argoul (---.---.132.46) 28 juillet 2006 12:16

C’est curieux comme une note peut faire déraper facilement. Ceux dont les passions ne sont pas contrôlées par leur esprit peuvent-ils « argumenter » et faire avancer véritablement un débat ? Les « croyants » peuvent-ils contribuer utilement au débat démocratique ou ne sont-ils qu’autistes qui ressassent, sans prendre en compte les autres ?

La question que pose cette note n’est pas d’être « pro » ou « anti » France ; je suis Français, pour le meilleur et pour le pire. Elle n’est pas non plus de « distinguer » les victimes entre « bon » juif et « mauvais » allemand ou français-de-souche, Irène Nemirovsky ne se situe pas dans la militance pro-israélienne d’aujourd’hui et reste objective dans ses descriptions, certains commentateurs l’ont noté avec raison. La question n’est pas non plus de distribuer des bons points au « peuple » (rousseauistement bon) et des mauvais aux « élites » (forcément pourries-par-l’argent-cher-Monsieur). Il y a des lâches partout et l’hypothèse d’Irène Némirovsky est que lorsque vous avez le plus à perdre, vous devenez plus égoïste - ça se tient, mais il y a des exceptions (Hubert Péricand dans son docu-fiction).

La question était alors et demeure aujourd’hui celle de la volonté française d’exister ou non, de préférer la pose théâtrale et le discours aux actes concrets, dans les années 30 de la montée fasciste comme dans les années 2000 du libéralisme ultra-américain.

Où étaient les chars en 39 ? Quel était le « plan B » de l’état-major ? Qu’ont foutu les gouvernements successifs devant l’occupation de la Rhur par Hitler, l’abandon de Munich et la montée de la guerre d’Espagne ? Où en étaient les crédits d’armements malgré nos automitrailleuses Panhard et nos avions Potez « techniquement supérieurs » ? De même, où sont nos entreprises françaises, sinon majoritairement à l’étranger ? Ou est notre réforme d’un Etat qui coûte plus qu’ailleurs et ne fournit des services pas meilleurs qu’ailleurs (école, justice, prisons, aide aux chômeurs et j’en passe) ? Où est notre volonté d’avancer dans l’Union européenne pour exister dans un monde où nous devenons (par la masse qui émerge des pays ex-tiers« ) de plus en plus petits ? Quelles sont ces rodomontades sur une »force d’interposition au Liban« alors que nous n’avons qu’un seul porte-avion et une armée de métier déjà dispersée entre Bosnie, côte d’Ivoire, Afghanistan et ailleurs ? Qu’est-ce que c’est que cette démagogie du »tout va bien Madame la Marquise« et »yaka surtout ne rien changer" chanté dans la droite chiraquienne comme dans la gauche fabiuso-languienne ? C’est comme ça qu’à ne rien faire dans les années 30 on a eu la guerre ; et à ne rien faire dans les années 2000, on aura quoi ?

Pour beaucoup, c’est toujours « la faute des autres » (Allemands hier, Américains aujourd’hui). Je ne crois pas qu’avec une telle attitude les Français puisssent changer grand chose, pas plus en 1930 qu’en 2000. La lâcheté individuelle peut parfois se comprendre (sauver sa famille avant les inconnus), la lâcheté morale de tout un pays (ce qui « l^che », le laisser-aller, le laisser-faire, le je-m’en-foutisme, si vous voulez), gouvernement, élites et intellos, c’est grave ! C’est que tout un système, toute une façon de penser et d’agir ne sont vivants mais blets.

Et c’est là que, justement, l’Angleterre a « tenu » : gouvernement, élites, intellos, population. Pas d’exode, pas de panique égoïste face à l’invasion imminente et aux bombes mais, au contraire, la volonté de résister dès 1940. Ce pour quoi (hommage à ces Anglais pourtant ’selfish’) De Gaulle a été bien accueilli et que des moyens lui ont été donnés, bien que Français défait. Et ce malgré Mers el Kébir (où de vieilles badernes antédiluviennes se faisaient une conception de l’honneur d’Etat aussi trouble au fond que rigide dans la forme).

La question reste celle de l’incapacité française à sortir du discours et de la pose, tant dans la gauche yaka que dans la droite cause-toujours. En 1930 comme en 2000. C’est ça la vraie question qui nous importe et pas un air du temps démago sur « le devoir de mémoire ». Le passé ne sert qu’à éclairer l’avenir, pas à ressasser ce qu’il aurait fallu faire.


Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe