vendredi 28 mai 2010 - par Fergus

L’incroyable cynisme de Tsonga

Jo-Wilfried Tsonga n’est pas content des organisateurs du Tournoi de Roland-Garros et il l’a fait savoir à la presse lors de la conférence qui a suivi son 2e tour victorieux contre Josselin Ouanna. Ce faisant, l’ex-Manceau a fait preuve d’un rare cynisme...

Extrait de la conférence : « J’avais demandé à ne pas jouer dimanche, car j’avais fait ma préparation de façon à arriver lundi ou mardi en grosse forme. Je suis déçu. J’attendais un peu mieux de l’organisation. Si j’avais perdu dimanche parce que je n’étais pas bien, ça en aurait déçu plus d’un et ça aurait été un peu bête… À Wimbledon, on demande à Murray le jour et l’heure à laquelle il veut jouer, on ne lui impose pas. Pour Federer, dans son pays, c’est la même chose. Aux États-Unis, c’est la même chose pour leurs meilleurs joueurs. Lleyton (Hewitt) joue toujours sous le cagnard à l’Australian parce qu’il aime ça et pas les autres… On est en France, je suis N°1 français, j’aurais trouvé légitime qu’on m’écoute un peu, qu’on me laisse choisir quand commencer »

Ainsi, ce sont les joueurs vedettes et pas les organisateurs qui élaborent le tableau de participation en prenant soin de favoriser leurs nationaux. Rien de nouveau dans cette affirmation – qui vaut pour la plupart des grands sports professionnels – si ce n’est qu’il est peu fréquent qu’un joueur expose aussi directement, et sans la moindre pudeur, la manière dont est cuisinée la ratatouille à l’office.

Sans pudeur mais avec une mauvaise foi rare car ce même Tsonga, engagé le mardi au lieu du dimanche, et battu par son adversaire du 2e tour, se serait alors tourné vers ces mêmes organisateurs pour leur reprocher de n’avoir pu bénéficier d’un délai de récupération suffisant alors qu’untel à l’US Open ou tel autre à l’Open d’Australie disposent systématiquement de 48 heures de repos entre deux tours lors de la première semaine !

Le plus irritant dans les propos de Tsonga n’est toutefois pas là, mais dans sa nationalité brandie comme un étendard pour justifier un traitement de faveur à Roland-Garros. Qu’on se le dise : Tsonga est français et doit, à ce titre, pouvoir bénéficier de petits arrangements de confort de nature à favoriser son parcours vers le Graal sportif et le juteux chèque qui accompagne le trophée : 1,120 million d’euros !

Français, Tsonga ? Vraiment ? Oui, s’il est solidaire de nos concitoyens en grande détresse, réduits à recevoir des aides de l’État ou des collectivités pour simplement subsister et offrir un toit à leurs enfants. Oui, s’il participe à la construction et à l’entretien des infrastructures de transport, des lycées et collèges, des hôpitaux et des maternités, des équipements culturels et sportifs. Oui, s’il contribue à l’existence des corps indispensables au fonctionnement de la nation, à sa sécurité et à l’avenir de ses enfants : enseignants, personnel hospitalier, militaires, policiers, pompiers.

Non, s’il n’a pas renoncé à son statut d’exilé fiscal. Ce statut qu’il a choisi tout jeune, à peine entré sur le circuit professionnel alors que ses prédécesseurs en égoïsme avaient au moins eu la décence d’attendre deux ou trois ans avant de sauter le pas et de franchir la frontière suisse pour faire un bras d’honneur aux institutions françaises. Aux institutions, mais surtout à la solidarité avec tous ceux, modestes ou précaires, qui n’auront jamais les moyens – ni, par sens civique, l’envie pour la plupart – de soustraire le moindre centime à l’administration fiscale. Un bras d’honneur à tous ceux qui peuvent, à juste titre, percevoir cette attitude comme une gifle méprisante, une insupportable insulte à leur condition.

Tsonga doit pourtant beaucoup à son pays, depuis son arrivée à 13 ans au Pôle espoirs de Poitiers jusqu’à son intégration en 2002 au Centre national d’entraînement de Roland-Garros après trois années passées à l’INSEP. Des structures publiques gérées avec des deniers publics où le jeune sportif a pu bénéficier d’entraîneurs, de soigneurs et de médecins rémunérés eux aussi sur des fonds publics.

