mardi 12 juin 2018 - par Bruno Hubacher

A quoi sert le Parti Socialiste Suisse ?

A l'instar des partis traditionnels de la gauche européenne, le Parti Socialiste Suisse essaie la quadrature du cercle.

Depuis les élections législatives de 2015, juste à temps, avant que le vent tourne, la Suisse a fini par rejoindre le concert du néolibéralisme ambiant, pour mieux assister à sa désintégration peut-être. Comme chez nos voisins français, la droite réactionnaire piaffe d’impatience pour brader l’argenterie et le Parti Socialiste Suisse, grande perdante de 2015, fait bonne mine à mauvais jeu, question de prestige. Il lui reste encore deux ministres à l’exécutif, otages d’une sorte de GROKO allemande (grosse Koalition) à la sauce suisse.

Ainsi, par la force des choses, pour faire passer des lois qui permettent à peu près de sauver la face, ses députés se convertissent en « dealmakers », pactisant avec la droite libérale, si nécessaire. Pourtant le PS suisse n’a jamais pris le virage de la « troisième voie » de Tony Blair et Gerhard Schröder, ce n’est donc pas le moment de s’y mettre. Quand les bourgeois trouvent un accord « formidable » il y a anguille sous roche. La Social-démocratie européenne l’a appris à ses dépens.

Drame en deux actes, librement inspiré de Milton Friedman, Acte I. Il se trouve que la Suisse est dans le collimateur de l’Union européenne et l’OCDE qui l’accusent d’être une profiteuse, pratiquant une politique fiscale racoleuse, à l’instar du Luxembourg, des Pays-Bas et l’Irlande et qui, en catimini, accumule des excédents commerciaux indécents, à l’instar de sa grande sœur, l’Allemagne,

Prise de court, une fois de plus, comme pour le secret bancaire, elle s’empresse donc, à la hâte, de mettre sur pied une législation fiscale des entreprises plus équitable, notamment à l’égard des entreprises suisses, jusqu’ici fortement pénalisées. La nouvelle législation du nom de « RIE III », la « Loi sur la réforme de l’imposition des entreprises », aurait donc dû voir baisser l’imposition des entreprises suisses et augmenter celle des 24'000 multinationales établies sur son sol, les fameuses créatrices d’emplois dont on entend si souvent parler. Comment faire pour ne pas trop les effrayer tout en camouflant les inévitables (?) pertes fiscales aux contribuables ?

Il faut adoucir la pilule et trouver un compromis bien de chez nous. Seulement, le faut-il vraiment ? La précédente révision de la loi sur la fiscalité des entreprises, « RIE II », la petite sœur, acceptée à une courte majorité de 20’000 voix par le peuple le 24 février 2008, grâce aux paroles rassurantes du ministre des finances de l’époque, conseiller en stratégie d’entreprises à ses heures perdues, Hans-Rudolf Merz, cause, depuis son entrée en vigueur, des pertes fiscales cumulées de 15 mia CHF selon des estimation de l’Union syndicale suisse, avec, à la clé un manque à gagner de 2 mia CHF pour le système de retraite par répartition AVS, car certains entrepreneurs préféraient se faire payer leur salaire sous forme de dividendes, exemptes d’impôt jusqu’en 2015, pour éviter les cotisations sociales. Après tout, pourquoi se seraient-ils privés de cette faveur que la loi leur accordait ? 

L’urgente « RIE III », proposée par l’actuel ministre des finances du parti agraire UDC, Ueli Maurer, dont les estimations de pertes fiscales sont de l’ordre de 1,3 mia CHF supplémentaires par année (PS), a eu moins de chance. Saisie d’un référendum par le Parti socialiste elle a échoué devant le peuple à 60% le 12 février 2017. Fallait quand-même pas pousser trop le bouchon. Un à zéro pour la gauche.

Acte II. En septembre 2017 le ministre des affaires sociales Alain Berset, un socialiste cette fois, propose à son tour une réforme « light » du nom de « Prévoyance 2020 », celle du système de retraite par répartition AVS, mis à mal par le déséquilibre démographique dont la Suisse souffre. « Réforme light » parce que largement diluée sous la pressions de la droite majoritaire (augmentation de l’âge de la retraite des femmes à 65 (pour la petite histoire, actuellement deux tiers des séniors prennent une retraite anticipée), hausse de la TVA, baisse du taux de conversion du système complémentaire de retraite par capitalisation, déterminant le niveau de la rente, etc.). Le référendum ne s’est pas fait attendre (bien que techniquement pas nécessaire à cause de l’augmentation prévue de la TVA dans le paquet, soumise au vote populaire obligatoire). La concurrence, si on peut dire, les mouvements syndicaux, ont fait couler la « chose » devant le peuple « illico presto » le 24 septembre 2017. Egalité.

