mercredi 1er août 2012 - par C’est Nabum

Qu’on cesse de me jeter la première bière !

La cannette abandonnée…

Une histoire dure à avaler ...

Il était une fois une petite cannette qui vivait heureuse en compagnie des siens. Blottie bien tranquillement dans son pack, elle coulait des jours heureux dans le dépôt d'une grande brasserie hollandaise. Elle avait mérité toutes les attentions d'une industrie plus soucieuse de la promotion de son produit que de sa fabrication. Elle savait qu'elle allait avoir une vie rapide au service d'une belle idée de la fête. Elle se trompait !

Bien vite, elle fut transbahutée à travers l'Europe de hangars en hangars, profitant du va et vient incessant de gros semi-remorques qui sillonnent nos routes pour porter la bonne parole d'un commerce en mouvement. Elle finit son périple dans un rayon d'une modeste épicerie de quartier. Tout le monde ne peut prétendre aux rayons spécialisés de notre hyper-marché, ni même, honneur suprême, à une tête de gondole. Pourtant, elle allait se rattraper par la suite !

Elle avait le privilège d'appartenir à une grande famille. Pas moins de vingt-trois autres petites sœurs partageaient son fragile emballage de carton, avec poignée pour permettre un déplacement final lors d'une bacchanale réussie. Elle se doutait que son contenu allait être avalé sans ménagement ni distinction. Il n'était pas promis au verre, c'est dans un gosier, directement à son goulot, que sa bière serait vraisemblablement consommée.

On l'avait prévenue. La mode faisait désormais d'elle et de ses pareilles, les reines de la fête extérieure et impromptue. Un groupe allait s'emparer d'elles, elles iraient aux abords d'un lieu festif, elles seraient bues à grande lampées, elle seraient avalées sans autre plaisir que celui de la recherche de l'ivresse. Et c'est ce qu'il finit par advenir !

Ils n'étaient pas très jeunes, il ne faut pas mettre tous les maux sur la seule jeunesse. Les travers sont équitablement partagés entre les générations. Il y avait des hommes et des femmes, nulle spécificité de genre dans ces comportements déviants. Ils étaient en bord de Loire, vous l'aviez deviné, sur les quais d'une grande ville, tout près du Centre stratégique des soirées festives.

Notre canette fut prise au hasard par une main virile. Elle passa vraiment bien peu de temps en cette compagnie. Elle fut vidée plus vite qu'il ne faut pour l'écrire et termina sa course, d'un jet superbe, dans le fleuve tout proche. Elle n'avait pas à se plaindre, elle aurait pu finir cendrier avant que de subir le même sort ou bien projectile contre les pavés de la berge.

Elle débuta alors un trajet incertain. Flottant entre deux eaux, le culot respirant à peine quelques gorgées d'air pur, elle se maintint ainsi à flot une bonne centaine de mètres. Elle se frotta délicatement aux bateaux à quai, se trouva prise au piège quelques minutes de chaines et de bouées avant que d'aller affronter le passage d'un pont.

Elle fut bousculée, chahutée par les flots tumultueux. Elle se chargea de quelques gouttes d'eau, elle flottait beaucoup moins bien, elle finit par couler quelques mètres plus loin. Elle termina son escapade sur un tapis de sable à quelque distance d'une berge en herbe. Elle allait finir là, oubliée des hommes sans espoir de ne jamais revoir la terre ferme.

Pourtant, les hommes ne l'oublièrent pas. Plus tard, bien plus tard, elle fut réveillée de son sommeil profond par des bruits alentours. Un autre groupe, sans doute des plus jeunes cette fois, jetaient tout ce qui leur passait sous la main dans la Loire. Une grosse pierre vint la briser en mille éclats. Ainsi se termina la vie de notre cannette.

Le temps passa encore. Elle gisait, éparpillée et sournoise. Elle finit par croiser le pied nu d'un enfant qui venait patauger dans l'onde claire. Elle se fit tesson tranchant et sans pitié. Une belle entaille, une plaie profonde qui vous saigne à plaisir. Le gamin hurla et dut être conduit bien vite aux urgences. Elle venait de se rappeler au souvenir de parents, qui, étrange raccourci de l'histoire, avaient participé à cette soirée bachique.

