Après les dégage, terroristes et niqab, la Tunisie respire
La Tunisie verra-t-elle enfin le bout du tunnel, deux ans après sa révolte devenue révolution, symbole des printemps arabes qui s’en suivirent ? Vendredi 25 novembre 2013 le gouvernement présidé et composé en majorité absolue (à une exception près) d’islamistes ayant conduit le pays au bord du gouffre et de la misère (320.000 familles tunisiennes seraient actuellement sans aucune ressources selon une toute récente étude), a annoncé dans un très bref communiqué sa « démission dans trois semaines », alors que la veille, plusieurs manifestations de rue, hostiles à son égard s’étaient déroulées sur tout le territoire. Ce délai qui aurait dû débuter l’avant-veille, lui avait été imparti par ce que l’on a appelé à Tunis « la feuille de route », initiée et rédigée par le « quartet » composé de formations apolitiques, l’UGTT (Syndicat ouvrier), l’UTICA (Syndicat patronal), l’ordre des Avocats et la Ligue des Droits de l’Homme.
Une « route » longue de trois à quatre mois, qui, trois semaines après la démission annoncée, doit conduire à la formation d’un nouveau gouvernement composé d’experts apolitiques, puis l’adoption (avec plus d’un an de retard) de la nouvelle Constitution (en panne en ce moment pour ses trop nombreuses références à l’Islam), finalisée par les politiques après avis et corrections de juristes confirmés et indépendants et enfin une loi électorale permettant de choisir une commission indépendante qui fixera le calendrier et organisera de nouvelles élections générales.
En deux ans, les dirigeants tunisiens parmi lesquels les islamistes dominaient ont annoncé une multitude de calendriers d'adoption de la Constitution et de rendez-vous pour ces fameuses prochaines élections qui étaient devenues les « arlésiennes » d’une politique de débutants ridicules, aucune de ces annonces n’ayant été respectée.
Il se peut que ce chemin devienne un peu plus long que prévu, compte tenu des atermoiements du parti islamique Ennahda qui s’était emparé du pouvoir en 2011 à l’issue d’élections libres, boudées par plus de la moitié d’un corps d’électeurs devenus abstentionnistes par ignorance totae de la politique et de ce genre de scrutin. Chemin plus long car, pour entamer la feuille de route, le dialogue national qui doit débuter entre les principales formations politiques actuelles d’opposition (réunies dans un « front du salut ») et Ennahda, désavoué de plus en plus par les citoyens, risque d’être semé de palabres incessants, d’embûches religieuses et même d’orages.
Financée en grande partie, sinon en totalité, par le Qatar, dirigée par Rached Ghannouchi son leader septuagénaire qui avait promis « un 6° Califat » en Tunisie à un djhiadiste convaincu de longue date, activement recherché pour meurtres et chef d’une organisation jugée terroriste (Ansar Charia), cette formation n’a cessé en près de deux ans d’accumuler par son laxisme – ou sa volonté – désastre économique après désastre et surtout impunité totale envers des groupes salafistes ayant notamment organisé et exécuté l’assassinat de deux députés de l’opposition, l’attaque de l’ambassade des Etats Unis et surtout, récemment, la mort de plusieurs gardes nationaux (l’équivalent de gendarmes en France) tués au cours d’embuscades ou de luttes contre des groupes de terroristes armés.
S’ajoutant au désarroi du peuple et sa colère devant l’inflation galopante, c’est ce ras le bol du corps sécuritaire qui, lors des obsèques nationales organisées pour l’assassinat de quatre de ses membres, que « Dégage ! » ce fameux cri devenu célèbre à travers le monde voilà deux ans, a fusé des rangs des militaires à l’adresse des Présidents du pays (République, Assemblée Nationale et Gouvernement). Ce cri a valu à des responsables syndicaux de la police et de la Garde Nationale d’être mis « en arrêt de travail » par le Gouvernement… démissionnaire et chargé depuis vendredi d’expédier comme il se doit les affaires courantes.
Lors de cet incident de lèse majesté enregistré par micros et caméras des journalistes, un seul officiel avait été épargné par les mutins, le Ministre de l’Intérieur, leur patron, un spécialiste ne militant pas pour le parti religieux. Depuis sa nomination il avait réorganisé tous les services sécuritaires les purgeant des membres ayant des attaches avec Ennahda, créant le corps des « forces spéciales » et menant très vite une lutte féroce contre les extrémistes religieux et les terroristes terrés dans le centre du pays et à la frontière avec l’Algérie.
Résultat ? En quelques semaines, des centaines de salafistes appréhendés, des dizaines de terroristes tués, qssassins identifiés, un des dirigeants charismatiques de Ansar Charia arrêté, nombre d’armes et de documents récupérées, des projets d’attentats déjoués, notamment contre des casernes ainsi que la disparition progressive dans les rues… des barbus et surtout du niqab. A Kairouan, ces deux attributs ont conduit jeudi à la perte de ceux qui les portaient, dans un scénario qui n’est pas sans rappeler celui qui s’était passé à Bizerte voilà plusieurs semaines. Ce jour là grâce à l’intuition d’une vieille femme, la police s’était saisie d’un homme recherché par la police qui circulait revêtu du niqab tout comme les deux jeunes femmes qui l’accompagnaient.
A Kairouan, c’est lors d’un contrôle routier, que la police judiciaire a appréhendé un quatuor roulant dans un véhicule tous terrains. A son bord, deux hommes barbus dont un congolais et deux femmes dont une de nationalité française, entièrement revêtues du niqab. Mais également des « uniformes militaires, des ordinateurs portables, des détonateurs d’explosifs à distance et des documents salafistes. Barbus et « niqabées » appartiendraient eux aussi à Ansa Charia.
La Tunisie commence peut-être à mieux respirer. Inch’Allah !