vendredi 12 décembre 2014 - par C’est Nabum

L’âme d’une maison

Carnet de voyage

L'esprit du vin !

Georges et Anne-Marie tiennent chambres d'hôtes dans le petit village de Chénerailles. La maison accueille celui qui devient aussitôt l'ami de passage, en lui donnant le sentiment d'être de la famille. L'histoire imprègne les murs et la décoration. Ici, quatre générations de la même tribu ont construit l'espace et la vie de ce lieu récompensé par 4 épis aux Gites de France.

Tout a commencé en un siècle qui ne connaissait pas l'électricité avec Stéphane l'auvergnat qui s'est expatrié en Creuse pour vendre les vins de son père viticulteur. Je vous parle d'un temps où le vin était tiré au fût par des consommateurs bien moins exigeants qu'aujourd'hui. Le petit vin d'Auvergne régalait les gens simples de la Creuse et les affaires de l'arrière-grand père de Georges prospérèrent bien vite.

Stéphane devint maire de la commune et participa au congrès des maires de France en 1889 comme l'atteste un document trônant fièrement à côté de la grande cheminée. Il venait d'ouvrir une voie qui restera longtemps gravée dans l'esprit des Chénéraillais et des Chénéraillaises quand celles-ci eurent le droit de vote.

Raoul son fils, puis Gaston son petit fils et père de Georges eurent à chaque scrutin municipal de nombreuses voix alors qu'ils n'étaient pas candidats. Elles attestaient de l'estime considérable qu'avait ce chef lieu de canton pour la famille.

Hélas, les années 1970 allait sonner le glas du commerce de vin en vrac. Gaston qui n'avait pas vu venir l'avènement de la bouteille et du vin bouché vit ses affaires péricliter. Il assura la subsistance familiale en élevant 5 vaches, là où naguère l'on gardait fièrement les muids.

Georges fit des études et s'en alla fort loin trouver travail et amour. Il enseigna en Alsace les sciences physiques et prit pour épouse une fille du pays ; Anne-Marie. Ils revenaient régulièrement en Creuse dans cette maison qu'ils aimaient tant.

Quand l'heure de la retraite sonna pour Georges, la conviction d'un retour aux sources s'imposa à lui. Anne-Marie le suivit en quittant son emploi et ils s'affairèrent plus de deux années durant afin de redonner à la maison familiale son cachet d'autrefois.

Ils refirent tout du sol au plafond pour recréer cet espace cossu et vivant qui offre deux chambres d'hôtes (dont une suite) à ceux qui frappent à leur porte. Durant les travaux, Georges n'avait qu'une préoccupation : « Ne pervertissons pas l'âme de cette maison ! ». Ils y sont parvenus avec un bonheur évident.

Sa jeunesse a rattrapé Georges. Dès son retour à Chénerailles, on lui demanda de prendre la présidence du club de tennis. Il se contenta de la vice-présidence, il y a tant à faire pour maintenir l'activité associative dans les petits villages.

Son histoire aussi s'est imposée à lui. À peine trois ans après son retour dans son village d'enfance, il se présenta aux municipales sans vraiment penser au succès. À sa grande surprise, il fut brillamment élu au premier tour et hérita du poste de deuxième adjoint chargé du patrimoine et du tourisme, et de tout le reste se plaît-il à dire.

Le soir de mon passage en son logis, il reçoit une roumaine, médecin de formation qu'il espère convaincre de s'installer au pays. Notre France profonde est abandonnée par nos brillants médecins français qui espèrent beaucoup s'enrichir en ville que de respecter l'esprit de leur serment d'Hippocrate au cœur de la France.

Hôtement vôtre



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