Rounga Rounga 5 décembre 2015 22:39

@Jason
La question n’est pas ici de savoir si la doctrine générale de Georges Sorel est valide ou pas, mais de reconnaître la pertinence de la citation. Je pense pour ma part que la lucidité de ces lignes est irréprochable, et que Sorel anticipe ici Staline, Hitler, Mussolini, et tous les totalitarismes du XXème siècle. Cependant, ce n’est pas à Sorel que l’on doit la distinction optimiste/pessimisme, mais à Schopenhauer. La question du pessimisme peut se poser de la manière suivante : il n’y a pas de bonheur positif, tout plaisir n’est que la cessation d’une souffrance, et le bonheur se résume à une vie exempte autant que faire se peut de la souffrance. Il s’agit donc d’une conception générale de la vie qui s’applique également à la politique, puisque selon ce point de vue on ne peut que proposer des systèmes politiques moins mauvais que d’autres. L’espoir en l’avènement d’un paradis terrestre est illusoire dans la mesure où cela nécessite d’occulter la nature véritable de la vie humaine. Pour Schopenhauer, la véritable distinction entre les religions ne réside pas dans leur caractère monothéiste ou polythéisme, mais dans leur optimisme ou leur pessimisme. Le paganisme était optimiste, puisqu’il exaltait la force de l’individu et sa puissance d’exister, autant que le judaïsme qui valorise la réussite sociale et la richesse comme autant de dons de Dieu. Autant de leurres pour Schopenhauer, autant de satisfactions données à la volonté, le noyau véritable de notre être, pour lui donner davantage de forces pour nous tourmenter encore. Le judaïsme n’est pessimiste que par le mythe de la Chute, que le christianisme a repris de manière beaucoup plus conséquente. Je tempèrerais néanmoins Schopenhauer dans la mesure où je reconnais tout de même un versant optimiste au christianisme, dans la mesure où l’acceptation du monde et du présent est possible. Cependant, cela ne peut passer que par la diminution du moi, ce qui rejoint finalement la négation de la Volonté chère à Schopenhauer. Mais même avec cette concession, je pense que les applications politiques du christianisme doivent rester pessimistes et tenir compte de la nature déchue de l’homme. Un grand penseur ultramontain, Antoine Blanc de Saint-Bonnet, affirmait que sans la Chute, c’était le socialisme qui avait raison.


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