vendredi 2 août 2013 - par C’est Nabum

L’art de la sieste

Une petite pause fort agréable.

Je viens de vivre l'une de ces merveilleuses parenthèses, qui au milieu de la journée, sur la digestion d'un repas méridien, vous conduise au pays des songes. Je me réveille d'humeur taquine, un nouveau départ s'offre à moi, un recommencement qui a effacé bien des fatigues. La coupure fut propice à bien des réflexions, des récits intérieurs et des oublis miraculeux. C'est d'un nouveau pied que je reprends le cours des choses …

Je me garderai bien d'évoquer ici la sieste graveleuse, la mésienne friponne qu'on espère garder dans le secret de l'alcôve. Si au bout des agitations mutuelles, des tendresses et des fatigues divines, on finit par sombrer, là aussi, dans un doux sommeil réparateur, les corps sont chargés d'odeurs musquées, de quelques perles de sueur issues des prouesses réalisées, des délicatesses consenties, des acrobaties expérimentées . Les draps sont défaits, le lit chamboulé et rien de ce qui se passe alors n'évoque la sieste gentillette dont je compte vous parler !

Non, restons seul pour cette sieste tranquille et avouable. Elle est un moment en suspension, un retour sur soi-même pour goûter un peu plus encore ce temps qui vous sépare de l'heure de se coucher vraiment. Chacun a sa manière personnelle de jouir de ce repos discret, de cet abandon sans contrepartie.

Il y a ceux qui se laissent surprendre ou qui nous le font croire. Juste après le café, posés benoîtement sur un fauteuil confortable, ils décrochent soudainement de la conversation. Leurs muscles se relâchent, leur souffle se fait plus puissant. Ils sont partis pour quelques minutes, vous ont laissé en plan sans la moindre gêne. On les regarde, on en sourit, on les envie de se soucier si peu des convenances ou des codes sociaux. Quand ils se réveillent, chacun fait semblant de rien, devenant ainsi complice de ce doux délice.

Il y a ceux qui s'allongent, sur un canapé, un sofa ou bien une pelouse. Ils ont besoin de l'horizontalité pour s'abandonner à leur tour au plaisir de la rupture avec le réel. Ils ferment les yeux, s'endorment bien vite. On les laisse tranquille, on évite de les déranger. Ils imposent le respect, ils ont coupé les ponts, osé le lâcher prise sans la moindre culpabilité.

Il y a les magiciens, les princes de l'illusion. Ils sont assis à leur bureau, elles sont devant le clavier de leur ordinateur. On les pense affairés, en phase de réflexion intense. Rien dans leur posture ne trahit l'échappée belle qu'ils s'offrent à la dérobée. Ils ont fermé les yeux, elles ont coupé le contact. Leur sieste est brève, elle n'en est pas moins profonde et réparatrice. Ils se remettent au travail, elles reprennent leurs occupations comme si rien ne s'était 'dissipé' le temps de quelques songes enchanteurs.

Il y a enfin ceux qui ont besoin d'aller jusqu'au bout du caprice. Ils ont besoin de fermer les volets, elles se réfugient dans leur chambre. Les uns s'allongent sur le lit quand les autres éprouvent le besoin d'aller jusqu'à se glisser dans les draps frais. Pour eux, point de compromission, pas de cachoterie, la sieste est pleine et entière, rupture franche et assumée, elle les conduira après un long tunnel vers un réveil un peu vaseux.

La sieste n'est pas l'apanage des vacances même si elle n'aime rien tant que les journées accablées de chaleur et de lumière. Elle se plait encore à meubler les jours de congé, à prolonger les repas trop arrosés, à préparer les veillées que l'on devine excessives. Elle aime se glisser à l'improviste dans le cours trop bien organisé d'une journée de travail. Elle symbolise pour certains le privilège de la retraite quand pour d'autres elle demeure à jamais l'affreuse obligation de l'enfance.

La sieste ne s'encombre pas des insomnies. Si le sommeil vient à vous fuir, elle se plait pourtant à prolonger ce moment en retrait. Vous êtes à l'écoute des murmures de la maison, vous devinez les mouvements de ceux qui sont restés debout. Vous n'êtes pas pressés de les rejoindre, vous avez droit à ce petit plaisir des pensées intérieures. Vous allez sans doute finir par vous assoupir, vous perdre à votre vigilance, vous glisser dans un sommeil minuscule.