Jo-Wilfried Tsonga est, à n’en pas douter, un athlète accompli et un redoutable compétiteur. Mais il n’est, sur le plan humain, qu’un tout petit monsieur, un calculateur minable, indigne de cette nationalité qu’il revendique, de ce drapeau dans lequel il se drape avec un écœurant cynisme quand cela sert ses intérêts.
 


120 réactions


    • Christoff_M Christoff_M 29 mai 2010 00:52

      ça y est le coup du racisme quand on ne sait pas quoi dire !!

      si tu l’aimes bien n’empeche pas les autres de penser que ce n’est pas l’idéal le mec qui traine la patte et qui critique tout comme emblème pour un sport qui n’avait pas jusqu’à présent de traine savatte fonctionnaires comme n football....

      bon que ça ne t’empeche pas de partager ta barre ou les miettes plutot que vas te laisser Tsonga !! la naiveté est merveilleuse et permet d’aduler les nouveaux héros du buiseness qui s’éloigne ts les jours du sport...

      la lucidité de l’auteur gène ds un pays ou depuis Sarkozy, des experts en com veulent absolument nous faire revenir à l’époque black blanc beur sous Zidane, héros jusqu’à la défaite du mondial et le mauvais geste...

      Tsonga lui a déja les mauvais gestes et les ça me fait chier dès les premiers tours !!
      A chacun ses héros, je dirais que c’est plutot louche comme Monfort de se précipiter comme une pom pom girl en furie avec son micro dès qu’il voit des noirs à Roland, Chamoulleau n’est pas mieux !!!

      Par contre voir Beneteau, Mahu, Serrat et les autres français qui ne sont pas noirs ce serait peut etre trop demander à l’équipe des sports de France Television ???


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 08:56

      Bonjour, Chouchou69.

      Je me disais bien que cette accusation tomberait tôt ou tard. La voilà !

      Je vous invite à lire mes précédents articles ou les commentaires que j’ai déposés sur AgoraVox et je vous mets au défi d’y trouver le moindre couplet raciste. J’ajoute à cela que j’ai joué durant des années au football (j’étais gardien de but) dans une équipe composée presqu’exclusivement d’Antillais, faisant sans doute preuve ainsi d’un masochisme délirant.

      Plus sérieusement, Tsonga (qui est tout aussi blanc que noir) serait 100% blanc que j’aurais évidemment rédigé le même article. Et je vous pose une question : accusez-vous de mysoginie les gens qui critiquent l’attitude politique de Martine Aubry ou d’antisémitisme ceux qui condamnent l’attitude de Strauss-Kahn ?


    • Christoff_M Christoff_M 30 mai 2010 03:15

      Quand on fait des analyses froides on est raciste !!! u peu facile

      Ça ne vous gène pas que Gasquet, Bénetteau et autres soient sortis sans aucun commentaires et à peine une interview de vos « fans journalistes hytériques » qui trouvent tout fantastique dans la nonchalence et les « ça me fait chier » de Tsonga....

      Et nous envoyer N Monfort dans la tribune le soir à coté de la tribu Monfils, une trentaine de personnes invitées alors qu’un classé a droit normalement à quinze invitations....
      Mais cela c’est sans doute normal en France !!!

      Ne vous étonnez pas de revoir des mouvements d’extrême droite en France, avec des crétins de journalistes pseudo français qui mettent en avant le traitement de faveurs de certains, ne vous étonnez pas d’avoir des « petites têtes » aux comportements limites, à l’entrainement fantasque tellement on leur monte la tète de manière douteuse dans nos médias...

      Personne ne semble savoir sur F2, le service des sports qui idolâtre Tsonga et Monfils, que Chardy et Simon existent, il faut dire que Chamouleau l’archétype du glandeur de la télé française comme Holtz demande à sa direction ou il doit faire caca avant de parler...


  • Bleu Montréal 29 mai 2010 01:06

    C’est vraiment quelqu’un de minable et pitoyable ce joueur de tennis.

    Mais avec un tel esprit, il ne sera jamais un grand champion.


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 09:58

      Bonjour, Bleu Montréal.

      Il est vrai que l’attitude de Tsonga est, à bien des égards, décevante. Cela n’enlève rien à ses qualités athlétiques. Il garde donc ses chances de gagner de grandes épreuves. On souhaite seuement qu’il le fasse en amendant son comportement pour revenir à plus d’humilité et, au risque de me répéter, à plus de solidarité avec ceux qu’il prétend ses concitoyens.


