Nemo 23 août 2007 17:54

@ l’auteur,

Il est dommage qu’une bonne remarque concernant un problème particulier se focalise sur un exemple mal choisi, et se termine par une conclusion aussi peu informée. Il est effectivement dommage de voir que les différents Gouvernements, quels qu’ils soient, s’arrangent pour « maquiller » les comptes, afin d’embellir la mariée

Cependant, Les budgets de l’Etat et des différentes branches de la Sécurité Sociale sont déjà séparés. Pour plusieurs raisons :

- Pour une raison de nature tout d’abord. Les dépenses de l’Etat, sauf exceptions (ex : la Défense), sont des dépenses de nature limitatives. C’est à dire qu’un dépassement de celles-ci ne peuvent survenir qu’à la faveur, soit d’un artifice comptable du même titre que celui que vous citez ici, soit plus souvent d’une loi de finances rectificative du Parlement.

Les dépenses de la Sécurité Sociale (Maladie, Vieillesse, Chômage), sont par essence évaluatives. On ne peut pas savoir à l’avance exactement combien de personnes vont être malades, et quels vont être leurs besoins de remboursements. On ne dispose pour cela que d’outils statistiques.

- Elles sont ensuite séparées par des raisons de fonctionnement. Le budget de l’Etat est piloté par l’administration française, qui dépend hiérarchiquement du Gouvernement, lui-même issu d’élections législatives. Ce budget est publiquement analysé, voté et évalué avec plus ou moins d’acuité chaque année, avec une assez grande publicité.

Le budget des différentes branches de la Sécurité Sociale est quant à lui piloté par les partenaires sociaux (syndicats historiques et patronat, FO, CGT, CFDT, CGC, MEDEF,...) qui président aux conseils d’administration des différents établissements publics (CPAM, CAF,...). Ces établissements publics recoivent des dotations de fonctionnement -c’est à dire des enveloppes- et gèrent ces fonds comme ils l’entendent, sous le contrôle cependant des Cours Régionales des Comptes et de la Cour des Comptes elle-même. Le publicité et la transparence des comptes de ces établissements publics ne sont cependant pas un modèle du genre.

- Pour des raisons dites de spécialité ensuite. Le principe d’universalité du budget de l’Etat dispose que les recettes ne peuvent être affectées aux dépenses, hors fonds de concours, budgets annexes et comptes spéciaux.

En revanche, les recettes des prélèvements sociaux sont directement affectées aux fonctionnement et au remboursement des branches de la Sécurité Sociale.

Le seul vrai lien qui existe entre le budget de l’Etat et les budgets des comptes sociaux est celui du renflouement. A chaque euro de déficit des comptes sociaux correspond un euro supplémentaire de charge au budget de l’Etat, c’est à dire aux impôts de tout le monde.

Votre proposition de « transparence financière », en tant que séparation claire, aurait pour effet d’avoir à choisir ou à combiner les alternatives financières suivantes, pour combler les déficits récurrents et inévitables de la Sécu, ne serait-ce qu’en raison du vieillissement de la population :

- la baisse des prestations sociales
- la limitation du nombre de personnes aptes à en bénéficier
- l’augmentation des prélèvements sociaux

Mais plus encore, si vous séparez le lien entre les deux, vous tombez dans un dispositif purement assurantiel (ne dit-on pas Assurance-chômage, assurance-maladie, assurance-vieilesse ?), à savoir que seules les personnes ayant cotisé seraient à même à pouvoir bénéficier des éventuelles prestations.

Ce qui impliquerait l’utilisation du deuxième facteur énoncé plus haut mais laisserait beaucoup de personnes sur le bas côté de la route. Qui se tourneraient vers l’Etat, qui assume une bonne part de la charge d’assistance. Et la boucle est bouclée.

Si vous souhaitez ne laisser personne de côté, vous êtes obligé de recourir à l’impôt. Mais comment pouvez vous accepter qu’une part très importante de vos impôts échappe au contrôle de la représentation nationale ? Donc vous êtes obligé d’avoir un lien avec le budget de l’Etat.

Et j’irai même plus loin : il faut « étatiser » la Sécu. L’organisation de sa gestion, héritée des lendemains de la 2nde Guerre Mondiale, ne peut plus faire face aux défis actuels. La méfiance vis-à-vis de l’administration française, par trop marquée par Vichy, était alors légitime. Et les missions confiées aux partenaires sociaux, pour ambitieuses qu’elles étaient, n’avaient pas pour autant acquis leur envergure actuelle.

Les syndicats d’aujourd’hui sont complètement dépassés. Vidés de leur substance par la désaffection des salariés, surprotégés par le statut « d’organisation représentative », ils n’ont ni les ressources humaines, ni surtout la volonté profonde de remettre en question ce mode de fonctionnement devenu archaïque.

Ils se sont peu à peu habitués à vivre sur une kyrielle d’organismes opaques dont les places toujours plus juteuses aux conseils d’administration sont distribuées à leur caciques, par ailleurs complètement déresponsabilisés dans leurs modes de gestion, et qui hurlent au loup au moindre contrôle.

Avec un Ministère de la Sécurité Sociale, le contrôle serait sans aucun doute beaucoup plus efficace et beaucoup plus transparent. Au moins, il y aurait une tête « à couper », si les fonds sont dépensés en dépit du bons sens.

Car aujourd’hui, ce n’est pas l’Etat qui détourne l’argent de la Sécu, c’est la Sécu qui détourne l’argent de l’Etat...


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