Depuis ce premier exploit, notre cannette attend encore son heure. Elle ne désespère pas de blesser encore, de déchirer une plante de pied, juvénile de préférence. Elle a tout son temps. Elle sait attendre, elle n'a plus que ça à faire. Tôt ou tard, elle aura une nouvelle victime. Elle est l'une des innombrables autres bouteilles en verre qui jonchent nos rivières. Les hommes les ont jetées, dans un geste de mépris suprême, elles leur rendront la monnaie de leur pièce, dans un jour ou bien dans dix ans !

De cette bien triste histoire, il ne faut retenir que la morale des cannettes. Si vous ne les recyclez pas, elles se rappelleront tôt ou tard à votre bon souvenir. Mais, comme elles n'ont pas de mémoire, il est fort probable que leur vengeance sournoise blesse un être innocent. On ne souille pas impunément l'onde pure, la fable en son temps vous le disait déjà, vous l'avez, depuis, malheureusement oublié.

Cannettement vôtre.



25 réactions


  • Bilou32 Bibi32 1er août 2012 10:41

    Heureusement, le verre cassé fini par s’émousser, au bout d’un certain temps. On peut ainsi retrouver des éclats de canettes polis par les flots sur les plages des rivières ou de la mer...
    Mais il faut du temps, beaucoup de temps, encore plus pour digérer une gazinière ou un vieux pneu. Les choses évoluent trop lentement, je me rappelle aveoir nettoyé les plages en activité scolaire, çà remonte à plus de 40 ans... et il faut toujours nettoyer les plages, plus souvent même ! C’est pas demain la veille que la conscience collective réalisera que notre planète doit être respectée, sinon... le tesson , ou bien pire.


  • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 11:14

    Bibi


    Un verre émoussé pour une canette de bière, c’est un verre sans mousse

    Le tesson n’est qu’une parabole pour nos comportements imbéciles.

    Plus ça va moins ça va et notre planète en a assez de cette espèce insupportable !

  • slipenfer 1er août 2012 11:52

    « On peut ainsi retrouver des éclats de canettes polis par les flots sur les plages »


  • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 11:55

    slipenfer


    Impolitesse des buveurs de bière n’a d’égale que le verre poli par les flots !

  • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 12:02

    edelweiss


    Nostalgie quand tu nous tient !

  • L'enfoiré L’enfoiré 1er août 2012 12:04

    Amusant comme texte. smiley J’aime.
    Inattendu aussi ici, ou ce n’est pas la bière qui fait fureur mais le vin.
    Anecdote pour anecdote.
    Dernièrement, je me trouvais dans une grande surface à la caisse.
    Devant moi, je ne le savais pas, mais je m’en doutais, de joyeux drilles.
    L’un d’entre eux dit :
    - Où est la consigne pour les cannettes ?
    - Il n’y a pas de consigne pour les cannettes de bière.
    - Mais, si dans d’autres magasins, on me rembourse les cannettes.
    Entendant cela, comme une autre caissière se rend compte que la caissière d’à côté est une jeune étudiante pendant le temps des vacances, intervient de manière assez... vive.
    - Mais Monsieur, tout le monde sait qu’on ne rembourse pas les cannettes de bières.
    - Alors, Madame, je viens plus ici. De toutes manières, attendez-vous à ce que je revienne dans moins de deux minutes pour vous poser la même question. Juste le temps de boire quelques unes encore remplies. smiley
     


    • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 12:08

       L’enfoiré


      L’abandon des consignes fut une hérésie.
      De jeunes gens ramasseraient ce que d’autres laissent sans vergogne pour quelques pièces.

      Au-lieu de quoi, tous font n’importe quoi ...

      Merci pour l’anecdote !

    • L'enfoiré L’enfoiré 1er août 2012 13:37

      Tout à fait, Nabum.
      C’est tellement facile de jeter les cannettes dans le fossé ou dans le jardin de quelqu’un d’autre.
      Une autre anecdote ?
      Je suivais deux jeunes de 15 ans.
      A un moment donné, une cannette leur « échappe » des mains.
      J’ai pris la cannette. Accéléré le pas.
      - Je crois que vous avez perdu cela.
      - Merci mais, c’était pour jeter.
      - J’ai bien compris, mais ce n’était pas l’endroit. @+
      J’ai continué ma route.


