chantecler (---.---.4.42) 8 janvier 2007 22:58

@ Clairette:je te remercie pour ton témoignage et tes commentaires fort justes.J’ai travaillé en hopital psychiatrique.J’ai vu fondre les moyens en personnel, alors que notre société accélérait son délabrement...J’étais soignant dans des services où toutes les pathologies étaient mélangées:des « démences » (Alzheimer,ou traumatiques), des schizophrénies, des psychoses aigues et chroniques, des pathologies éthyliques,toxicomaniaques,des dépressions banales,maniaco-dépressives etc. C’était de la psychiatrie publique,donc avec éventuellement des mesures d’internement, sur les concepts de « danger pour eux-mêmes et pour autrui » (suicides). J’ai vu compresser le personnel soignant de base : 2 infirmiers,un ASH,et un interne de garde pour plus de 50 patients,l’aprés midi. En permanence le personnel masculin minoritaire, était sollicité pour neutraliser les crises de violence de malades costauds et hallucinés (dans mon service et dans les autres,en renfort). J’avais des collègues féminines trés dévouées,qui faisaient un travail magnifique et parfois se retrouvaient avec le nez cassé ,en de telles circonstances...Nous avions une responsabilité énorme car le service étant « ouvert »,les risques d’évasion étaient majeurs...Et naturellement gravissimes...Il y avait alors pléthore de « surveillants »,peu présents, assurant leurs gardes à « domicile ». Il y avait un surnombre de personnel administratif. Et pour répondre à l’interrogation d’un commentateur, nous savions que ce service psychiatrique était la « vache à lait » de l’hopital général dont il dépendait. Les psychotropes représentaient pratiquement les seuls soins promulgués : forcément, il fallait « gérer ce chaos », au détriment de la santé de tous les acteurs.Je passais avec mes collègues mon temps à cavaler:les levers,les lits,les toilettes avec du matériel inapproprié,les analyses sanguines,les médicaments,les perfs,les repas,les entretiens,etc... C’était il y a plus de 18 ans. Je ne suis pas certain que les choses se soient améliorées.J’y ai rencontré tout de même quelques médecins psy formidables, dévoués,aux capacités immenses,et des collègues infirmiers et ASH tout autant...Nous faisions le maximum, avec les moyens attribués. Je garde en mémoire tout de même un immense gachis,beaucoup de souffrances des deux cotés : soignés et soignants. Un univers Kafkaïen honteux,avec des immondices dans les couloirs,beaucoup de dévouement,de frustration et parfois de sadisme. Mais qui se soucie des malades mentaux, ( et des pauvres ) ?. Qu’ils disparaissent de la vue des « normaux », je pense en définitive, que c’était la finalité ! Les théories américaines, les DSM, ont achevé le saccage : c’était la main-mise des labos sur la psychiatrie, au détriment des avancées considérables de la psychopathologie des années 60 à 70...La camisole chimique et parfois les electrochocs, ont redéboulonné tout le travail des intervenants issus de la période 1945 à 70 (psychothérapie institutionnelle, « antipsychiatrie », etc), c’est à dire la prise en charge humanisée des « malades » envisagée aprés les horreurs de la guerre (combien de malades mentaux morts de faim entre 1940 et 1945 ?). Voilà,les libéraux,vous pouvez vous gargariser....Aucune structure privée ne se substituera pour prendre en charge tout cette misère humaine : pas rentable. Maintenant,effectivement,la pédopsychiatrie se décharge sur les écoles,et la psychiatrie adulte dans les prisons ou dans la rue,sans soins.Economies,économies...Les gens réagissent effectivement quand dans leur famille ils sont confrontés au problème ou quand ils ont affaire occasionnellement à des délirants, pas soignés:soit parce que ces malades ne sont pas conscients de leurs troubles,soit parce qu’ils arrivent à les compenser en projetant leur souffrance sur les autres qui à leur tour dégustent...Nous ne sommes pas au bout !.... smiley


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