Veilleur de Nuit 5 mars 2009 10:37

"J’aurais voulu que la Cinquième Avenue se souvienne des pistes indiennes. J’aurais voulu arriver d’une ville de mineurs, avec les manières rudes et les convictions que m’aurait données un vieil oncle athée, pilier de bistrot et honte de la famille. J’aurais voulu foncer à travers l’Amérique dans un train plombé, le seul homme blanc admis par les nègres à la convention de paix. J’aurais voulu aller aux cocktails-parties avec une mitrailleuse. J’aurais voulu dire à une vieille amie que mes méthodes révoltent qu’on ne fait pas la révolution dans les soirées mondaines, qu’on n’a pas le choix, et voir sa robe du soir en lamé se mouiller à la fourche. J’aurais voulu me battre contre la prise du pouvoir par la Police Secrète, mais de l’intérieur du Parti. J’aurais voulu qu’une vieille dame qui avait perdu ses fils me mentionnat dans ses prières au fond d’une église de torchis, sur la foi de ses fils. J’aurais voulu me signer en entendant des grossièretés. J’aurais voulu qu’on tolérat des vestiges de paganisme, contre l’avis de la Curie, dans le rituel des petis villages. J’aurais voulu trafiquer dans l’immobilier, représentant d’un milliardaire anonyme et sans age."

Leonard Cohen
extrait du livre Les perdants Magnifiques


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