vendredi 15 mars 2019 - par Paul ORIOL

Algérie : le Clan face à la vague

Algérie : le Clan face à la vague

Algérie : le Clan face à la vague

Le président Bouteflika n’existe pas ! Il n’est qu’un point d’équilibre, image encadrée nécessaire au maintien en place d’un clan familial, militaire, financier, vieillissant qui veille à assurer la continuité dans la défense de ses intérêts. Un groupe sans imagination réelle pour trouver le meilleur moyen pour que rien ne change. Un portrait, inanimé, sans voix depuis un accident ischémique transitoire sans séquelles de 2013, à la veille d’un quatrième mandat. Il a été hospitalisé le 24 février à Genève pour des examens médicaux périodiques.
Il est confronté, depuis le 22 février, à une contestation sans précédent depuis sa première élection en 1999, contre une éventuelle candidature à un cinquième mandat.
Sa candidature est cependant déposée, le 3 mars 2019, au Conseil constitutionnel, par son nouveau directeur de campagne, le précédent ayant été démis à la suite de propos malencontreux, reproduits dans la presse. A quelques heures de l'heure limite du dépôt des candidatures, montrant les incertitudes et l’absence de solution de rechange du Clan pour se maintenir en place !

Cette candidature n'a pas mis fin aux manifestations de rejet qui se sont poursuivies dans les rues d'Alger et d’autres villes d'Algérie.
D’où un premier bricolage : une lettre adressée à la nation, lue à la télévision. Le président Abdelaziz Bouteflika y explique avoir écouté et entendu le cri du cœur des manifestants, et leur inquiétude compréhensible. Malgré cela, il confirme sa candidature et s’engage, une fois élu le 18 avril, à ne pas aller au bout de son mandat et à se retirer à l’issue d’une présidentielle anticipée, à laquelle il ne serait pas candidat. Il promet également l’élaboration et l’adoption par référendum populaire d’une nouvelle Constitution. Il annonce que la jeunesse algérienne sera au cœur de ses priorités présidentielles, une révision de la loi électorale et une transmission générationnelle dans une Algérie réconciliée avec elle-même.
 

Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague

 

Encore un moment, Monsieur le Bourreau.

Par ailleurs, une requête a été déposée devant un tribunal suisse pour demander son placement sous curatelle ! La santé fragile de Bouteflika l'exposerait à être manipulé par son entourage. Il serait incapable de discernement... et tous ses actes, aussi bien le dépôt de sa candidature que les communiqués, ne seraient pas effectués par lui-même mais par son entourage politique et familial.

Candidat, Bouteflika courait plusieurs risques : que cette candidature soit refusée par le Conseil constitutionnel, que le candidat soit mis sous curatelle avant la date de l’élection et même, tous obstacles franchis, qu’il ne soit pas réélu !

Un nouveau bricolage a donc été mis au point : report des élections et prolongation du mandat ! Maintien au pouvoir du Clan sans élection !! Encore un moment... Mais est-ce possible aux yeux d’un Conseil constitutionnel même très dévoué ? Tandis que la rue continue à gronder joyeusement devant ces reculs successifs qui montrent bien le désarroi du Clan ?

Ces pitoyables manœuvres de retardement ont quelque chose de pathétique et de dangereux qui témoigne d’une incompétence du Clan à gouverner au niveau national et même à organiser une sortie pourtant largement, biologiquement, prévisible.

Et politiquement. Quel contraste entre la vieillesse du Clan et la jeunesse du peuple algérien, entre la décrépitude de son icône figée et la vitalité démographique d’un pays et de la jeunesse joyeuse des manifestants du vendredi dans les rues d’Algérie, entre l’isolement du Clan et la multitude qui s’affiche, entre l’absence de projet politique et le bouillonnement de la rue !
 

Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague

 

Tout a bien commencé mais tout reste à faire.