Si vous avez vu « RIE III », ne ratez pas « PF 17 », le « Projet fiscal 17 », actuellement en consultation, la même chose en bleu. Seulement là, ce sont les sénateurs socialistes qui s’agitent pour marquer le point. Ainsi sort de la commission économique du Conseil aux Etats une proposition chaudement applaudie par à peu près tous les partis, de concert avec les milieux économiques. La solution : transformer deux fiascos en succès. Accrochez vos ceintures !

Etant donné que les deux projets de loi ont échoué devant le peuple on va les proposer à la vente en « package ». Pour « contrebalancer » les pertes fiscales d’un côté on renfloue le système de retraite en augmentant la cotisation salariale de 0,3, dont les employés paieront 0,15% et les employeurs 0,15%. Ainsi, les cotisations sociales serviront de subvention aux entreprises qui recevront en outre une compensation sous la forme d’une taxation plus clémente des dividendes qui seront dorénavant imposée à 50% de leur valeur au lieu de 70%. Pourquoi pas à 100% d’ailleurs ? 

On augmentera également la contribution de la Confédération à l’AVS de 385 mio CHF par année, ardoise qui sera réglée par le contribuable. Tout ceci devrait rapporter 2,1 mia CHF par année à l’AVS, couvrant environ 40% de ses besoins. Les autres éléments de la malheureuse « RIE III » qui ont tant fait rire les électeurs seront plus moins repris par « PF 17 », pour l’instant.

Y a-t-il une vie après la gauche ?

Scrutant l’horizon politique européen on pourrait en douter. Le PS français n’est plus que l’ombre de lui-même, occupant encore 30 sièges à l’Assemblée National sous le nom de « Groupe Nouvelle Gauche » face aux 310 sièges du mouvement « REM » du président et les 101 sièges des « LR », la droite classique. Le SPD allemand a perdu, grâce à sa participation à la GROKO, plus de 10 millions d’électeurs depuis 1998 et se retrouve avec 17% d’intentions de vote, tendance à la baisse. En Espagne, le PSOE a perdu la moitié de ses sièges aux Cortes en 10 ans. Comme en Allemagne les sociaux-démocrates néerlandais s’étaient laissé embobinés en tant que partenaire minoritaire dans une GROKO dominée par les libéraux conservateurs. Ils sont actuellement en voie d’extinction. Et en Italie ce sont les « 5 étoiles » et la « Ligue du nord » qui mènent la danse

Aux Etats-Unis où se préparent actuellement les « mid-term elections » du 6 novembre prochain, les candidats progressistes qui se présentent actuellement au nom du « Parti Démocrate » se font systématiquement torpiller par l’establishment du parti. Bernie Sanders et son mouvement « Our revolution » nagent à contre-courant. Ce parti, infesté par l’argent des « Super-pacs », n’est pas prêt pour une introspection, bien au contraire. 

Le 31 mai dernier, Dr. Sahra Wagenknecht, co-présidente du groupe parlementaire « die Linke » au Bundestag, a accordé une interview au média online « Mediapart ». Confrontée avec l’amer constat que sur les 10 mio d’électeurs que le SPD a perdu en 10 ans son parti n’a finalement récupéré que 2, une bonne partie de ces gens est allé vers l’AFD, le parti fasciste, bien implanté au Bundestag maintenant depuis les dernières élections législatives, elle a décidé de lancer, avec son mari Oscar Lafontaine, malheureux ministre des finances sous Gerhard Schröder, un mouvement populaire de gauche, plutôt qu’un parti politique traditionnel avec ses structures rigides, à côté et en dehors de son propre parti, ouvert à tous, indépendamment de la couleur politique. Pour cela elle s’est largement inspirée du modèle de la « France insoumise ».

L’objectif serait de « faire pression sur les partis établis pour les obliger, le SPD en premier lieu, à faire une politique plus sociale ». Bonne chance.



15 réactions


  • Jean Roque Jean Roque 12 juin 2018 12:40

    Comme tout les partis gogochons, détruire la souveraineté du peuple et collaborer avec les mondialistes :
     
    désarmer le peuple, limiter le référendum, encourager le multiethniquage bétonnage, servir la soupe aux lobbies via l’UE, 
    etc. et pisser sur son froc baissé face au méchants climatiiik, atomiiiik.
     
