mercredi 16 décembre 2020 - par C’est Nabum

Du rififi chez le Père Noël

 Contraint à la retraite.

Notre sémillant vieillard à la barbe blanche et à la pelisse rouge a eu la désagréable surprise de voir débarquer dans sa retraite mondiale de préparation des paquets cadeaux, les plus dignes représentants du conseil scientifique du bon Freluquet. Ces doctes personnages ont exigé d’effectuer une batterie de tests sanitaires à l’égard de cet illustre bonhomme d’âge canonique, prétextant l’immense inquiétude de leur patron pour sa santé.

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Le Père Noël n’est pas un perdreau de l’année même s’il effectue depuis toujours ses livraisons par voie aérienne. Il s’offusqua, voulut mettre à la porte ces importuns, se déclara en pleine forme et disposé même à se laisser vacciner pour poursuivre sa mission universelle pour tous les gentils enfants. Rien n’y fit, les statistiques étaient formelles, il avait dépassé depuis trop longtemps la limite d’âge. Il entrait désormais dans la catégorie des personnes à hauts risques. Il convenait de le boucler sans ménagement et sans même son assentiment. Les vieillards étant relégués à un statut de mineur sous tutelle d’état.

Pire encore, le vénérable ancêtre était entouré de jeunes gens de petite taille qui risquaient de lui transmettre la maudite maladie. Les pauvres lutins eurent beau jurer la main sur le cœur qu’ils respectaient scrupuleusement les gestes barrières vis à vis de leur patron, les savants visiteurs déclarèrent tout net qu’ils se moquaient de telles sornettes, tout juste bonnes à apeurer la population. Agissant pour le bien de tous contre leur gré, ils n’avaient cure des récriminations et autres arguments de ceux qu’il fallait indisposer.

Le vieillard voulut monter sur ses grands chevaux, chasser de son domaine ces immondes visiteurs. Il se trouva cependant fort dépourvu puisque ses montures étaient des rennes et qu’il y avait belle lurette qu’il se contentait d’un traîneau. Se remettre en selle à son âge s’avérait rigoureusement impossible. C’est alors qu’il évoqua le sort de ses charmants ruminants, pensant toucher la sensibilité d’individus qui en étaient totalement dépourvus.

Le résultat fut radicalement contraire à ses espérances. Les sinistres inquisiteurs prétendirent que tout au contraire, des cervidés volants sont à classer dans la catégorie des Chiroptères dans laquelle on compte la chauve-souris. Les risques de contamination sont trop grands pour prendre le moindre risque. Et profitant de ce dernier argument, la délégation scientifique de Freluquet s’empara manu-militari du pauvre vieux pour le conduire sans égard pour ses services rendus dans un EHPAD gardé secret.

Les lutins furent dispersés, envoyés de par le monde pour annoncer la nouvelle. Il en était terminé des procédures archaïques de livraison. Profitant de la crise, il était grand temps de passer à une nouvelle échelle qui ne fut pas de corde. L’ère des cheminées était définitivement révolue. Les livraisons seraient désormais confiées en exclusivité aux grandes plateformes, si chères au commanditaire de cette opération.

Les ramoneurs furent invités à aller se brosser. Le hérisson ne ferait plus le gros dos, la suie ne serait désormais plus un obstacle aux dépôts des colis devant le sapin. Une noria de camionnettes ne respectant jamais les temps de pause et les droits du travail, allait se mettre en branle pour suppléer à la mise à la retraite de celui qui fut le bienfaiteur de l’enfance.

L’affaire ne s’ébruita pas. Le Père-Noël considéré comme sénile par des médecins qui depuis fort longtemps n’exerçaient leur art qu’autour de tables de palabres, fut mis à l’isolement dans une chambre stérile. Pendant ce temps, le bon Freluquet reçut de ventrues enveloppes en papier kraft dissimulant les marques de reconnaissance des sociétés qu’il avait ainsi généreusement avantagées.

Amazonement vôtre.



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