La mobilisation a été efficace à travers les réseaux sociaux. Venue, semble-t-il de nulle part. Ici aussi, en dehors des organisations sociales et politiques. Malgré un silence important des journaux télévisés. Tandis qu’une partie de la presse, El Wantan, Liberté, Le quotidien d’Oran, faisait largement son travail. Ainsi El Watan a consacré 7 ou 8 pages sur 24 aux événements d’Alger et des diverses villes du pays. Plusieurs jours de suite.

Désormais, le roi est nu, échec et mat. Mais les manifestants ne s’y trompent pas. Ils continuent de manifester. Il n’est plus question de Cinquième mandat. Mais de changer le système.

Les revenus pétroliers ont été utilisés pour apaiser les revendications sociales et neutraliser les revendications démocratiques. Énormes investissements dans les infrastructures. Dans le logement pour satisfaire la population, locataires, propriétaires, subventionnés : parcourir l’Algérie permet de voir les énormes chantiers de logements, en construction ou terminés mais vides, en attente d’attribution ou déjà habités… mais toujours insuffisants en nombre à cause de la démographie galopante… Énormes investissements et donc énormes commissions.

Investissements aussi dans l’enseignement qui forme des diplômés sans débouchés qui regardent à l’extérieur et descendent dans la rue… Tout le monde a noté l’importance de la jeunesse étudiante, et des jeunes femmes, dans les manifestations. Importance qui avait déjà été remarquée lors du printemps tunisien.

 

Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague
Algérie : le Clan face à la vague

 

Le peuple algérien a payé cher son indépendance (750 000 morts). Puis la décennie noire (200 000 morts). Le président qui voulait une Algérie démocratique, moderne, débarrassée de la corruption est resté en place six mois.

Une partie importante de ce peuple est aujourd’hui, pacifiquement, dans la rue. Tout le monde retient son souffle. Trouvera-t-elle une équipe efficace pour prendre le relais au niveau gouvernemental ? Pour fédérer tous ceux qui veulent un changement réel du pays ? Pour faire de l’argent du pétrole, non comme trop souvent, une malédiction mais le moyen d’entamer une politique nouvelle au profit du plus grand nombre ?

 



16 réactions


  • Clark Kent Arthur S 15 mars 2019 09:00

    Constat et analyse objectifs.

    Les données qui manquent aux observateurs (dont je suis) concernent les véritables liens qui unissent la France et l’Algérie, payx constitué d’anciens départements qui sont ni plus ni moins indépendants que les anciennes colonies.

    Le capital, la logistique militaire, les réseaux de distribution, la médecine et les médicaments sont toujours sous contrôle de l’ancienne « métropole » avec laquelle l’Algérie entretient des rapports plus qu’ambigus demiroir déformant et de relations basées sur le syndrome attirance/répulsion.

    Gagner du temps n’est peut-être pas seulement le souci du « clan », mais aussi celui de tireurs de ficelles qui ne sont pas sur le territoire algérien et sont tout autant dépassées par ce tsunami populaire que leurs marionettes.


    • Aristide Aristide 15 mars 2019 10:45

      @Arthur S

      Et donc, le responsable de cette situation ce serait cette « métropole » que vous ne nommez pas, la France quoi. Plus, voilà donc que le pouvoir algérien obéirait à des « tirreurs de ficelle qui ne sont pas sur le territoire algérien ». 

      Le système mafieux qui préside au destinée du peuple depuis l’indépendance n’est en rien responsable de la politique catastrophique des gouvernements algériens.

      Voila donc désigné notre pays désigné comme vrai responsable des malversations, du pillage systématique des ressources par une minorité au pouvoir.


    • Clark Kent Arthur S 15 mars 2019 11:44

      @Aristide

      Le système mafieux qui préside au destinée du peuple depuis l’indépendance est totalement responsable de la politique catastrophique des gouvernements algériens.
      Ce système est-il plus indépendant de la mafia française que la mafia française est indépendante de la mafia américaine ?
      Dans le commentaire précédent, la France est clairement désignée dès la première phrase.


    • Aristide Aristide 15 mars 2019 11:51

      @Arthur S

      Tout est dans tout et inversement.

