vendredi 1er juin 2018 - par C’est Nabum

Le silence des quais

Plus bas, coule une rivière.

Est-ce le dernier refuge de la jeunesse en mal de lieux de rassemblement ? Est-ce encore pour la quiétude d’une Loire majestueuse qui s’offre à leur admiration ? Est-ce plus prosaïquement pour y déverser les reliefs de leurs agapes ? Je ne sais … Ce qui est certain, c’est le succès grandissant de nos quais de Loire entre les deux ponts, de préférence, là où se concentre toute l’activité de loisir, que se retrouvent les noctambules de la cannette et du djembé.

Qu’ils aiment ainsi à se distraire n’a rien de bien choquant. Plus jeunes, nous ne faisions pas autrement, à la différence notable que nous nous réfugiions alors dans quelque coin secret, loin de la ville et des adultes, plus sourcilleux semble-t-il que ceux d’aujourd’hui. Il me faut à la vérité de reconnaître que certaines grandes personnes y trouvent à redire, non pas qu’elles dressent un sourcil inquisiteur mais plutôt qu’elles se bouchent des oreilles submergées de bruit.

Car tel est là le fond du problème. La réunion nocturne fait grand bruit et perturbe le sommeil des riverains, les plus exposés à la nouvelle passion Loire, celle qui voit le pierré envahi au moindre rayon de soleil la journée et plus encore le soir quand la nuit se fait câline. Mais les jeunes ne sont pas les seuls à agir de la sorte et à courroucer un tenancier de buvette, les gens bien installés dans la vie les imitent pareillement, investissant les guinguettes que la ville a installées dans le même secteur.

Mais là, ce n’est pas pareil, les consommateurs y sont forcément plus responsables car sous la houlette de professionnels sérieux et attentifs aux nuisances. C’est du moins la version de notre grand commentateur de la chose locale. Il est vrai que les taverniers en question ont un cahier des charges et des obligations qu’ils respectent à la lettre, nous n’en doutons pas une seule seconde. Les décibels rentrent dans les clous et les mégots ne filent pas dans l’eau.

La vertu de l’exemple pousse les plus jeunes à faire de même et pour notre joyeux commerçant, il faudrait sans doute que la police les contraigne à acheter leurs bières chez les vendeurs patentés. On comprend mieux le point de vue du personnage, davantage soucieux de son fond de commerce que de la tranquillité urbaine.

Au-delà de cette polémique plaisante, le phénomène mérite en effet une gestion sereine de ce mouvement de masse en Orléans. Une présence débonnaire de la police, à pied sur les pavés, serait sans doute de nature à calmer les ardeurs bruyantes des uns et des autres après un horaire décent. Cette exigence vaudrait alors pour tous, les autonomes comme les consommateurs dûment acceptés.

Car voyez-vous, interdire la consommation d’alcool aux uns tandis que les autres peuvent boire à volonté, sous prétexte qu’ils sont installés dans des guinguettes et buvettes dressées pour ce seul but, serait du plus parfait ridicule. Le deux poids deux mesures fonctionnerait alors à plein dans la cité ligérienne. Si le choix d’animer les quais n’est pas critiquable, il convient d’intégrer les conséquences de cette politique sans exclusive économique.

L’intervention de notre joyeux drille des virées nocturnes méritait donc quelques nuances. Les jeunes gens en bande qui se réunissent sur les quais ne sont pas plus irresponsables que les bourgeois installés sur les terrasses des guinguettes. Ils agissent autrement, dans l’esprit de leur âge et le refus sans doute, des tarifs dissuasifs pour eux. S’ils font tapage, il suffit de le leur dire calmement sans nécessairement une escouade policière en tenue de campagne.

Le temps est venu des belles soirées en bord de Loire. Deux mondes différents s’y retrouvent. À chacun d’agir pour que cela se passe dans la bonne intelligence et dans le respect de tous et surtout des riverains dont la patience sera mise à rude épreuve cinq mois durant. Oublions les acrimonies de celui qui jette de l’huile sur le feu, c’est sans doute faute de vinaigre qu’il agit ainsi ! Quant à moi, je dépose un peu d’encre, marinier à pied, je ne peux faire autrement.

Festivement vôtre.

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