La sieste ne se partage pas ou bien elle devient tout autre chose. Elle se plait à l'exercice solitaire en tout bien tout honneur. D'ailleurs personne n'est jamais dupe quand deux personnes prétendent aller se reposer un peu. Il en faut de l'aplomb pour affirmer cela en compagnie, une bonne dose de rouerie pour croire que nul ne s'imaginera autre chose. Mais la sieste se moque bien du qu'en dira-t-on et de toutes les convenances. Elle peut surprendre n'importe qui et se moque de ce qu'on pense d'elle !

La sieste peut dormir sur ses deux oreilles, elle n'est pas prête de disparaître de nos mœurs. Il parait même qu'elle est de plus en plus conseillée dans le monde de l'entreprise, qu'il est des pays où elle est organisée sur le lieu du travail. Elle décuple la productivité, elle adoucit les relations sociales, elle apaise les fatigues, redonne envie et dynamise. J'espère qu'elle m'aura permis de trouver l'inspiration sinon il me faudra retourner faire un petit somme ...

Hamaquement vôtre.



27 réactions


  • Gabriel Gabriel 2 août 2013 10:48

    Nabum, vous êtes un provocateur. Sortir un article sur ce merveilleux et universel sujet qui fait l’unanimité dans tous les pays et sous tous les climats qu’est la sieste, pendant que nous œuvrons au redressement de ce pays traumatisé par le travailler plus pour que nos dirigeants, banquiers et politiques gagnent plus avouez que, vous cherchez à démotiver le travailleur. J’en baille de colère et en ferme les yeux de frustration. Aussi, en signe de protestation, croisant les bras sur mon bureau et en y posant délicatement la tête dessus, j’appelle Morphée à la rescousse en signe de totale solidarité.

    Somnambuliquement vôtre…


    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 11:12

      Gabriel


      Je comprends parfaitement votre courroux.

      Nos dirigeants dorment sur leurs deux oreilles et un tapis de profits et de richesses accumulés rien que pour eux et nous voyons nos poches se vider et notre train de vie dérailler. Alors, nous ne dormons plus que d’un œil et nous sommes contraints de céder parfois à de bien honteuses siestes tandis que le pédalo coule ...

  • Baarek Baarek 2 août 2013 12:20

    J’ai du sortir de ma torpeur pour lire... Votre article. C’est un comble !

    J’ai bien saisi les différentes images et métaphores de votre papier, suis-je trop faignant ?


  • Vipère Vipère 2 août 2013 12:49

    Bonjour à tous et à Nabum


    Vous dites, « c’est d’un nouveau pied que je reprends le cours des choses » !

    Peut-on vous demander, comment est chaussé le pied qui sort d’une sieste bienfaisante ?

    - savate en cuir de serpent, babouches marocaines, sabot de bois made in Lorraine, godillots à bouts renforcés ?

    De ceux qui s’allongent en décubitus en dehors du cabinet de leur docteur, nous veillerons à ne pas troubler leur repos, à fortiori, si la dite sieste est un prétexte à des exercices fripons ! smiley

  • Vipère Vipère 2 août 2013 12:53

    Et oserai-je évoquer un pied chaussé de tongs ou d’espadrilles ? smiley


  • Vipère Vipère 2 août 2013 13:09

    Si, je suis revenue « au pied » un article également évoqué il y a peu de jours par l’auteur Fabienn, c’est en raison d’une confessions de Mr Tall de Belgique...


    Il porterait des tongs, mais pas de ces tongs ordinaires, que l’on trouve chez le marchand de chaussures, au coin de la rue, mais « des tongs décapotables Dior » et le nec plus ultra, "elles seraient connectées directement sur le cours de la bourse à Wall street !

    Plus d’un hésiterait à lancer une chaussure pareille sur un adversaire, dans un accès une colère, aussi légitime soit -elle !

  • Vipère Vipère 2 août 2013 13:10

    De Belgique.... 


    De Marseille, plutôt, non ? smiley

  • Vipère Vipère 2 août 2013 13:36

    Mon cher Tall



    Vous ici, je vous croyais à la sieste ! 

    Vous avez mis en faillite la dernière fabrique d’espadrilles qui existe en France.

     Qui oserait encore porter des espadrilles, sous peine de voir son portrait à l’envers" ?

    Au fond, grâce à vous les espadrilles vont disparaître du paysage ! quel soulagement. Merci smiley







    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 13:38

      Vipère


      Éclairez-moi, j’aimerais comprendre !


    • Gabriel Gabriel 2 août 2013 14:06

      Les espadrilles vont disparaitre ? Ben alors on pourra vendre des tongs aux belges....