      Serait-ce donc qu’il n’y ait aucune responsabilité algéreinne dans cette affaire ?


    • Clark Kent Arthur S 15 mars 2019 12:00

      @Aristide

      continuez à faire l’andouille, vous le faites bien, moi j’arrête, ça fait longtemps que les jeux de cons ne m’amusent plus ! ciao


    • Aristide Aristide 15 mars 2019 12:50

      @Arthur S
      Bonne bourre ...


  • Hijack Hijack 15 mars 2019 13:45

    Pour une fois, quelqu’un parle de l’Algérie ... en la connaissant, merci à l’auteur.
    Même les photos proposées, sont parlantes.

    Une petite erreur, selon diverses analyses, contrairement à ce qu’annonce Wiki, le nombre de morts dans la population algérienne entre 54 et 1962 serait sensiblement deux fois plus qu’annoncé (1/10ème de la population à cette époque selon diverses statistiques internationales), mais peu importe, en tant qu’ algérien d’origine, je le précise, le passé est ce qu’il est, ce qui compte c’est bien l’avenir.

    Pour la situation actuelle ... Jamais ce beau et grand pays n’avait connu un tel état de délabrement ... je tire mon chapeau à la jeunesse, au peuple en général ... et aux forces de l’ordre, qui ont été d’une sagesse plus qu’inattendue. Au début, je m’attendais au pire ... mais vite rassuré.

    J’ignore ce qui a fait que ce peuple si chaud habituellement, se soit calmé à ce point ... que l’armée ou la police très répressifs habituellement ... et les nerfs à fleur de peau ... presque un reflet du mouvement G.J en France (dois-je le souligner, les jeunes du bled ont tous de la sympathie pour le mouvement jaune français) ... Aussi, c’est connu au bled, il y a rarement de la casse par des racailles, car vite contrôlés.

    .

    Quoi qu’il en soit ... Boutef annule sa candidature ... mais prolonge son mandat (faudrait penser à le lui faire savoir ... hein ! Je dis ça à son entourage).

    Bref ... perso, ce que je craignais, c’était un nouveau mandat Boutef et que ce dernier meure durant sa présidence ... dans ce cas, la réaction du peuple algérien aurait été incontrôlable.
    Enfin, ravi que dans leurs manifs, qu’il n’y a pas eu d’islamistes, de séparatistes ... vu bcp de filles sans voile.

    Ravi que les partis séparatistes (RCD, FFS) n’ont pas de candidats aux élections. J’ignore ce qu’il va advenir à l’Algérie, mais manifestement la jeunesse semble être très éveillée, logiquement, politiquement.

    Bravo aux algériens de s’être enfin réveillés ... bon courage pour la suite.


    • Hijack Hijack 15 mars 2019 21:40

      @OMAR

      Salut ! ... Oui, la jeunesse du bled a compris ce dont bcp dans le monde ... ne les croyaient pas capables.

      En reflet des G.J en France, il y a une intelligence globale qui ressort de ce mouvement algérien.

      S’il y a des islamistes en fond sonore et quelques séparatistes (pro Bhl) ... peu d’algériens tomberont dans leurs pièges.
      Merci pour l’article ... je vais voir.


    • V_Parlier V_Parlier 16 mars 2019 11:55

      @Hijack
      Pour être sûr du discernement des contestataires il faudra voir comment le sujet sera traité par la presse atlantico-mondialiste. Si elle en dit du bien ce sera mauvais signe.


    • Hijack Hijack 16 mars 2019 14:55

      @V_Parlier

      J’apprécie cette vision, pas conne du tout ! Mais ... faut se rassurer que Macron avait soutenu de la candidature de la momie Boutef. La presse de l’Empire ne peut que saluer la sérénité des manifs d’un peuple échaudé, car elle ne peut faire autrement.


    • Mamek 17 mars 2019 14:34

      @Hijack

      Vous dites :
      « Ravi que les partis séparatistes (RCD, FFS) n’ont pas de candidats aux élections. » 

      svp, voulez vous développer... 