  • georges 29 mai 2010 03:58

    l ISF , seul impot qui rapporte moins que ce qu il coute , mais en France on aime tellement les usines a gaz pour sauver les apparences . si on le supprimait nombre de sportifs et autres reviendraient on le sait tous mais avec ces cons gauchos d une betise crasse que compte notre pays c est politiquement marcher sur des oeufs .
    alors vous voudriez que les sportifs francais soient les gogos du sport mondial , des etres uniques , , les seuls a rester sagement dans un pays qui leur suce leur pognon avec un impot special pour eux comme pour dire « vous etes riche donc coupable » . le rapport de la france avec l argent rapelle exactement celui du sexe dans l amerique puritaine d une bonne partie du siècle dernier


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 10:05

      Bonjour, Georges.

      Je suis plutôt d’accord pour que l’on supprime l’ISF à condition que l’on augmente le seuil d’imposition des plus hautes tranches de l’impôt sur le revenu. Même à droite, de très nombreuses personnalités s’expriment dans ce sens. Cela dit, je ne crois pas que cela soit suffisant pour faire revenir les tennismen qui, au contraire des autres exilés fiscaux, ne sont pas obligés, du fait de leurs nombreux déplacements planétaires, de résider physiquement 6 mois sur le territoire hélvétique.

      D’autre part, est-il nécessaire de critiquer un adversaire politique, fut-il « gaucho », en le traitant de « con » ?


  • zadig 29 mai 2010 06:47

    Bonjour, Fergus.

    Merci pour cet article pédagogique.

    Malheureusement le comportement du joueur en question se généralise.
    C’est un peu une des conséquences du système dont nous sommes
    prisonniers.
    Regardons autour de nous et nous verrons :
    .Des hommes et des femmes simples et respectueux.
    .Des êtres cupides (élite ou pas)

    Par pudeur, je ne cherche pas à évaluer la proportion.

    Cordiales salutations.


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 10:12

      Bonjour, Zadig.

      Oui, ce type de comportement se multiplie car il est à l’image des discours dominants dans les médias, les grandes écoles et chez la plupart des caciques de la droite politique : en résumé chacun pour soi et tant pis pour les autres, les faibles, les diminués physiquement ou intellectuellement, les malchanceux, les accidentés de la vie. 

      Pas sûr que l’on bâtisse une société solidaire avec de telles perspectives pour nos jeunes. Proud’hon et Fourier doivent se retourner dans leurs tombes ! 


  • zadig 29 mai 2010 07:13


    Fergus,

    A part une minorité l’homme est cupide et non raisonnable.
    Des gardes fous doivent exister.

    Parmi ces gardes fous :
    .La loi (difficiles à doser)
    .Et surtout l’attitude de chacun :
     .Mépris affiché
     .« boycott »

    Mais comment faire avec toutes ces élites encensant ou profitant du système.

    Ps. Rude tache pour saint Michel.


  • jack mandon jack mandon 29 mai 2010 07:19

    Fergus

    Les êtres humains anonymes ou célèbres sont des espèces de prisme qui décomposent la lumière solaire.
    Chacun de nous selon son caractère et sa recherche personnelle, projette sur autrui ce qu’il aime ou dénonce en fonction de l’interrogation qu’il opère sur lui même.
    Cependant, dans tous les cas, c’est de nous même dont il s’agit.

    Merci de me donner l’occasion de réfléchir, une fois de plus, à cet aspect essentiel de la psyché.


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 10:17

      Merci pour cet intéressant point de vue, Peachy.

      Je crois qu’il résume bien la réalité psychologique qui nous anime dans ce type de réflexion. La question qui se pose : la projection est-elle le reflet de ce que nous sommes ou de ce que nous voudrions être ? A votre tour, vous me donnez l’occasion d’y réfléchir pour moi-même, et c’est un excellent exercice !

      Bonne journée.


