lundi 20 mars 2017 - par Thomas Roussot

ARES, le fichage des récalcitrants

En mai 2012, sur ordre étatique, la préfecture de police de Paris a lancé un fichier qui ne relève pas exactement du registre paroissial, joliment dénommé ARES (Automatisation du registre des entrées et des sorties des recours en matière de contravention).

En quoi consiste officiellement ce fichage ? Recueillir les identités des automobilistes contestant leurs contraventions afin…de faciliter leurs démarches et de fluidifier les processus administratifs !
L’idée que la Police facilite la condamnation éventuelle de leurs collègues chargés d’administrer cesdites amendes relève plus d’un numéro du cirque Pinder que de l’exercice raisonnable de la logique la plus élémentaire.

Quand un processus administratif entre en rupture avec l’article XV de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, votée par l’Assemblée constituante le 26 août 1789 (« La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration »), et pointe très directement contre la protection du droit à la vie privée, il faut s’interroger sur la configuration politique qui sous-tend une telle mutation. Pris isolément, un tel exemple peut sembler parfaitement insignifiant rapporté à l’aune de régimes classifiés comme totalitaires par de belles âmes ignorant superbement ce qui se déroule sous leurs fenêtres par trop familières…

Pourtant, c’est au détour de telle anomalies légales et à ce titre anonymement distillées au sein d’une quotidienneté de plus en plus recouverte d’opacité que se dévoilent des volontés politiques d’un genre tout particulier. D’un genre qui se dissimule et travestit les usages pour mieux assoir son emprise ferme et discrète sur les comportements les plus triviaux comme ceux qui régissent la vie de la chaussée.

Responsabiliser les conducteurs demeure une nécessité vitale tant les français manquent cruellement d’auto-discipline (ce qui explique le taux d’accidentologie anormalement élevé dans ce pays), mais cela ne pourra jamais se réaliser sainement et efficacement à leur insu, ou pire, contre leur sens des responsabilités. Tant au niveau comportemental que cognitif, cette mesure viole les libertés individuelles et va à l’encontre des lois nationales et européennes sur la législation ayant trait aux données personnelles. Cette réactualisation des règles communes, si tant est qu’elle soit nécessaire, devrait se décider de façon transparente et concertée, donc en impliquant les premiers concernés que sont les automobilistes. Puisque tel n’est pas été le cas, il y a de quoi s’interroger de façon très dubitative sans être dans le même temps taxé de « complotiste », ce concept disqualifiant et tarte à la crème utilisé de nos jours pour évacuer toute problématique sociétale plus ou moins sensible.
 

Une telle procédure de fichage permet d’établir une sorte de carte de France des récalcitrants, et à plus long terme, un contrôle accru de leurs faits et gestes. Vouloir conjurer administrativement et quasiment en secret une contestation citoyenne d’échelle microscopique en dit long sur la fébrilité de l’ordre institutionnel en place (il faudrait à cette occasion s’interroger plus avant sur la nature exacte de cette fébrilité).
Si l’on dépossède un conducteur de sa faculté de contestation pour l’ausculter à l’aune de critères strictement répressifs, qui ne font aucune place à sa capacité propre d’amélioration des conditions d’usage sus-visées, justement en usant de sa capacité à contester, l’on clôt l’avenir de la circulation elle-même en une boucle mortifère d’automatisation des comportements, de soumission stupide parce qu’impensée à des normes tout particulièrement discutables. Les véhicules sans conducteurs ne feront qu’accélérer ce gigantesque programme de déshumanisation routière…  

Les conditions de circulation ont toujours relevé du contrôle étatique, de la surveillance et des sanctions, de ce point de vue, rien de neuf sous le soleil, mais ce qui fait toujours cruellement défaut à cet univers secondairement mécanique est la consultation plus rigoureuse et respectueuse de ses usagers. Entre l’ubérisation généralisée et un étatisme monolithique, manque l’intelligence proprement citoyenne de ce qui advient sur les routes.

Une population qui ne se soucie pas du sort de sa maréchaussée ne mérite pas de la traverser.
 
De facto, cette collecte policière n’a apparemment qu’un but, ficher les conducteurs récalcitrants afin de dresser une base de données visant tous les citoyens potentiellement contestataires à l’égard de l’autorité publique. Certes, en y regardant de plus près, l’on pourrait y trouver on ne sait quel apprenti-terroriste, comme tout récemment cet habitué du car-jacking qui justement, a entamé sa dérive en se heurtant à un contrôle routier. De fait, cette affaire démontre s’il en était besoin l’inutilité de ce genre de process pour anticiper de tels passages à l’acte. Bien au contraire, cette approche suspicieuse de l’automobiliste moyen ne peut qu’entraîner la défiance et l’irresponsabilité sous-tendues par un climat de peur. Seule une bonne éducation routière, une bonne mentalité citoyenne, une bonne coopération sociale peuvent réguler les excès humains ici ou ailleurs. Des radars de papier ne feront pas mieux que ceux de métal.
Cette propension à intimider le citoyen lambda dans l’exercice de ses droits fondamentaux est la marque des régimes non démocratiques.
Orwell en avait rêvé, le « règne » Hollande l’aura réalisé.
 http://www.caradisiac.com/Fichier-ARES-ceux-qui-contesteront-leurs-contraventions-vont-etre-fiches-77396.htm



1 réactions


  • La Dame à la licorne Jélaniac 20 mars 2017 14:37

    Une population qui ne se soucie pas du sort de sa maréchaussée ne mérite pas de la traverser.
    lol.
     tout ce bazars pour quelques cons c’est surdimensionné,les bons conducteurs sont un majorité ,heureusement ,il faudrait additionner les Km parcouru pas nos concitoyen,pour avoir une idée .


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