lundi 21 décembre 2009 - par Mmarvinbear

L’ ovale s’ouvre

En ces temps de pandémie grippale quelque peu grippée, de conférence climatique déréglée et d’Eurostar bloqués par trois flocons affiliés à Sud Rail, il est parfois des petites informations qui n’ont pas l’honneur de faire la une d’un quelconque quotidien alors que la nouvelle portée est plus porteuse d’intérêt que la diffusion de la dernière feuille de température d’un rocker internationalement inconnu sur le retour. L’annonce faite par Gareth Thomas via le Daily Mail est de celle là.


Si vous prononcez le nom de Gareth Thomas dans une antre sportive quelconque située au sud d’une ligne Bordeaux-Grenoble, vous êtes certains qu’un aficionado vous récitera immédiatement la fiche signalétique de cette personne.

35 ans.

Gallois.

Arrière des Cardiff Blues

Ancien capitaine de l’équipe du Pays de Galles, 100 sélections

Marié, puis divorcé.

Palmarès :

Une coupe d’Europe (avec Toulouse)

Un Grand Chelem du Tournoi des VI nations

Meilleur joueur européen en 2005

Autant dire que ce joueur n’est pas de la petite bière.

Le foot, c’est pour les tapettes !

Si ce joueur est actuellement sous les feux des médias, c’est pour la première qu’il vient de réaliser.

Gareth Thomas est le premier joueur de rugby professionnel encore en activité à annoncer officiellement son homosexualité.

http://www.lemonde.fr/sport/article/2009/12/19/gareth-thomas-legende-du-rugby-gallois-devoile-son-homosexualite_1283259_3242.html

J’entends déjà les rires gras et les remarques à peine moins huilées de certains à ce sujet. Ces blagues de comptoir sont inévitables, alors autant les ignorer de suite. Après tout, elles ne servent au final qu’à rassurer les « bons » hétérosexuels dans leur orientation et leurs certitudes.

D’autres sportifs ont déjà réalisé leur coming-out, mais il s’agissait souvent de retraités, et de sportifs individuels.

Qu’un rugbyman, sport viril par excellence, le fasse, c’est une grande première.

Une autre grande première en est le comportement de ses collègues et amis. Jugez plutôt les commentaires reçus :

De deux partenaires de l’équipe nationale : ""We don’t care. Why didn’t you tell us before ?" (On s’en fiche. Pourquoi tu en l’as pas dit avant ?)

De son entraineur : ""Right, I’ve got to speak now to three or four players in the Welsh team because you need the boys to surround you and support you. You can’t cope with this on your own," (Ok. Je vais en parler à des gars de l’équipe, parce que tu as besoin d’être entouré et encouragé. Tu ne peux pas porter ça tout seul.)

Gareth pursuit : "I felt everyone was protecting me and closing in tight around me. No one distanced themselves from me, not one single person." (Tout le monde m’a protégé et soutenu. Personne ne s’est éloigné de moi, pas une seule .)

Bien entendu, tout n’est pas rose dans le monde de l’ovalie (exception faite du maillot du Stade Français, qui par ailleurs est de plus en plus horrible... Ils font un concours ou quoi ?). Mais le fait que les personnes les plus proches se comportent de façon si tolérante montre bien que les allusions sexuelles les plus trashs ne sont que purs fantasmes. Non, personne ne ramasse la savonette, même Gareth le dit : « I was never ever attracted to any of my rugby mates ; I was really good at switching off my emotions and I wouldn’t have even considered crossing that line. » ( Je n’ai jamais été attiré par un partenaire de jeu. Je pouvais facilement faire taire mes pulsions et je n’ai jamais voulu franchir cette limite).

Mais son pire cauchemar ne se réalisera pas.

« My biggest fear was that if my rugby mates knew, they’d all think I fancied them and reject me.  » (Ma plus grande crainte était qu’ils pensent que je les dévirilisaient et qu’ils me rejettent.)

Une fois ses collègues mis au courant, Thomas a choisi de rendre public ce fait, afin d’aider au mieux les jeunes qui se sentent encore oppressés par leur entourage du fait de leur sexualité différente.