    • Hijack Hijack 19 mars 2019 02:25

      @Mamek

      J’espère qu’ ils ne vous manqueront pas ?

      Après le FFS, le RCD boycotte la présidentielle ... 


  • Mohammed MADJOUR (Dit Arezki MADJOUR) Mohammed MADJOUR 15 mars 2019 18:37

    Moi je n’aurais pas affiché les brouillons de « Liberté » ou « d’El Watan » qui sont aussi responsables que le régime hors la loi : Ces journalistes travaillent pour l’Empire financier qui veut prendre la place de l’autre Empire financier déjà installé ... C’est plus que limpide !

    Lors du désordre arabe ils avaient reçu des centaines d’écrits et de articles qu’ils avaient refusés de publier ... Ils ont même fini par me bloquer sur leurs sites Web.

    C’est depuis 2007 que j’avais proposé la TRANSITION dont les écrits et les explications sont dans mes 700 articles. Ces journalistes hypocrites et faussaires avaient tout fat pour contourner ma proposition et même de la déformer  : AUJOURD’HUI ILS SONT LES VRAIS COUPABLE DE L’ÉCHEC !

    Connaissant la nature du régime, je sais ce qu’ils peuvent bien « s’en aller » après avoir dévalisé le pays... Qui pourra alors endosser toutes les énormités commises depuis 1980 à ce jour ? 

    Dans la TRANSITION que je propose : https://t.co/FdrTZvNqbC 

    Je précise bien que c’est aux membres du régime de la décider,de la sécuriser et d’assurer sa réussite pour qu’enfin ils puissent dégager ! Ce que les revendications de ces derniers jours ne comprennent pas. 

    D’autres précisons : Voir ma réaction à l’article : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/destabilisation-de-l-algerie-213460#forum5449375


    • Jonas 16 mars 2019 12:41

      @Mohammed MADJOUR

      , Vous avez été un critique acerbe du régime Algérien et de ses dérives depuis fort longtemps . Vous n’êtes pas un ouvrier de la 25eme heure, comme beaucoup, ici, et notamment les journaux que vous citez. Je vous rends justice , ici. de votre clairvoyance. Il ne faut jamais avoir raison avant les autres.

      Beaucoup des thuriféraires et flagorneurs de Boutéflika et de son clan , ont oublié leurs écrits et ont vite retourné leur veste.

      Par charité chrétienne , je ne citerai pas leur nom , ils se reconnaîtront et ils sont nombreux.


  • Jonas 16 mars 2019 09:30

    A l’auteur.

    Comme beaucoup d’internautes d’AgoraVox de la 25eme heure , vos yeux ce sont décillés , depuis le 22 février 2019.

    Avant cette date , vous et beaucoup d’internautes d’AgoraVox , vous viviez dans le déni de la réalité , de la vie politique, sociale et économique de l’Algérie. Boutéflika , était intouchable,aujourd’hui , qu’il est a terre , vous voilà sorti de votre long sommeil , depuis 1999.

    J’ai des années durant , sur ce site décrit , la main du régime et de son clan , sur le pouvoir et la chape de plomb étendue sur toute l’Algérie. C’est toujours plus facile de prendre le train en marche et de critiquer aujourd’hui Boutéflika. Le courage s’était de le faire avant. Combien étaient-ils , avant février 2019 ?

    Mais attention de ne pas s’emballer , parce que quelques millions d’Algériens sortent manifester . L’expérience des « printemps arabes » doit inciter à la prudence. Pour Egypte. la presse bien-pensante ne cessait de signaler, que les égyptiens , cherchaient la liberté , la preuve, ils ne brûlaient pas les drapeaux , israélien et américain , et que les égyptiens , scandaient , liberté ! liberté ! ., pas d’islamiste a l’horizon , pas de slogan religieux etc. la suite est connue. Il ne faut jamais oublier , que c’est le monde arabo-musulman. Donc , il est urgent d’attendre , avant de se prononcer sur la fin. 

     


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