  • fcpgismo fcpgismo 1er août 2012 12:42

    Poétique ! bel article.Des morceaux de verre sur les pistes cyclable c’ est souvent la gamelle assurée.


  • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 12:54

     fcpgismo


    Merci même si j’ai commis grosse faute avec la confusion cannette - Canette !

    Les vélos aussi ont droit aux débris des buveurs du soir. Vite, le retour des consignes plutôt que les con-singes


    • Vipère Vipère 1er août 2012 21:27

      Bonsoir à tous

      La cannette est de retour ?

      Quid du Cancan ? smiley


    • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 21:33

      Vipère


      Jamais vous ne commettez d’erreur !
      pan dans le bac de l’infâme qui confond la petite canne et la canette à boire

      J’écris à la plume, la faute est pardonnable !

      Coin-coin

    • Vipère Vipère 1er août 2012 22:03

      Loin de moi, l’idée de corriger les fautes d’orthographe de qui que ce soit !

      Mais, la cannette (femelle du canard) a fait resurgir à ma mémoire, l’un de vos jolis textes sur la Loire ! smiley




    • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 22:21

      Vipère


      pardonnez-moi mais voilà un sujet où je suis particulièrement à cran. J’ai trop souffert des moqueries de ceux qui savent parce qu’ils ont une mémoire visuelle.

      L’orthographe m’a très longtemps condamnée au silence textuel, j’ose désormais mais parfois, la faute passe à travers les mails du filet. Quand je m’en aperçois, il est souvent trop tard.

      C’est le seul domaine où je ne maîtrise pas mes réactions. Je suis confus cher(e) vipère !

    • Leo Le Sage 1er août 2012 23:15

      @AUTEUR/Par C’est Nabum (xxx.xxx.xxx.108) 1er août 22:21
      Vous dites : "L’orthographe m’a très longtemps condamnée au silence textuel, j’ose désormais mais parfois, la faute passe à travers les mails du filet. Quand je m’en aperçois, il est souvent trop tard. C’est le seul domaine où je ne maîtrise pas mes réactions. Je suis confus cher(e) vipère !"

      Problème d’ortografe ?
      On écrit les mailLEs du filet.

      1/ Ce sont les faibles qui ne supportent pas les critiques...
      Vous n’êtes pas faible à ce que je perçois.
      Si vous devez donc être à ma place, vous ferez quoi ? Vous tirerez à vue ?
      Non ? Ben alors...

      Dans mon cas, non seulement les critiques ne me posent pas de problème mais je demande même à ce qu’on le fasse.
      Certains vont jusqu’à critiquer les mots que j’utilise et même la ponctuation.
      J’en suis heureux.
      Faites de même...

      2/ Un sage sait se faire fou quand il en a envie, mais lui il sait qu’il fait le fou.
      Je remarque que les critiques méchantes viennent plus de personnes qui n’ont rien à dire sur un article que sur une réelle volonté de contruire une discussion.
      Et certains rédacteurs qui au début me reprochaient mes critiques détaillées, n’ont plus osé par la suite.
      Ils se sont rendus compte qu’ils étaient ridicules pour la simple et bonne raison qu’on ne peut plaire à tout le monde.
      Mieux, je m’amuse à leur rappeler leur place directement ou non : « C’est chez vous, sachez que recevoir correctement votre hôte »
      A part quelques minables, tous répondent donc, comme l’adage qui enseigne « je reçois bien parce que je veux être un exemple »

      Conclusion
      Vous êtes rédacteur comme moi, montrez que vous êtes à la hauteur de votre article.
      Maîtrisez vous même si c’est difficile, au fil du temps vous comprendrez que la meilleure arme contre un adversaire c’est encore les mots de son adversaire.
      Ce n’est pas pour rien que je refuse qu’on supprime les insultes dont on m’affuble.
      L’ennui c’est qu’agoravox ne veut pas que ces insultes restent.