L’attitude du milieu professionnel tranche singulièrement avec le monde du football.

En 1990, un joueur anglais, Justin Fashanu, annonça officiellement son homosexualité lors d’une conférence de presse. A cette époque, il jouait en Premier League au sein du club de West Ham après avoir débuté en troisième division. Son annonce ne se passe pas aussi bien qu’il l’espérait. Sa famille le rejette. Plusieurs de ses collègues font de même et obtiennent son renvoi du club. Il trouve une place dans un club de troisième division puis part pour le Canada un an. Quand il revient, il ne trouve de place qu’en quatrième division. Il partira ensuite pour la Suède, les Etats-Unis et il achèvera sa carrière professionnelle en 1997 en Nouvelle Zélande avec un titre de vice-champion.

Devenu l’année suivante entraineur aux USA, il est interrogé sur dénonciation d’un jeune de l’équipe qui l’accuse de harcèlement sexuel. La plainte n’aboutit pas mais la presse américaine en fait des gorges chaudes et Fashanu, qui considère selon ses derniers mots avoir déjà été jugé coupable par la presse, se suicide dans les jours qui suivent.

Depuis, aucun autre joueur professionnel en activité n’a déclaré son homosexualité. Pourtant, il est clair que cela n’est pas dû au fait qu’il n’y en aurait pas. Le comportement de joueurs et dirigeants du Créteil Bebel, au niveau amateur, étant symptomatique de l’homophobie rampante qui caractérise le monde du ballon rond.

Gareth en tout cas est convaincu que son cas fera école, et que tout se passera bien pour la suite : « Statistically I can’t be the only one, but I’m not aware of any other gay player still in the game. » (Statistiquement, je ne peux pas être le seul, mais je ne me fais pas de soucis pour un autre encore dans le circuit.)

L’interview plus complète de Gareth est disponible ici (en anglais) : http://www.dailymail.co.uk/femail/article-1237035/British-Lions-rugby-legend-Gareth-Thomas-Its-ended-marriage-nearly-driven-suicide-Now-time-tell-world-truth—Im-gay.html

 

 Il ne reste plus au ballon rond qu’à prendre exemple.

Si même Thierry Rolland commence à l’accepter, alors tout est possible...

http://www.telleestmatele.com/article—video-thierry-roland-parle-de-l-homosexualite-dans-le-football-39043717.html



3 réactions


  • plancherDesVaches 21 décembre 2009 13:44

    Si vous étiez joueur de Rugby, vous sauriez.

    Mais vous ne l’êtes pas.

    Vous sauriez que ce qui tue l’esprit du Rugby n’est pas d’être homosexuel. Non non.

    C’est que le Rugby soit passé professionnel.

    L’amour pur du jeu a ainsi disparu. Paix à son âme.

    Mais bon, prostituez-vous, vous en tirerez peut-être quelque chose.


  • ARMINIUS ARMINIUS 21 décembre 2009 18:04

    Le titre évoque une chanson de carabin à deux voix :
     « il est ovale, mon trou de balle, ,il n’est ni rond, ni carré ni pointuuu...ni pointu
     il est ovale le trou de mon cuuuul... »
    A part ça , vraiment rien à foot, leurs affaires de cul ne regardent qu’eux. L’essentiel est qu’il nous donnent du plaisir : vive le sport !


  • Annie 21 décembre 2009 20:57

    J’ai lu aujourd’hui un article sur Gareth Thomas, et ce qui est intéressant à mon avis est que de l’avis général, ce coming out ne se serait pas produit avec le football.

    Mmarvin, j’espère que vous pouvez lire l’anglais dans le texte. Ce dimanche l’Observer a publié un article sur Peter Tatchell, dont je suis sure vous avez entendu parler. Il devait représenter les Verts aux élections mais a décidé de se retirer de la course après avoir été passé à tabac par les nervis de Mugabe et d’autres brutes du même genre, russes notamment parce qu’il garde des séquelles cérébrales de ses passages à tabac. http://www.guardian.co.uk/world/2009/dec/20/peter-tatchell-retires-interview
    C’est un de mes héros. Modeste, déterminé à se battre pour tous les opprimés et « uncompromising ».
    Merci pour cet article.


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