Vivre est un village Vivre est un village 14 mars 2020 09:50

@Vivre est un village

- Le ressort du courage des résistants

[...]Mais le lâche a trop peu d’autres sur qui étayer son être pour prendre le risque de détruire le peu de liens qui le constituent. Le courageux, en revanche, est intimement lié à trop d’êtres humains pour commettre un crime contre l’humanité.[...](p422)

[...]Toutes les études que nous venons d’évoquer établissent assez nettement que la participation des individus à des actions inhumaines ne s’explique pas par la prévalence d’instincts égoïstes et prédateurs. Elle coexiste, au contraire, avec la prédominance du stress, du mal-être et des tentatives d’évitement chez les individus engagés dans ces actions.[...](p422)

[...]La facilité et la rapidité redoutables avec lesquelles une majorité d’individus optent pour la passivité ou la collaboration indiquent le déclenchement d’un réflexe de protection, plutôt qu’un choix raisonné à l’issue d’une véritable délibération consciente.[...](p423)

- L’identification au guerrier néolibéral

[...]Ainsi peut-on voir des perdants objectifs du nouveau capitalisme reprendre à leur compte la culture néolibérale de leurs maîtres, et en premier lieu le culte absolu de la responsabilité individuelle. Il n’est pas rare d’entendre des ouvriers et des employés, au bas de l’échelle sociale, afficher leur mépris pour les « assistés » qui « s’installent » dans le chômage de longue durée et vivent « aux crochets de la société ». Tant qu’on survit dans la guerre économique, il peut être rassurant de croire que les « morts » le sont par leur faute, parce qu’ils ont commis des erreurs ou renoncé au combat. Alors le seul fait d’être un survivant est une source d’estime de soi, même si l’on survit dans l’abdication permanente de sa dignité. Survivre sur le marché impitoyable, c’est prendre part à la victoire des maîtres du jeu, De là à se croire des leurs, il n’y a qu’un pas, pathologique, que le discours néolibéral encourage en engageant chacun à devenir « entrepreneur » de sa vie ».[...](p430)

[...]Être gagnant dans une société inhumaine, c’est être dans le camp des bourreaux ! Alors, si les perdants sont tentés de refouler l’humiliation de leur défaite (en s’identifiant à l’idéologie des gagnants), les gagnants ont grand besoin de refouler la culpabilité de leur victoire.[...](p431)

[...]L’identification à la conception néolibérale de l’être humain et de la société constitue alors l’antidote idéal au poison de la culpabilité. En effet, cette idéologie proclame l’innocence des gagnants : ils ne peuvent rien à la misère des perdants, qui sont victimes soit de leur refus irresponsable du combat, soit des cruelles lois de l’économie et du rouleau compresseur de l‘Histoire. Et personne n’est coupable de la guerre économique, c’est un simple fait aussi inéluctable qu’un tsunami dévastateur.[...] Il est tentant de noyer le sens de toute responsabilité dans le sophisme néolibéral qui fonde sur une éthique de la responsabilité individuelle l’idée que l’individu n’est pas responsable des autres…[...](p431)

[...]Seule cette nécessité vitale d’une justification apaisante peut expliquer que la fraction la plus éduquée de la population active récite comme un seul homme le fatras de niaiseries et de contre-vérités qui constitue le discours économique néolibéral.[...](p432)

[...]L’individu, plongé dans un monde d’insécurité croissante et disposant d’un réseau de relations racorni pour étayer son être, est alors gagné par la peur de l’isolement et de l’abandon, peur qui inhibe sa volonté d’affirmation de soi et le dissuade de risquer une opposition frontale au discours et au comportement dominants.[...](p432)

- La souffrance des clones, ou l’impasse communautaire

[...]La communauté des semblables est une impasse existentielle.[...](p435)

- Les cercles concentriques d’une communauté humaine

[...]La sécurité des liens de proximité et le plaisir de la reconnaissance par nos semblables participent donc au développement normal de l’être ; mais, pour remplir cette fonction, et pour éviter la dérive vers le repli sectaire et narcissique, ils doivent absolument être tempérés par un processus de distanciation et de diversification..[...](p438)


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