Luigi Chiavarini Luigi Chiavarini 29 août 2007 08:22

Permettez que je tente de « vulgariser » le phénomène en restant naratif et personnel c’est souvent une méthode didactique efficace :

Tu as besoin d’argent. Tu viens me trouver et tu me dis que tu veux m’emprunter cent balles pour acheter un appartement.

Mes conditions sont simples : tu me rembourses dix balles tous les ans pendant vingt ans, tu prends une assurance qui prendra ton relai dans les remboursements s’il t’arrive un pépin et, en sur-garantie, tu me donnes une hypothèque sur l’appartement que tu achètes avec l’argent que je te prête.

Le prix des apartements monte en flèche, l’appartement que tu achètes cent balles vaudra sans doute deux cent balles dans deux ou trois ans. C’est bon pour toi. C’est bon pour moi : si tu t’enrichis, tu seras un meilleur client pour moi, si ça tourne mal, la garantie que tu me donnes me permettra de faire un sur-bénéfice.

Car de mon côté, je n’ai pas cet argent, mais mon métier de banquier est de savoir en trouver à moins cher que ce que je te prête. Pendant que tu me rembourseras dix balles par an pendant ving ans, je rembourserai huit balles par an à ceux qui m’ont prêté les cent balles nécessaires à l’opération. La différence paiera mes frais et mon profit.

Je te connais, tu es jeune, tu as un bon job, tu gagnes quarante balles par an. Je te fais confiance. Je te prête donc cent balles, je range ta garantie au coffre-fort. Avec les garanties que tu me donnes, je peux dormir tranquille, l’affaire est réglée en deux coups de cueiller à pot. Jusque là tout va bien.

Manque de pot, ton perds ton job au bout de deux ans ou, variante, tu as emprunté à taux variable et ces idiots de taux se mettent à grimper. Dans les deux cas, qui peuvent d’ailleurs se cumuler, tu ne peux plus me rembourser chaque mois. Dans un premier temps, c’est pas grave pour moi, j’ai prêté à cent mecs comme toi. Je ferai jouer ton assurance, si ça ne suffit pas, je puiserai un peu sur mes frais et sur mes profits. Si ça se prolonge vraiment, je ferai jouer ma garantie, je prendrai ton appartement, et je le revendrai. Avec une bonne chance de plus-value.

Mais voila, les emmerdes n’arrivent jamais seules. Voila que trente ou quarante des mecs à qui j’ai prêté cent balles perdent leur job, tombent malades, font faillite, bref, ne peuvent plus me rembourser.

Pour pouvoir rembourser mon propre prêteur, il faut que je revende quelques-uns des appartements. Le premier se vend très bien, avec une sacrée plus-value. Mais ça ne suffit pas. J’en remets dix autres, d’un coup, sur le marché. Là, la moitié me reste sur les bras. Mon prêteur s’énerve. Il faut que je vende “à tout prix“. Donc je dis à mon agent qu’il peut réduire le prix.

Quand les clients potentiels voient que ça baisse, ils rechigent à acheter, font traîner. D’autant que leurs propres banquiers, qui sont dans la même situation que moi, sont réticents à prêter de l’argent, qu’il commencent à avoir du mal à rembourser eux-mêmes.

Pour faire face à mes engagements, je revends d’autres trucs : des actions pétrolières, des obligations d’Etat. Mais plus j’essaie de vendre, plus les prix baissent et moins il y a d’acheteurs.

J’appelle mes confrères. Leur moral n’est pas terrible. En fait, ils perdent confiance. Ils sont tous vendeurs. Et il n’y a plus d’acheteurs. Tout le monde veut garder ou récupérer ses sous. Du coup, l’argent devient rare, comme on dit : les banquiers, qui ne voulaient plus prêter pour des opérations immobilières, commencent à faire la sourde oreille pour prêter aux entreprises.

La crise s’étend. Invisible d’abord. De pays en pays. De secteur en secteur. Les banques centrales jugent alors urgent d’injecter des liquidités dans le système, pour rendre l’argent moins rare. Au risque de réveiller l’inflation. Cela suffira-t-il à rétablir la confiance ?

On en est là...


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