le naif le naif 26 février 2010 13:43

Je me permets de reproduire ici l’appel de Paul Jorion

A noter que c’est article à déclenché une avalanche de commentaires, comme rarement il y en avait eu au paravant.



Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Messieurs, Dames, des instances européennes, je m’adresse à vous : il y a feu en la demeure !

Vous ne sauverez pas la Grèce en lui enjoignant de baisser le salaire de ses fonctionnaires. Vous ne sauverez pas la Grèce en l’encourageant à combattre la fraude fiscale. Vous ne la sauverez pas non plus en créant une… cagnotte (on tombe ici dans le dérisoire !). Il est beaucoup trop tard pour tout cela. Et de toute manière, le problème n’est pas là.

Le 3 février, je participais à l’émission « Le Débat / The Debate » sur France 24. Si vous parlez l’anglais, écoutez je vous en prie ce que je dis quand la discussion s’enlise sur le sujet de savoir si les statistiques économiques de la Grèce ont été bidouillées oui ou non, et si vous ne parlez pas l’anglais, lisez s’il vous plaît la façon dont je résume mon intervention :

Je dis qu’il y a à nouveau un petit jeu sur les Credit-Default Swaps (CDS). Cette fois, ce n’est plus 1) Bear Stearns, 2) Lehman Brothers, 3) Merrill Lynch, c’est 1) Grèce, 2) Portugal, 3) Espagne. Ce que font en ce moment les marchés financiers n’est pas sans rappeler l’opération de George Soros qui coula la livre britannique en 1992 (quand on pense que le renouveau de la « science » économique est entre ses mains !)

Votre cagnotte pour la Grèce, si péniblement rassemblée, sera emportée par la bourrasque en quelques heures, et il vous en faudra immédiatement quatre autres : une autre pour le Portugal, une pour l’Irlande, une pour Chypre et une beaucoup plus grosse que les quatre autres mises ensemble, pour l’Espagne.

Vous aurez alors quelques jours pour reprendre votre souffle parce que la victime suivante ne fait pas partie de la zone euro puisqu’il s’agira du Royaume-Uni.

Il n’est pas question de salaires trop élevés : il s’agit de dominos, et de la même manière que le nom de Lehman Brothers était écrit dans le ciel le jour où Bear Stearns est tombée, le nom du Portugal s’inscrira au firmament le jour où la Grèce fera défaut sur sa dette.

Alors que faire ? Tourner les projecteurs vers la cause. Vers la combinaison mortifère des notations de la dette publique des États par les agences de notation et les positions nues des Credit–Default Swaps, ces paris faits par des gens qui ne courent aucun risque mais qui créent du risque systémique à la pelle, dans un seul but : d’énormes gains personnels.

Il est temps, Messieurs, Dames, d’envisager l’interdiction des paris sur les fluctuations de prix.

Ne m’objectez pas que c’est compliqué : ce ne l’est pas, c’est déjà écrit en filigrane dans la norme comptable américaine FASB 133.

Ne me dites pas que cela va « affecter la liquidité » : à ce reproche, j’ai l’habitude de répondre que les parieurs ne créent de la liquidité que pour d’autres parieurs et que cela n’a donc aucune importance, mais aujourd’hui, j’ajouterai autre chose : « À ce stade-ci de désintégration probable de la zone euro : la liquidité, on s’en fiche  ! »

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.


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