    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 14:06

      Tall


      Voilà un sujet réjouissant qui fera son chemin.

      Votre manière d’avancer pas à pas vos arguments et votre rejet peut créer du plaisir mais aussi de l’irritation. C’est bien le but d’un billet qui va au fond des choses essentielles.

      Pour ma part, je ne suis adepte ni de l’un ni de l’autre.
      L’espadrille est trop vite en lambeaux quand la tong m’a toujours semblé appartenir au monde factice du plastique et du toc.
      J’aime la sandale que vous snobez avec délectation. Pas assez tendance, pas assez moderne. Tant pis, elle permet de véritablement marché même si parfois un caillou vient s’immiscer ...

      Bon, je ne vais pas prendre votre place au pied levé et faire à mon tour un billet. Je passe la main et vous salue bien.

    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 14:07

      Gabriel


      Attention, les flammands ne vont que sur un pied ! 

    • Vipère Vipère 2 août 2013 15:38

       Ni tong, ni espadrille, le ciel soit loué ! smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 15:45

      Vipère


      Et pour que mes fidèles puissent faciler me baiser les pieds, c’est le pied nu que je vais la plupart du temps. J’espère que vous en êtes contente ! 



    • Vipère Vipère 2 août 2013 16:10

      Nabum

      Savez-vous comment était puni l’orgueil démesuré d’un dénommé Tantale ?

      Dans la mythologie grecque, Tantale, roi de Lydie se considérait comme l’égal des DIEUX.

      On racontait qu’il avait dérobé du nectar divin aux Dieux afin de le servir aux simples mortels.

      Tantale fut puni par Zeus !

      Les prosternations de Tantale pour implorer le pardon des Dieux furent vaines et il fût condamné à rester dans l’eau douce jusqu’au cou dans le royaume des ténèbres, fruits et eau étaient à profusion. Mais jamais, il ne pouvait les atteindre car à chaque fois qu’il s’approchait des fruits et de la boisson, ils se dérobaient. Tenaillé par la faim et la soif, sans jamais en mourir, tel était son supplice, une éternelle souffrance.


    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 18:39

      Vipère


      Pour l’eau douce, j’y suis souvent jusqu’au coup Quant à Zus, nous n’avons pas été présenté ...

      Merci de me rappeler que je ne suis qu’un mortel moi qui aspire à devenir demi-dieu
      Il faut toujours se fixer des étapes intermédiaires ...

  • auguste auguste 2 août 2013 16:48

    @ C’est Nabum

    Comment dériver de la sieste à la godasse ?
    Mystère...

    Quoi qu’il en soit, j’ai une recette miraculeuse :
    Je chausse mes « rangers », jusqu’à la torture.

    Et ça fait un bien fou quand je les enlève !

    J’espère que vous allez publier ici votre article sur la canicule, l’autre site ne me supporte pas.

    Sur ce, dormez sur vos deux oreilles, c’est un exercice délicat à réaliser sans le concours de feu
    Picasso.

    Fournaisement vôtre.


    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 18:54

      Auguste


      Quand le pied est à l’aise l’envie de sieste n’est mais bien loin ...

      Pour le billet caniculaire, si les petits cochons ne le mangent pas, il peut apparâitre ici demain mais jamais rien n’est certain 

      Pour être certain de le trouver allez chez moi :
      chroniques-ovales.com

      1 600 billets et bien des fables vous attendent.

    • ZEN ZEN 2 août 2013 18:57

      Bonjour Nabum
      Je considère ton billet comme d’utilité publique
      Sans rire !
      Eté comme hiver je m’adonne religieusement à ce « sommeil minuscule », mais fondamental, même pour 5 minutes.
      Le transat Lafuma est mon lieu de culte.
      Avec quelques techniques zen très simples, je lâche prise et...je repars comme neuf.
      Zènement vôtre.


    • ZEN ZEN 2 août 2013 19:05

      Voilà l’objet du dé-lit

      Pub non rétribuée...

    • ZEN ZEN 2 août 2013 19:11

      ça marche mieux ici


    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 20:42

      Zen


      VOus en avez bien de la chance de vous endormir à chauqe fois.

      Moi, ce n’est que rarement le cas, ce qui ne m’empêche pas d’essayer à chaque fois.

      Mais dans ma tête, il y a toujours un billet qui s’écrit et ceux-là seulement sontles plus beaux !

    • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2013 20:43

      Relax ZEN


      Parfait ! 

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