Robin Guilloux Robin Guilloux 9 novembre 2020 15:55

@mmbbb

Beaucoup de choses intéressantes dans votre commentaire. Vous dites que j’ai manqué de courage en ne nommant pas les choses par leur nom. En fait, j’ai complété l’article sur mon blog et ajouté a posteriori un paragraphe sur le totalitarisme et l’islamisme.

Ce n’est pas exactement une question de courage ou de lâcheté, mais de prudence (cette vertu cardinale que les Grecs appelaient la Phronésis).

J’ai pris ma retraite de l’E.N. il y a une dizaine d’années ; j’avais des élèves de la 6ème à la 3ème en collège, notamment en zone sensible (élèves issus de l’immigration du Maghreb, la plupart musulmans).

Je n’ai jamais eu de problème avec eux au sujet des questions religieuses ou du contenu de mes cours. Mais en tant que professeur de Français, je n’étais pas chargé de faire de l’instruction civique ; par ailleurs la France n’avait pas encore fait la triste expérience du terrorisme islamiste avec les attentats de Charly, du Bataclan de Nice, etc.

Il y avait eu l’affaire du foulard de Creil et j’ai apporté ma pierre à la cause de la laïcité avec mes collègues (tous bords confondus pour l’occasion) en introduisant l’interdiction du port de signes religieux ostentatoires (à l’initiative si je me souviens bien de François Bayrou, alors ministre de l’Education nationale) dans le règlement intérieur de l’établissement.

Aujourd’hui, les problèmes ont pris une toute autre ampleur du fait de la réalité géopolitique en Irak, en Afghanistan, en Syrie, en Egypte et en Turquie.

J’ai admiré le courage de Samuel Paty et j’ai éprouvé beaucoup de tristesse et de colère à l’annonce de son assassinat par ce fanatique d’origine Tchétchène, mais en ce qui me concerne je n’aurais jamais montré ces caricatures, surtout l’une d’entre elles où l’on voit un musulman nu dans une position humiliante à une de mes classes de 4ème, surtout dans le contexte délétère de ce collège de Conflans-Sainte-Honorine.

Je les aurais peut-être montré à des élèves de lycée, en Terminale notamment en cours de philosophie, mais pas en 4ème.

En pédagogie, il faut toujours tenir compte du public auquel on s’adresse. Le problème, c’est que l’on demande aux professeurs l’impossible : parler de laïcité, de liberté d’expression « et en même temps » ne pas froisser les croyances des élèves, ne pas faire de vagues, etc. Le professeur (c’était vrai aussi « de mon temps ») est pris entre l’administration, les parents, les élèves et parfois aussi ses propres collègues. Certains choisissent la solution de facilité.

Mon approche et ma conception personnelle est un peu différente. Il y a une phrase de Blaise Pascal qui dit qu’apprendre à bien penser est le commencement de la morale. Faire de la grammaire, apprendre du vocabulaire, maîtriser l’orthographe, s’exprimer aussi clairement et distinctement que possible, apprendre à lire et à comprendre ce qu’on lit, etc. c’est déjà de l’éducation à la citoyenneté.


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