaux anciens révèlent, notamment par des fragments épars disséminés dans les textes d’auteurs prudents soucieux de ne pas terminer prématurément leur existence sur le bûcher, démontrent que toutes ces figures de proues ayant mené l’humanité en bateau ne sont que des fictions. Abraham, Moïse, Jésus pour ne citer que ceux-là, ne sont que des fantômes, des personnages "historiques sans histoire... Par conséquent, les faire intervenir dans un quelconque examen est totalement stérile...Dans le célèbre C/Celse d’Origène, celui-ci brisant en passant quelques lances avec le judaïsme rejetant Jésus et pour cause, lui demandait, pour clore la polémique, de prouver l’existence de Moïse ?... Après quoi il s’engageait à prouver celle de Jésus...Ce dernier étant une projection actualisée de l’autre qui nous renvoie à Hénoch-Abraham-Israël le premier Né, il n’y eut aucune suite, évidemment. Les deux larrons savaient jusqu’où ne pas aller trop loin tout en élevant des garde-fous...

     Nous sommes confrontés avec une histoire antédiluvienne de l’humanité, dévoyée par les mythes qui, n’en déplaise, constituent des repères pour ne pas oublier et "reconstituer" les grandes lignes de cette épopée tragique ayant permis, plus tard, d’inventer le monothéisme...

     Le fameux opportuniste Augustin convaincu de la bonne affaire chrétienne écrivait en substance :

     "L’esprit qui appréhenderait le passé, en possession d’une science et d’une préscience certaine, le dépouillerait des mystères masquant des faits extraordinaires, stupéfiants, effroyables..." (Conf.11, 31)

     Oui ! Il faut combattre les religions soporiphiques, contre nature, non par la force mais par un discussion objective mettant en lumière et explicitant les absurdités bibliques : notamment la fameuse résurrection et son rituel baptismal... dont j’ai proposé une bonne "hypothèse" : Je répète, Rien ne sort de rien et, à l’instar de toutes les acrobaties composant la farce biblique, un fait extraordinaire, incompréhensible et anachronique est à la source de cette légende. Même chose pour la séparation de la Mer Rouge... Idem pour le Sinaï volant selon le Coran ou Hénoch s’élevant au "Ciel", tout comme le "Prophète", sur un cheval volant...

     Légendes que tout ce fatras illusoire et incompréhensible mais, comme toute légende, construite sur un fait réel ... Faits réels que l’on a dévoyés en interposant le voile du mystère. Le plus haut Mystère du Judaïsme est constitué par la Mercabah évoquée dans la fameuse "vision" d’Ezéchiel. Dans le "Guide des Egarés, Maïmonide précise qu’il était interdit d’en parler sous peine d’un grand danger... Pour ce motif le sujet fut éludé et l’on ne savait plus grand chose le concernant... Agoravox, nous verrons bien si les engagements sont tenus..., offre un terrain favorable à un débat constructif puisqu’il conduirait à réexaminer les sources négligées... A cet effet, je me ferai un plaisir de vous communiquer la bibliographie relative au livres que l’ont ne peut ignorer...

     A bientôt j’espère...

    Ledefricheur


  • vincent p 3 avril 2008 23:16

    "Rien", comment pouvez- vous affirmer cela ?

    Devant toute cette somme de documents historiques, les documents bien écrits ne manquent pas de nos jours nous amenant à mieux voir que nos ancètres étaient certainement plus respectueux et soucieux de préserver la tradition que nos contemporains devant leur téléviseur.

    En fait, dire que nous ne savons rien à ce sujet n’est pas tout-à-fait exact, mais encore faut-il s’en donner la peine d’en faire le tri, de vouloir en apprendre plus d’un homme plus religieux que soi par exemple. L’histoire des religions n’est pas réduite qu’à des périodes fictives religieuses, il y a tant de grands maîtres courageux dans notre histoire qui n’ont pas mené les gens en bateau, comment peut-on faire un trait sur eux, sur leurs valeurs, leurs propos, leur vie, leur histoire, leurs témoignages aussi courageux en leur temps et non consensuels, et qui ont permis parfois avec succès ou pas certains réveils spirituels.

    Donc tous ces grands maîtres sprirituels ou philosophiques de notre histoire, sont réduits à "rien" à suivre plutôt certaines idées reçus modernes, à croire que rien de bon ne s’est dégagé des divers courants spirituels ou religieux de notre histoire. Vous êtes vous au moins donné la peine de lire ses ouvrages autrement et non au pied de la lettre, c’est-à-dire sans trop de préjugés.

