Saï 3 janvier 2008 11:07

Le principal problème avec l’église évangélique n’est pas tant les valeurs qu’elle véhicule et sa façon de les diffuser, toutes critiquables qu’elles soient comme l’auteure le pointe d’ailleurs avec justesse, que le contrepoids idéal que sa nature offre au fondamentalisme islamique, en justifiant ainsi l’influence et la progression.

Ceci à trois niveaux en particulier : le prosélytisme militant et standardisé tout d’abord, qui provoque une sorte d’enchère plus ou moins tacite sur les conversions ; les nombreuses références à une interprétation littérale des Ecritures ensuite, pilier de l’islamisme et ici faiblesse du relativisme occidental face à la contradiction de valeurs que la nature de l’approche des évangéliques engendre ; la perception de la religion comme un combat pour la prédominance mondiale de celle-ci, enfin, avec la notion centrale de peuple élu pour sa foi en la vraie cause. On peut en distinguer d’autres.

Mettons-nous un instant à la place des religieux islamistes. Devant eux se dresse le monde occidental, incarné en particulier par la culture américaine, laquelle ne saurait être dissociée, désormais, du poids considérable qu’y représente l’église évangélique. Face à tant de mimétisme perçu dans les principes d’action de celle-ci, comment ne pas voir dans la rivalité religieuse ainsi érigée l’un des fondements de la nécessaire expansion de leur propre doctrine ? Eglise évangélique et islam militant évoluent sur le même terrain, celui de la diffusion active et massive de leur idéologie. Et sur le terrain, la présence d’un adversaire oblige à jouer la partie. Ainsi, les méthodes des évangélistes apportent par leur nature sinon une caution, du moins une justification à l’expansion d’un islam dit traditionnel.

Alors bien sûr, on n’est pas près de voir un converti évangéliste se faire sauter au milieu d’un marché en hurlant « Dieu soit loué ». Bien sûr, le fondement de la doctrine évangéliste repose sur les principes chrétiens, qui sont des valeurs d’humilité, de respect du prochain et de tolérance, toute interprétation personnelle qu’on puisse en faire. Mais en portant l’opposition entre culture islamique et culture occidentale sur le plan de l’expansionnisme religieux, l’église évangélique offre une assise confortable aux revendications islamistes, leur permettant de ne pas circonscrire les différends au domaine géopolitique et renforçant ainsi leur légitimité. L’approche du débat en France est souvent plombée par la relative absence de prise en compte de ce facteur, au profit d’une problématique plus souvent réduite à la compatibilité entre islam et démocratie.


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