       
      Cordialement

      Leo Le Sage
      (Personne respectueuse de la différence et de la pluralité des idées)


    • alinea Alinea 1er août 2012 23:43

      cannette, souvent écrit canette :.. petite bouteille mince et longue pour la bière !
      Alors, qu’est-ce que vous nous gonflez avec vos problèmes d’orthographe !!!!
      La canette étant un canard jeune et femelle, d’accord.
      ma bible, c’est Alain Rey ! alors !


  • alinea Alinea 1er août 2012 13:01

    Il y a la canette mais aussi les bouteilles en plastique ! Elles feront un long voyage pour retrouver leur continent, quelque part dans le nord du Pacifique.


  • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 13:05

    Alinea


    C’est si simple ; il suffit de supprimer cette monstruosité de plastique.

    Les bouteilles en verre consigné et rien d’autre.

    Simple et créateur d’emploi.

  • ZEN ZEN 1er août 2012 13:41

    Comme cycliste et dégustateur (non buveur !) de bière, je fais attention à mes cannettes
    J’ai horreur des packs de Kro jeté au bord du chemin
    Manque de savoir boire...
    Recyclons le verre à l’allemande


  • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2012 16:08

    Actias


    Vous usez d’un terme qui me vient spontanément à la bouche quand je vois ce type de comportement, mais je ne me résous pas à l’écrire.

    Vous avez raison, la répression semble la seule solution même si je crois aussi en la capacité de chacun à stigmatiser les déviances insupportables de nos voisins. Car rien n’est pire que de les laisser faire en silence.

    Par contre, ils sont dangereux et il faut user d’ironie pour ne pas se mettre en péril.

    Merci pour le compliment et désolé pour ce can(n)ette fautif

  • Vipère Vipère 1er août 2012 22:56

    Nabum, j’espère que vous ne marchez sur les canards, voilà pour les maladroits  :

    Trois femmes meurent en même temps dans un azccident de voiture et se retrouvent au paradis ; Saint Pierre est là pour les accueillir

    - Bonjour Mesdames, ici au paradis nous avons une seule règle, il ne faut pas marcher sur les canards ! il les fait entrer au paradis. Il y a des canards partout, c’est pratiquement impossible de se déplacer sans marcher sur un canard.

    Les trois femmes font attention, mais la première marche sur un canard. Aussitôt St Pierre avec un homme très laid et dit :

    - Ta punition pour avoir marché sur un canard sera d’être attachée pour l’éternité à cet homme affreux !

    Les deux autres femmes ayant vu tout font très attention, mais la deuxième marche sur une canard. Et St Pierre arrive aussitôt avec un homme très laid et dit :

    - Ta punition pour avoir marché sur un canard sera d’être attachée à cet homme très laid pour l’éternité !

    La troisième tient le coup un mois et arrive St Pierre avec un homme très beau, musclé
     et bronzé et la femme dit à l’homme :

    - Je me demande bien, ce que vous avez fait pour être attaché à moi !

    et l’homme répond :

    - J’ai marché sur un canard !


  • 65beve 65beve 2 août 2012 00:16

    Les bouteilles de bière (car je ne sais que choisir entre canette et cannette) jetées dans la mer ne se cassent pas. Elles suivent le mouvement du flux et du reflux et sont transformées en poussière en peu de temps.
    La pollution par le verre est la moins dangereuse pour l’homme (à part l’anecdote racontée dans cet article).
    Ce qui va tous nous tuer, c’est tout ce plastique et tous ces médicaments qui filent dans la mer (et aussi tout ce nucléaire).
    Sinon, merci à l’auteur de nous rappeler que les gens sont sales et qu’ils jettent n’importe quoi n’importe où.

    cdlt.


  • C'est Nabum C’est Nabum 2 août 2012 06:56

    65beve


    Il faut écrire canette avec un seul N et une capsule (vissable ou non qui finira elle aussi n’importe où)

    Je reconnais que la pollution des bouteilles plastiques est épouvantable et qu’il faut exiger un retour systématique à l’emballage verre consigné. C’est une mesure indispensable et créatrice d’emplois.

    Il ne faut pas espérer en l’esprit civique des gens, il y aura toujours une frange de gros dégoûtants qui agissent désormais dans l’indifférence des autres et c’est là le problème majeur.

    Merci pour vos remerciements 

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