    Qu’entendez-vous par combattre toute les religions soporiphiques, et contre nature de quoi, Dont vous répétez avec excès rien ne sort de rien, notamment la fameuse résurrection de Lazare. Je trouve au contraire votre commentaire peu respectueux à entendre à l’égard d’un bon nombre de personnes, d’ailleurs il me semble me souvenir que ce n’est pas le première fois que vous sautez sur le premier sujet venu sur Agoravox parlant de religion, comment pouvez-vous alors converser en toute toute objectivité à ce sujet.

    Bien sur que si, il peut parfois sortir quelque chose de bon, d’un petit rien en matière de religion, d’une rencontre entre deux "riens", deux personnes, deux pauvres, l’un se portant bien, et l’autre pas très bien du tout avec ses deux jambes paralysées ou encore ses deux oreilles bouchées.

    Ne vous êtes-vous jamais posé la question que l’épisode de la résurrection physique, ou psychique
    de Lazare, pouvait être aussi la rencontre d’un grand maître spirituel avec une personne devenu complétement désoeuvré ou banni par ses confrères religieux du moment, ou alors la rencontre avec un autre devenu complétement désoeuvré dans la vie par les nombreuses idées reçus de son temps, et à qui on aurait toujours dit que le bonheur ou la santé morale dans une vie d’homme ou de paralysé se résumait toujours à faire ceci ou cela en matière de convenance sociale ou pas, qu’à la seule condition matérialiste, comme le lavage de cerveau de nos jours... Il y aurait tant à dire.

    Bien sur tous les passages codés ou moins codés symboliquement de la bible ne sont pas toujours à prendre au pied de la lettre, ce qui ne serait pas rendre meilleur service à ses semblables en matière de foi, de religion ou de spiritualité. A croire aussi, qu’il n’est plus de bon ton de faire rêver les gens et les enfants de nos jours au merveilleux d’autrefois, de leur raconter des histoires moins tristes et aussi plus porteuses d’espérance à travers les différents passages de la Bible.

    Et oui, si tant de gens sont menés en bateau de nos jours, on ne peut certainement pas toujours continuellement l’imputer à Moïse, Jésus, Rama, Zaratoustra, Lao Tseu, Bouddha sans non plus faire la liste de tous les Saints ou toutes les grandes Ames issus de toutes ces traditions religieuses, et faire un grand trait sur eux.

    Je ne pense pas non plus que tous les grands esprits de notre histoire, ne soient des fantômes ou des personnages sans histoire, sans vécu, sans parler non plus de toutes ces personnes qui les ont cotoyés de près ou de loin, celà fait beaucoup de monde à mettre sur le bûcher des vanités de ce monde moderne, n’est ce pas ?

    Mais pourquoi magnifier davantage des faits qui étaient déjà si magnifiques et si réels à la foi ? De peur peut-être que les hommes à l’avenir en perdent davantage le sens du merveilleux, du respect envers la tradition au nom même de la modernité mise en place, préférant davantage montrer ou exhiber les faits modernes ou économiques que les faits anciens.

    A ce propos, j’aimerai bien vous adresser aussi en retour toute cette vaniteuse bibliographie moderne qui recherche tellement à faire un grand trait sur la tradition religieuse ou spirituelle de notre histoire, que nul pourtant ne devrait plus longtemps ignorer face au grand mal-être de notre société moderne...

     


  • Thomas 22 avril 2008 03:03

    N’y a-t’il pas plusieurs façons de voir et de tenter de décrire les choses pour des "réalités" perçues comme diamétralement opposées ? Que voyez-vous par exemple sur ces images ?

    Une approche du concept de la physique quantique tel que décrit ici (source Wikipédia) peut nous aider à illustrer le débat :

    " Un des grands problèmes de la physique quantique est de donner des images. L’être humain a besoin d’images pour réfléchir, pour retenir ... À titre d’exemple, lorsqu’on ne connaît quelqu’un que par la voix (on l’a eu au téléphone ou entendu à la radio) et que l’on voit la personne pour la première fois, on se dit « c’est bien comme cela que je me l’imaginais » ou bien au contraire « je ne me l’imaginais pas du tout comme cela » ; notre cerveau a donc construit une image pour désigner cette personne, bien que l’on ne l’ait jamais vu...

