Renaud D. (---.---.83.11) 16 janvier 2007 22:21

En matière d’aménagement du territoire, c’est plié : l’intérêt économique des régions concernées est complètement anecdotique. Ce qui compte, c’est la valeur future des banques qui financent les projets et regardent, quant à elles, au niveau européen. Le Havre, par sa situation géographique, est située à la position idéale pour capter le trafic à destination de l’Europe du Nord-Ouest. Les navires mettent une journée de plus pour rejoindre Anvers ou Amsterdam - et autant au retour. Cela représente une voire deux rotations de plus par an par navire pour ceux qui viennent de l’Atlantique, une demi rotation pour ceux qui proviennent d’extrême orient. Des sommes importantes pour les armateurs. Une bonne et intelligente desserte ferroviaire permettrait aux marchandises débarquées au Havre de parvenir au centre de l’Europe une journée plus tôt que celles débarquées sur l’Escaut ou sur le Rhin. Des sommes importantes pour les clients. Au total, un intérêt économique évident, profitable à l’emploi en France. Sur le long terme, l’aménagement des dessertes du port du Havre procurerait un vrai jackpot pour la Normandie. Le passage au grand gabarit prévu pour le canal Seine-Rhin va dans ce sens. Bravo aux politiques qui ont pris cette décision courageuse. Notons cependant qu’il n’est justifié que pour sa desserte de Paris en matériaux de construction, et non pour favoriser les relations des ports normands avec leur hinterland naturel.

Hélas, ce n’est pas suffisant. Il manquera toujours la ligne de chemin de fer adéquat, trop coûteuse pour l’état et pour les grosses banques d’investissement. Sans compter la gestion calamiteuse du fret ferroviaire en France, dont l’incurie est cachée derrière le misérable cache-sexe du « c’est la faute au lobby routier ». En fait, au lobby bancaire. Pourquoi s’embêter à financer une ligne de chemin de fer traversant le nord de la France (quiconque a fait Le Havre Lille en train se souvient du trajet !) alors que les infrastructures des ports Belges et Hollandais existent déjà : canaux, lignes de chemin de fer, autoroutes, tout est déjà en place depuis longtemps. Autant améliorer ce qui existe : c’est beaucoup moins cher.

Par contre, les investisseurs sont à la recherche de niches rentables (ou de poulaillers rentables puisqu’il s’agit de trouver des poules aux œuf d’or). Le projet d’un doublement du pont de Tancarville, apte à capter un trafic important, procède de cette logique qui a prévalu également à la privatisation des autoroutes. Sur Lyon, la stupide A 45 qui doit doubler l’autoroute Lyon-St Etienne résulte de ces mêmes calculs purement financiers. Le trafic existe : c’est sans risque. On prend ce qui existe, on saupoudre des financements (en centaines de millions d’euros quand même) et on encaisse pendant cinquante ans. Voilà de la bonne valeur future pour l’argent employé !

Vous avez dit aménagement du territoire ? Mais on aménage, mon bon monsieur, on aménage. On ne crée rien de nouveau, on n’apporte aucune plus-value réelle aux populations concernées (qui ne sont pas desservies, faute d’échangeur, comme sur l’A29), on aménage juste la ligne péage des comptes des institutions financière, promise à un avenir radieux.


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