Emile Mourey Emile Mourey 10 octobre 2006 16:20

à Patrick Adam 1.Même si vous avez raison quant aux termes, je maintiens ma façon de voir le monde de l’époque de Mahomet, à savoir la permanence dans la continuité de l’Histoire d’un empire romain d’Occident et d’un empire romain d’Orient, l’un toujours centré sur Rome, l’autre toujours centré sur Constantinople. Que vous donniez au premier le nom d’empire chrétien et au second celui de royaume byzantin ne change en rien la marche d’une évolution qui a divergé : à l’Occident, un christianisme en pleine vitalité, à l’Orient, un christianisme et un judaïsme partagés en multiples courants contradictoires. N’expliquer l’Histoire que d’après le règne des rois et des empereurs et en fonction des oligarchies militaires qui se disputent le pouvoir, c’est ne voir que l’arbre qui cache la forêt.

2. La lecture de l’Ancien Testament que l’on trouve dans le Coran n’est pas, selon moi, le fruit d’une interprétation personnelle de Mahomet, mais correspond à des interprétations qui avaient court dans la région. Ce qui est certain, c’est que Mahomet a refusé deux choses dans le judaïsme et le christianisme, premièrement certaines prescriptions barbares du Pentateuque, deuxièmement la résurrection de Jésus.

3. Dans cette situation d’anarchie idéologique et militaire que connaissait l’ancien empire d’Orient, ce sont les moines de Bahira qui ont choisi Mahomet, et s’ils l’ont choisi, cela signifie qu’ils l’ont ensuite soutenu, évidemment pour mener une politique de réforme. En lisant le livre de Tabari, je ne pense pas qu’on puisse contester le fait que Mahomet ait voulu faire l’unité de l’Arabie.

4. Je cite : ...« qui aurait vécu en bonne intelligence et voisinage, notamment avec l’Empire romain d’Occident, mais avec son identité propre. » ? Voir, entre autres, sourate dix, verset quarante-huit : « Toutes les nations ont leur apôtre. Lorsque leur apôtre est venu, il y eut des décisions de prises en toute justice et il ne leur fut pas fait tort. »

5. Je ne vois pas en quoi « j’ai escamoté » la question juive ? Dans le livre de Tabari (page 345), la position de Mahomet est très claire. S’il a combattu les colonies juives d’Arabie, c’est parce qu’il estimait qu’il n’y avait pas place dans le pays pour deux religions. C’est une question politique et non pas de l’anti-judaïsme.

6. En Histoire, il faut éviter de généraliser. Il y a des juifs qui n’ont pas voulu entrer dans l’ummah et d’autres qui y sont entrés. Et en effet, on est bien obligé de constater que ce sont ceux-là qui ont redonné son élan à un islam qui commençait à être lâché par ses premiers partisans.

7. Enfin, vouloir expliquer l’Histoire sur le seul fait que les Juifs auraient refusé à Mahomet de mettre sur sa carte de visite le mot « prophète » me semble un peu léger. En réalité, c’est la fiscalité musulmane dont les Juifs n’ont pas voulue.

8. Et pour terminer, je dirais que c’est une grave erreur de considérer Mahomet et son entourage comme des êtres à la culture « étriquée ». Je pense même qu’ils connaissaient les Commentaires de César. Lors du face-à-face avec les Beni-légionnaires de la bataille de Mouta, qu’ont fait les officiers musulmans ? Ils sont descendus de leurs chevaux et ils ont, d’un seul revers de sabre, coupé le jarret de leurs montures. Or, à la bataille contre les Helvètes, César avait donné l’ordre à ses officiers de mettre pied à terre « pour rendre le péril égal pour tous ». Bref, si les musulmans lisaient César, c’est qu’ils n’étaient pas ignorants de l’Occident.

E. Mourey


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