    Imaginons maintenant une rivière, et posons un rocher dans cette rivière. Le courant, en rencontrant le rocher, va donner naissance à des tourbillons. Le tourbillon se détache du rocher, et en s’éloignant, il s’estompe et disparaît. L’objet observé est le tourbillon, mais est-il un objet en lui-même, ou bien est-il juste le produit de l’interaction de deux autres objets ? Assurément, on peut étudier le tourbillon en tant que tel : position, taille, vitesse... mais il ne peut pas exister seul, il est bien le résultat de l’interaction entre le rocher et le courant..."

     

     

    Où voulons-nous en venir, me direz vous ?.. Et bien d’une part, qu’il n’y a pas d’effet sans cause. Il n’y a pas de légende sans réalité historique (par exemple l’affaire "Jeanne D(’)arc" que certains de nos contemporains, loin d’être de rigoureux historiens, considèrent comme un montage politique de toute pièce), et d’autre part, ce n’est pas parce qu’on arrive à décrire une image d’une manière très habile, qu’il n’existe pas une autre "réalité" que l’on ne voit pas et que l’on pourrait analyser autrement. On peut se torturer les neurones, appréhender les textes de manière rigoureusement analytique et platonique à la manière d’un parfait Sherlock Holmes, il n’en demeure pas moins qu’il existe aussi d’autres approches des textes évangéliques plus synthétiques. Doit-t’on lire le message de l’évangiles de Jean à la loupe entre les lignes ou au contraire, en reculant, par dessus les lignes ? Et le message évangélique de Jean ne vise-t’il pas justement la postérité dans les toutes premières communautés ? nous ne pouvons pas concevoir une transmission micro-codée, dans ce cas, seul un macro-codage, s’il dut en avoir un, serait envisageable, car comme nous l’avons dit : " l’homme a besoin d’images pour réfléchir et retenir" et les messages complexes n’auraient pas pu survivre dans la mémoire collective des premières communautés chrétiennes.

    "Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas ; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. Je vous le dis en vérité, quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant n’y entrera point." (Marc 10.14-15)

    "Si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux." (Matt. 18.3-4)

    "Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux" (Matt 5.3)

    Les deux évagélistes nous parlent d’une certaine simplicité et humilité pour accéder au "Royaume des cieux" ou de "Dieu", n’est-ce pas là une des clés de l’Evangile de Jean ?

    "On ne voit bien qu’avec le coeur... l’essentiel est invisible pour les yeux" nous disait Saint-Exupéry à travers son "Petit Prince". Tout comme la dualité "onde" / "particule" nous pouvons dire qu’il existe chez l’Homme une dualité "esprit" / "coeur", deux manières différentes (et souvent opposées) d’appréhender les choses. Donc nous pouvons voir et concevoir avec notre raison ou avec notre émotion. Assurément les auteurs ne raisonnaient pas comme nous, et particulièrement Jean, le seul à avoir connu le Christ de son vivant, et contrairement à ce qui a été dit, écrivait certainement plus de manière "émotionnelle" que "journalistique". Notons avec quelle sensibilité il nous présente la genèse de son évangile... A mon sens, il ne faut voir dans les textes de Jean, tout comme dans l’ancien testament ni de récits historiques, ni de récits politiques.

    Si des évènements aussi invraissemblables que la résurrection de Lazare, et celle du Christ lui-même, citées dans l’Evangile de Jean ne seront jamais considérées comme des réalités historiques par les sceptiques, il n’en reste pas moins qu’aucun ne peut nier qu’elles demeurent toutefois des réalités spirituelles. Voici deux millénaires que nous en débattons, et pourquoi ? Si les effets n’avaient pas de réelles causes le débat aurait été clot depuis bien longtemps.

     

     

    La métaphore du cylindre est l’exemple d’un objet ayant des propriétés apparemment inconciliables. Il serait à première vue incongru d’affirmer qu’un objet a à la fois les propriétés d’un cercle et d’un rectangle : sur un plan, un objet est soit un cercle, soit un rectangle.

    Mais si l’on considère un cylindre : une projection dans l’axe du cylindre donne un cercle, et une projection perpendiculairement à cet axe donne un rectangle.

    On a donc bien un objet ayant les propriétés de l’un et de l’autre (mais il n’est ni l’un, ni l’autre). « Onde » et « particule » sont des manières de voir les choses et non pas les choses en elles même...


    • Emile Mourey Emile Mourey 22 avril 2008 09:12

      @ Thomas

      Votre commentaire est intéressant et n’est pas contradictoire avec ce que j’écris. Je ne suis pas un auteur qui dénigre les textes évangéliques ni la pensée des Anciens. Ce que je voudrais justement est que mes contemporains sortent un peu de leur égo et qu’ils essaient de se mettre dans leur pensée.


  • Olivier V. 4 mars 2013 07:23

    Bonjour Emile,

    Je voudrais vous poser une question : avez-vous étudié les analyses des philologues qui contestaient et contestent l’hypothèse de feu Claude Tresmontant ? C’est important parce que vous fondez TOUT votre argumentaire sur une HYPOTHESE, qui reste une hypothèse parmi d’autres, et qui est de plus en plus mise à mal d’ailleurs depuis une dizaine d’années pour des questions de datation en particulier.
    Le fameux papyrus 7Q5 de Qumran par exemple, daté sans problème d’avant 50 AD, s’il représente réellement le plus ancien document néotestamentaire (Marc 6, 52-53) qui nous soit parvenu jusqu’à présent, est bien rédigé en grec et pas en hébreu. J’insiste sur ce point car l’argument essentiel de Tresmontant est principalement fondé sur la chronologie de la rédaction des évangiles. Pour résumer : Tresmontant suppose qu’ils furent rédigés à partir de sortes de « notes de cours » datant du vivant terrestre de Jésus et organisés en ensembles cohérents entre 35 et 60 et non pas entre 65 et 120 comme l’indiquent les études les plus sérieuses. Mais 7Q5 peut être un fragment de Marc 6 grec antérieur à 50...
    Par ailleurs les preuves soi-disant linguistiques de Tresmontant ne sont en fait qu’une accumulation d’arguments du type : « parking est un mot anglais puisqu’il finit en -ing », qui ne sont pas pertinents scientifiquement, vous le comprenez bien. 
    Je vous donne ici une URL où vous trouverez sur ce sujet les explications (en l’occurrence : extrêmement compétentes) de juifs messianiques locuteurs d’hébreu comme vous et moi de français : http://www.vigi-sectes.org/theologie/yechoua.html.
    Enfin, cher Emile, vous fondez vos analyses sur un texte en français que Tresmontant a déduit d’une reconstitution d’un soi-disant texte original en hébreu à partir du grec koinè. Franchement, Emile, c’est tout à fait comme prétendre analyser les mots français employés par Molière à partir d’une restitution de Tartuffe en un texte coréen hypothétique et « perdu » au moyen d’une traduction d’un texte swahili conservé...
    Ce qui motive votre démarche est cette belle propension naturelle de l’homme à la vérité, ce qui en détruit la validité est cette vilaine propension de l’homme à l’abus.
    Bien cordialement. 

    • Emile Mourey Emile Mourey 4 mars 2013 14:14

      @ Olivier V.

      Le fameux papyrus 7Q5 de Qumran par exemple, daté sans problème d’avant 50 AD... une tempête dans un verre d’eau.

      Je ne suis pas un disciple de M. Tresmontant et ne suis pas obligé de le suivre dans ses hypothèses de notes qu’on recueille pour écrire ensuite le texte ni dans les vôtres qui supposent que les dits textes ont été écrits beaucoup plus tard. Le simple bon sens interdit de telles suppositions, et surtout pas après la guerre de Jérusalem. Les textes évangéliques ont été rédigés pour être immédiatement diffusés dans une situation de conflit. Relisez Flavius Josèphe et vous comprendrez un peu mieux l’ambiance de l’époque.

      Tresmontant se trompe en mettant l’évangile de Jean après celui de Marc alors que c’est le contraire. Là encore, pas besoin de faire appel à un philologue. Simple question de bon sens. Si Jean ne signale pas la mort de Jean-Baptiste, c’est qu’il est encore vivant au moment où cet évangile est écrit. Si Marc évoque sa disparition, c’est qu’il a été écrit après l’évangile de Jean.

      Tresmontant a un mérite, c’est de connaître le grec et l’hébreu mieux que quiconque. La preuve, c’est que personne n’a osé le contredire de son vivant dans un débat argumenté.

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