Johan Johan 23 novembre 2007 17:00

@ Deuxa

« Ce sont le code du travail et la législation française qui sont la cause des absurdités que vous citez (par exemple l’emploi massif de stagiaires). »

Déjà l’abus de stage et réprimé par la loi. La sous dotation de l’inspection du travail et les usages non réprimés permettent aux employeurs abusifs d’en profiter. Il ne faut pas jeter l’opprobre sur toutes les entreprises, mais reconnaissez qu’il y a une tendance lourde à l’abus de stage.

Il y a d’autres exemples : pourquoi le tassement des salires sur le salaire minimum (17% des salariés). Pourquoi tant d’heures sup’ non payées ?

Il y a un problème légal, un problème politique et un problème économique, qui vient des entreprises qui ne font pas confiance ou qui abusent de la difficulté qu’il y a à travailler, et autre problème économique, il y a la déconsidération stupide par les étudiants de professions manuelles. Il y a aussi de nombreux étudiants en fac qui auraient voulu apprendre un métier rapidement, via un IUT ou un BTS (ou plus tard une école de commerce, une IAE ou une école d’ingé) et qui n’ont pas pu le faire par manque de place.

En ce qui concerne les « CPE » (vous êtes sur de ne pas vouloir dire CNE ?), je crois que 6 mois de période d’essai sont bien suffisants pour un entrepreneur pour se faire une idée correcte de son employé. Le CPE-CNE avait des répercussions trop lourdes pour l’employé (par exemple en ce qui concerne les garanties pour un logement ou un prêt), et malheureusement a permis bien plus de substitutions que d’embauches par effet d’aubaine. C’est pas moi qui le dis mais l’évaluation du CNE après un an d’application.

Par contre je vous rejoins complètement sur les deux critiques faites :

Le droit du travail est bien trop complexe et confus. Il doit être simplifié pour éviter que des employeurs de bonne foi se trouvent hors la loi et que les grands groupes exploitent au maximum les exonérations et autres contrats aidés. Les économies réalisées devraient financer un small business act (deux salariés sans charge pour toutes les entreprises).

Les candidats sont trop peu potables. Il y a un problème dans le choix de la formation (souvent la formation professionnalisante désirée est refusée). Il y a aussi un problème dans les réseaux de recrutement. Les PME devraient s’organiser sous forme de coopératives pour mutualiser leurs recrutements et capter de meilleurs profils. Autre problème : le snobisme des étudiants vis à vis des PME et TPE. Exemple assez fou : je me suis présenté sur le stand de KPMG (cabinet d’Audit) dans un forum Grande école. J’ai expliqué au recruteur que je voulais bosser avec des PME et des assos pour comprendre les problématique dans leur ensemble et apporter mes expériences, et pas bosser sur un 100ème du problème. Il m’a répondu qu’il était ravi d’entendre ça, et que presque tous étaient obnubilés par la notoriété du client.

« Les étudiants se suicident en prétendant que les entreprises »n’ont qu’à prendre des risques, que diable, et nous embaucher sur notre bonne mine« . Cela ne marchera jamais. Le travail n’est pas un droit, en tout cas il n’est acquis qu’en contrepartie de devoirs. Aucun patron de PME n’écoutera vos discours. »

Je n’ai jamais parlé de « bonne mine », au contraire j’aimerais que les gens soient testés sur leurs compétences et pas sur la notoriété de leur formation ! J’ai encore moins sous entendu que l’entreprise devait payer un salarié sans contrepartie ! Je ne comprends pas pourquoi les entreprises clonent leurs profils. Je pense qu’en entrant dans une entreprise on a tout à apprendre, et qu’il faut faire ses preuves. Je pense que des talents qui ont énormément à apporter à l’entreprise ont besoin qu’on leur fasse confiance, et que le jeu en vaut la chandelle pour les entreprises. Il y a certes plus de risque, mais aussi plus à gagner. Je pense aussi que les contrats CNE CPE offraient trop de pouvoir au patron. Un employé peut être dérangeant. Ce n’est pas nécessairement contre productif de remettre en cause, tant que l’approche est constructive. La tentation de virer toutes les grandes gueules est trop forte. Politiquement, je pense aussi qu’il est dangereux de mettre tous les esprits critiques au chômage.

J’ai connu la fac, et je suis en Ecole de commerce. Beaucoup d’étudiants des deux formations devraient échanger leurs places.

« Quant à m’expliquer qu’il est logique que les étudiants préparent leur retraite, c’est une réflexion totalement consternante, signe manifeste que le mot »travail« a perdu son sens dans une société déboussolée - et excessivement atypique. Nous sommes un des seuls pays du monde où à 20 ans, on est déjà - dans sa tête - un petit vieux réac, bloqueur de réformes et défenseur de pseudo acquis. Le meilleur moyen de préparer sa retraite n’est pas de bloquer les universités, c’est de travailler dur. »

Les étudiants sont soucieux de leur avenir. Le marché du travail est ingrat (ok pas toujours à cause des décideurs, qui sont eux même englués par une législation opaque, des financeurs gourmands, une concurrence mondiale et une croissance molle ; reste que les salaires sont médiocres, l’insertion très difficile, et les tâches confiées demandent de plus en plus de cynisme pour s’adapter aux autres impératifs). Je suis de la génération 80’s. La génération 70’s a morflé et a désenchanté le monde du travail. Ma génération s’inquiète de ne pas pouvoir fonder une famille, ou même de vivre décemment. Mes amis de 30 ans se demandent quand ils finiront de vivre aussi fauchés que les étudiants. Les retraites sont venues sur le tapis parce qu’aujourd’hui est dur, nous ne sommes plus insouciants. C’est surement dommage.

Comment valoriser le travail ?

1 un système social cohérent, où celui qui se lève cumule ses aides sociales avec son salaire, serait plus incitatif.

2 Tout à fait d’accord : il faut faire découvrir l’entreprise aux enfants, puis aux ados. Et pas que Nike, McDo ou l’Oréal. L’industrie, les services, l’artisanat, les PME et TPE. Je crois aussi avoir insisté sur les filières techniques et technologiques dans mon article. Là aussi on est d’accord.

Enfin, je ne peux pas blairer Julliard.

Il n’en demeure pas moins que les étudiants sont des citoyens. S’ils veulent exprimer leur opposition à une loi sur l’enseignement supérieur, ils sont les mieux placés. S’ils veulent s’opposer contre la réforme des retraites, ils sont concernés au premier chef. Mais quand bien même serait ce contre l’inepsie de la taxe professionnelle qu’ils en auraient encore le droit : ce sont des citoyens.

En ce qui concerne le blocage, c’est un autre problème. Ma position à ce sujet n’est conciliante ni avec les pro, ni avec les anti.


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