vendredi 15 février 2019 - par C’est Nabum

La fontaine aux papillons

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Puissiez-vous la découvrir vous aussi.

Il existe un lieu unique et merveilleux, préservé de la folie destructrice des humains, qui possède un charme fou et un pouvoir plus extraordinaire encore. En cette journée de la Saint Valentin, devenue une course effrénée à la consommation, je vous invite à simplement prendre la main de l’être aimé(e) et de partir à sa recherche … Il ne vous en coûtera rien ce qui ne vous empêchera nullement d’être comblé !

Il était une fois une birette, une vieille femme vivant dans une masure. Elle avait passé son existence à soulager les peines et les maux, les chagrins et les souffrances. Elle était à la fois herboriste, magicienne, faiseuse d’anges, sorcière ou exorciste selon les cas. Puis la vie s’était retirée de la malheureuse sans que quinconque ne s’en soucie.

Sa maison devint son tombeau, car nul jamais ne songea à s’enquérir de sa disparition. Le monde avait évolué, les vieilles croyances s’étaient dissoutes dans une modernité qui se targuait de ne croire qu’au tangible, au vérifiable, à la science. Irène et sa demeure disparurent à jamais des consciences. La nature seule lui dressa un mausolée, un palais de ronces, d’herbes folles, de lierres, de roses sauvages et d'acacias.

Au cœur de cette jungle inextricable, miraculeusement préservée, une fontaine dans laquelle la dame avait toujours tiré son eau. Magie ou bien mystère, la luxuriante végétation avait renoncé à envahir ses abords : un tapis épais de mousses moelleuses entourait la petite mare. Mais plus extraordinaire encore, c’était devenu le refuge de tous les papillons de la création.

Alors que sous l’action des pesticides, nos petits amis ailés, ces merveilles de couleur et de grâce, avaient disparu de la région, en cet endroit, ils étaient si nombreux qu’ils constituaient un nuage multicolore en perpétuel mouvement. Ce spectacle eut enchanté les poètes et les rêveurs s’ils avaient pu accéder à cet incroyable mausolée.

Le temps passa longtemps, l’endroit se perdit à la fois dans la végétation et les mémoires des humains. À l’écart des routes, du village, dans une zone humide, personne ne s’aventurait dans le secteur jusqu’au jour où des amoureux, à la recherche d’une cachette pour dissimuler au monde leur passion fulgurante, s’approchèrent de l’endroit.

Alors qu’ils s’embrassaient tendrement devant un mur de ronces, ils virent la végétation s’écarter, former à leur intention un petit tunnel dans lequel ils s'engouffrèrent. Ils virent tout d’abord la masure ou plus exactement quelques pierres encore debout dans un inextricable désordre naturel. Sur la carcasse d’un fauteuil, un squelette qui étrangement n’avait rien de macabre. Un sourire semblait illuminer ce crâne décharné.

Ni l’un ni l’autre n’éprouvèrent un frisson ou même une pensée négative. La femme salua le cadavre, s’empressa de déposer des fleurs à ses pieds. Son compagnon décida de ceindre le fauteuil sur lequel reposait le squelette de grosses pierres qu’il déposa en un cercle respectueux. Irène avait enfin un tombeau digne d’elle.

C’est à cet instant, emprunt d’une émotion intense que les deux amants se retournèrent et virent la fontaine et son nuage de papillons. C’était magnifique, troublant, ils s’approchèrent sans que les gracieux lépidoptères ne se dispersent. La mousse recueillit leur abandon, ils s’allongèrent, se dévêtirent et s’aimèrent en un ballet somptueux, accompagnés du vol des merveilleux pollinisateurs.

La femme qui avait perdu le chemin de la jouissance oublia les tourments qui peuplaient son passé. Elle effaça dans l’instant les images d’un amour qu’elle n’avait pas désiré, du vol de son innocence la privant si longtemps de l’abandon absolu. Ce dont elle avait été privée par la force, la grâce et la passion lui octroyait enfin l’abandon le plus absolu. Sa petite mort semblait honorer celle de la birette abandonnée.

Tous deux ne dirent jamais rien de leur secret. C’est ainsi que dès qu’ils en avaient l’occasion, ils se rendaient à la fontaine aux papillons s’enivrer de frissons et d’amour. Ils ne manquaient jamais auparavant de rendre visite à celle qui pour eux était devenue une bienveillante fée. Ils lui racontaient une histoire, lui accordaient un long moment avant que d’aller l’honorer par le plus délicieux des menuets.

La fontaine des papillons existe toujours. Elle ne se dévoile qu’à ceux qui savent regarder avec le cœur. Laissez-vous guider par la passion, vous aurez certainement le bonheur incomparable de vous y perdre. Mais n’oubliez jamais d’honorer la maîtresse des lieux. Accordez-lui quelques instants avant que de vous aimer. Les amoureux ne sont jamais seuls au monde, ils ne doivent jamais l’oublier …

Mystérieusement leur.

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10 réactions


  • exocet exocet 15 février 2019 19:51

    Bonjour, Cenabum, excellent...

    « Les bons contes font les bons amis »... smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 15 février 2019 20:42

      @exocet

      Je fais de mon mieux même si ici, les ennemis aiment venir cracher sur mes textes
      C’est assez curieux d’ailleurs

      Merci du fond du cœur de faire autrement


    • François Vesin François Vesin 17 février 2019 10:08

      @C’est Nabum
      « Je fais de mon mieux même si ici, les ennemis
      aiment venir cracher sur mes textes
        »

      Avez-vous remarqué qu’ils se raréfient ?
      Contre l’authenticité généreuse et le talent pour la servir
      les crachats finissent par obstruer les gorges les plus rappeuses !
      Il en est de vous Nabum comme il en est des Gilets Jaunes
      Il ne se trouve pas « d’ennemis » à votre mesure parce qu’à la fin
      la vérité n’est pas aliénable.


    • C'est Nabum C’est Nabum 17 février 2019 10:59

      @François Vesin

      C’est vrai même s’il y a toujours danger à le prétendre

      Merci


  • monde indien monde indien 15 février 2019 20:27

    Merci pour cette magnifique histoire ! Merci ! 
    mondeindien.centerblog.net/


  • juluch juluch 15 février 2019 21:59

    Une belle histoire !!!  smiley


  • Gabriel Gabriel 16 février 2019 07:18

    Irène émule de Merlin dort sous les couleurs florales des printemps successifs, chaque année des anges prennent la forme de papillon pour lui rendre hommage. La panthéiste cultive ses herbes guérisseuses dans un au delà meilleur.

    Belle histoire & très belles photos Nabum.


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