
@C’est Nabum
BILLET DE BLOG 3 FÉVRIER 2011
https://blogs.mediapart.fr/vivre-est-un-village/blog/030211/nicole-loraux-la-politique-des-freres1
Il faut que vous fassiez une cité, c’est-à-dire des citoyens qui soient amis, qui soient hospitaliers et frères.
Saint-Just
Dans l’enquête sur les voies de la réconciliation, le point de départ sera sicilien, avec les adelphoì hairetoì (« frères électifs ») de Nakônè.Grâce à la publication de documents inédits, on sait depuis peu que, dans cette bourgade sicilienne, après un différend (diaphorà) qui fur peut être une stasis(2), la réconciliation (diàlusis) entre les citoyens s’est un jour opérée sur le mode de l’adelphothetià (« affrèrement »), en répartissant, pour mieux les mêler, tout le corps civique en groupes de cinq « frères » tirés au sort – deux « frères ennemies » issus des deux partis antagonistes, qu’encadrent solidement trois frères « neutres », cela doit, l’alchimie de l’amitié aidant, constituer à chaque fois un groupe très uni de frères symboliques(3).
Des frères symboliques, mais des frères (adelphoì) et non comme le souhaiterait l’éditeur du décret, des phratères (4) : de fait, si le mot de phrateres n’est pas prononcé, c’est que les fidèles aux formes grecques du politique, les Nakôniens du IIIe siècle avant notre ère concevaient bel et bien « l’union entre citoyens … sur le modèle de la parenté par le sang(5) ».Adelphoì, donc : des consanguins, mais des consaingunins fictifs, tirés au sort et cependant désignés comme « élus » (hairetoì)(6). Bref, contre la menace toujours renaissante de la stasìs, cinq par cinq et tous ensemble, les citoyens de Nakôné deviendront frères.
Ce qui, avant d’aller plus avant dans toute interprétation du décret, nous invite à y voir plus clair dans les représentations grecques de la fraternité.
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