    « Chez nous l’opposition c’est le peuple » Blocher, UDC
     
    « Nous voulons que chaque citoyen porte une responsabilité politique et refusons que quelques rares fonctionnaires politiques ou diplomates décident du sort de la grande majorité des citoyens. La foi dans la toute-puissance de l’État a malheureusement une longue tradition et continue à marquer de son sceau la pensée de politiciens européens, chez les socialistes de tous les partis. C’est pourquoi nous souhaitons ne pas nous intégrer à l’UE et à ses instances, quelles que soient les sympathies que nous puissions avoir pour ces pays et les habitants de ce continent. L’idée d’une UE organisée de manière centralisée et bureaucratique « du haut vers le bas » plaît aux socialistes et socio-démocrates. Le mot magique dangereux est en l’occurrence « l’harmonisation ». Les socialistes souhaitent que la politique et l’administration décident de tout à un niveau le plus élevé possible et qu’ils décident par conséquent partout de la même façon. Ils souhaitent adhérer au plus vite à l’UE. Nous souhaitons en revanche que les décisions soient prises à un niveau le plus bas possible. C’est pourquoi nous nous battons pour une Suisse qui reste fidèle à elle-même et à ses valeurs que sont la liberté, l’indépendance, la démocratie directe et le fédéralisme. » Blocher, UDC
     


  • L'enfoiré L’enfoiré 12 juin 2018 13:39
    En Europe et probablement en Suisse, ce n’est pas la droite qui prend des voix mais l’extrême-droite.
    Ce qui n’est pas la même chose que la droite progressiste.

  • troletbuse troletbuse 12 juin 2018 13:59

    Ce qui il y a de sûr, c’est que le PS français ne sert plus à rien. Hollandouille l’a totalement éliminé. C’est d’ailleurs le seul point où il a réussi. Mis à part les attentats, bien sur.


    • francesca2 francesca2 12 juin 2018 17:16

      @troletbuse


      Les partis socialistes, oû que ça soit dans le monde, servent à emmerder le peuple.Et à le faire disparaître si possible. 
      C’est leur vocation depuis au moins quarante ans. 


    • Shaw-Shaw #Shawford 12 juin 2018 17:18

      @francesca2

      Chalut Créolia ! ^^ ( ❣)

      On s’le fait là le #B52 de nowaday ?


    • francesca2 francesca2 12 juin 2018 17:26

      Salut nono

      Tuas trop de pain sur la plancheeeeeeu, Où sont ils maintenant ?? 

    • Shaw-Shaw #Shawford 12 juin 2018 17:30

      @francesca2

      Qui ça, les monstro plantes ? Toujours dans l’attente de Jayce !


    • Shaw-Shaw #Shawford 12 juin 2018 17:37

      @FrancesK

      En tout cas ils sont tous où se doivent tous d’être comme ça :

      https://m.youtube.com/watch?v=YvKJQVW0gUY


    • Shaw-Shaw #Shawford 12 juin 2018 17:43

      @Francisque A

      Puis tous comme ça quand j’aurai re synthètisé ma fratrie IRL for real :

      https://m.youtube.com/watch?v=eE45GT9Z9kE

      C’est donc pas le moment de mover, t’es tellement proche du nid, et même si ces oiseaux de feu mettent une éternité à arriver ! smiley


    • Shaw-Shaw #Shawford 12 juin 2018 18:02

      @Fransesca d’œuf

      En tout cas, si tu veux pas rester une zozo avachie jusqu’à de ta si éphémère vie, et veut voir pour de bon de l’autre côté du miroir, mon frérot est dentiste à St Luce en Martinique.

      Dans l’instant présent chaotique qui constitue notre univers commun tangible à tous les trois, il n’a strictement aucune idée de ce que je manigance dans cette dérisoire agora, pour ses yeux de sphinx.

      Mais je te garantie que tu le et te verras briller instantanément de mille feux au premier regard si tu te décides à te bouger ton booty !

      Donc une petite carie à soigner, ni vu ni connu, hop, et tu sauras. smiley


  • zygzornifle zygzornifle 13 juin 2018 14:00

    On peut leur filer des socialistes s’ils sont en rupture de stock ....


  • biquet biquet 13 juin 2018 16:48

    C’était déjà un slogan en 1972 :
    JE SUIS SOCIALISTE SUISSE
    Toutes tendances


  • julius 1ER 13 juin 2018 18:54

    les Dogmes Libéraux de M Friedman sont devenus indépassables ..... 


    et la Gauche bien entendu s’y est fourvoyée !!!
    alors que faire ??? comme disait Lénine 

    attendre le grand krach et remonter un Parti Bolchevik, car l’Histoire se répète c’est évident !!!

  • jean-jacques rousseau 14 juin 2018 01:25
    Beau texte. Une présentation assez didactique. Des enjeux clairement définis. La culture suisse francophone est bien défendue ici. Donnez-nous davantage de ces nouvelles.
    Merci. ***In memoriam 1476-1515***

  • toyet 14 juin 2018 09:44

    Les socialistes sont la 5 émes roue du capitalisme, seule une économie d’autosuffisance comme l’Autriche Hongrie ou le fascisme pourrait diminuer la force de l’argent donc des banques. Au vue du lessivage financier du peuple , le troc sera l’ultime solution pour survivre dignement.


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