    • jack mandon jack mandon 29 mai 2010 12:02

      Fergus,

      La projection nous est plus que familière, en fait elle est permanente car elle est le produit de notre émotivité.
      La projection peut être lumineuse nais aussi négative.
      Par exemple, dans le premier cas, elle prend la forme du fanatisme qu’un adolescent peut avoir pour un champion sportif, un footballeur par exemple au point que celui-ci occupe une grande partie de l’espace psychique de l’ado. La solution serait qu’après la modélisation naturelle et salutaire, l’ado se lance dans le foot pour devenir lui même un footballeur, modeste peut être mais lui même.
      Le problème le plus fréquent est que le champion constitue une ombre gigantesque dans l’esprit de l’ado. qui trouve un moyen de défoulement dans la violence pour oublier sa frustration d’admirateur impuissant.
      C’est le résultat d’une projection positive ou lumineuse qui souvent dégénère.
      La projection négative consiste a souligner les défauts du voisin qui au fond nous sont familiers mais refoulés parce que refusés. C’est plus facile de les combattre chez l’autre.
      C’est l’histoire de la poutre et de la paille.
      Au fond Fergus nous souffrons tous de cette critique systématique car elle s’accompagne d’une réelle fraternité, d’où l’ambivalence. Les hommes sont en mal d’amitié.


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 12:48

      @ Peachy.

      Bien que non spécialiste, tout cela me semble fort bien vu. Et la recherche d’amitié, souvent inconsciente, est bien réelle et, non aboutie, source elle-même de frustration. Toutefois le mot « amitié » me semble fort pour les relations humaines les plus courantes ; peut-être pourrions nous parler plus généralement d’empathie ?


  • zadig 29 mai 2010 07:28


    Fergus,

    Une fiction :
    Un avocat « talentueux » dans le passé était spécialisé dans l« escort suisse ».
     (pour les riches contribuables)
    Cet avocat depuis est devenu le président d’un pays limitrophes de la Suisse.

    D’ailleurs les journaux suisses évoquent à mots couverts les dossiers
    détenus par certaines grandes banques suisses.

    Question : Ce président est il apte à faire cesser cesser cette évasion fiscale.

    Salutations


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 10:29

      @ Zadig.

      La question est moins « Est-il apte à faire cesser cette évasion fiscale ? » que « A-t-il la volonté de faire cesser cette évasion fiscale ? »


  • tchoo 29 mai 2010 09:01

    Voyez le pataquès avec l’état de santé de Johnny,

    Il a même été envisagé des obsèques nationales

    et puis quoi encore !


    • Fergus Fergus 29 mai 2010 10:25

      Bonjour, Tchoo.

      Le cas Johnny, et notamment ces obsèques nationales envisagées par l’Elysée en cas de décès, est intéressant car il montre en effet que le pouvoir en place a perdu tout sens des réalités, de la hiérarchie des valeurs et tout simplement de l’éthique la plus élémentaire. Car de qui parlait-on ? D’un simple chanteur, certes à succès, mais n’ayant jamais écrit la moindre mesure de la musique ni la plus petite ligne des paroles de ses chansons. Un chanteur de surcroît expatrié fiscal alors qu’il croule sous les biens dans un pays qui compte près de 5 millions de chômeurs.

      Parfois nos politiques marchent sur la tête, et l’actuel locataire de l’Elysée en est un caricatural exemple !


    • Christoff_M Christoff_M 30 mai 2010 03:26

      Nous sommes dans la fabrication d’idoles en platre que les médias nous désignent comme géniaux, ceci vaut pour les starac et les sportifs !!!

      il faudrait mieux dire à Tsonga et à nos footballeurs qu’ils sont loin du compte pour les motiver et les faire travailler...

      Plutôt que de les aduler avant qu’ils foulent le terrain...

      le comportement fanatique et idolatre rappelle les jeux du cirque, il y a une mise à mort des médias et du public fanatique si le héros présupposé perd (les paris sur internet sont un indice inquiétant des dérives du sport actuel...)

      La classe aisée avait ses idoles et ses champions pour occuper le peuple, mais désignée par une élite, grace à Sarkozy nous sommes revenus aux jeux romains à un besoin d’idolatrer et surtout à une société tres violente qui porte aux nues celui qui peut gagner et qui jette aux oubliettes celui qui n’assure pas ou pire qui perd, la mise à mort médiatique étant d’une violence sans pareil et désignant à la foule la personne sur qui il faut se défouler !!


    • Fergus Fergus 30 mai 2010 10:34

      Bonjour, Christoff.

      Je ne suis pas sûr que Sarkozy soit responsable de cette dérive car elle a été engagée avant lui. Cela dit, il est tout à fait en phase avec elle tant est grande sa fascination foncière pour une culture américaine où le mépris du faible et la glorification du vainqueur sont proches, en effet, des usages de la Rome antique et du « vae victis ».

      Bonne journée.


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