jeudi 21 mars 2013 - par scripta manent

Bruno Le Maire veut « une autre Europe » : la même !

Dans un entretien accordé au Monde en date du 9 mars 2013, Bruno Le Maire s’est exprimé comme suit : « Les peuples européens sont en détresse. (…) Et que fait l'Union européenne ? Elle oppose sa splendide indifférence. Son attitude nourrit le populisme. Pour sauver l'Europe, il faut une autre Europe. »

 On est tenté d’applaudir à cette déclaration d’un ancien secrétaire d’Etat aux Affaires européennes (décembre 2008 - juin 2009), mais on fait bien d’attendre car Bruno Le Maire ajoute : « Nous devons avoir pour obsession de faire réussir la France dans la mondialisation ».

Or, que fait l’Europe depuis maintenant trois décennies ? Elle s’emploie avec ardeur à la propagation de la mondialisation dans sa version ultralibérale (libre-échange inconditionnel, libre circulation des capitaux, dérégulation…), laquelle a précisément contribué largement à la « détresse des peuples européens ».

 De façon générale, les « obsessions » sont rarement de bon conseil. Si Bruno Le Maire souhaite véritablement « une autre Europe », il devrait pour commencer ne plus être un « béat du libre-échange » (pour reprendre la jolie formule d’Arnaud Montebourg, en réponse aux objurgations de Pascal Lamy), « obsédé » par la mondialisation.

 Notons d’ailleurs que Laurent Wauquiez, tout aussi UMP, normalien, énarque - et ancien ministre des Affaires européennes (novembre 2010 - juin 2011) - que son collègue, n’appartient pas, lui, à la cohorte des béats. Le 18 décembre 2011, il a déclaré au journal Le Monde : " Il faut tourner la page de l'époque où la droite et le centre clamaient " Vive le libre-échange " en croyant qu'il allait produire un monde meilleur. " Comme quoi, formés dans le même moule et confrontés aux mêmes réalités, on peut aboutir à des conclusions inverses.

 En vérité, ce n’est probablement pas le fond de l’affaire qui motive à ce point Bruno Le Maire. Le reste de l’entretien fait en effet apparaître que son obsession n’est pas tant l’Europe, ni même la France, que celle de se manifester politiquement ce qui, pour certains, passe plus par la critique systématique du camp d’en face que par le souci du bien commun.

L’essentiel est de pouvoir placer : « François Hollande (…) est comme Godot. Il attend que la croissance revienne (…). Il est incapable de redéfinir notre modèle, et nos partenaires le sentent. Aujourd'hui, la France est sur un strapontin en Europe. (notons au passage que Bruno Le Maire maltraite aussi ses classiques : dans la pièce de Samuel Beckett, ce n’est pas Godot qui attend, ce sont les autres qui ne le voient pas venir.)

 Si la France est sur un « strapontin » en Europe, ce qui reste à démontrer, ce n’est pas parce que François Hollande ne partage pas les obsessions de Bruno Le Maire, c’est parce qu’il semble avoir renoncé à les mettre suffisamment en cause, après une campagne présidentielle et un début de mandat qui lui avaient pourtant permis de mobiliser quelques énergies en faveur … d’une « autre Europe ».

www.citoyensunisdeurope.eu



19 réactions


  • Capone13000 Capone13000 21 mars 2013 14:25
    C’est précisément ce que dit François Asselineau :

    Recette pour neutraliser la colère des Français : la promesse de l’Autre Europe depuis un tiers de siècle : http://www.u-p-r.fr/dossiers-de-fond/autre-europe


  • Lieutenant X 21 mars 2013 14:31

    Lorsque je vois l’ingérence et l’interventionnisme chaotique de l’Etat, je me demande quand même où sont passés les « méchants » libéraux. Pas en France en tout cas et encore moins dans les médias.

    Mais sinon, d’accord pour une autre Europe.

    • scripta manent scripta manent 21 mars 2013 18:51

      @ Lieutenant X

      Où sont passés les libéraux ? C’est simple : ils sont au pouvoir, que les gouvernements soient de gauche ou de droite.
      Il ne faut pas confondre agitation gouvernementale et véritable pouvoir. L’Etat a perdu le pouvoir de contrôler ses frontières (marchandises et capitaux) et le pouvoir monétaire (indépendance des banques centrales, change). Il n’est donc plus maître sur son territoire. Ses moyens financiers ne servent plus à mettre en oeuvre une politique. Ils servent à tenter de corriger, à grands frais, les déséquilibres et injustices générés par la dérégulation forcenée des 3 dernières décennies.


  • pidgin 21 mars 2013 20:12

    @ scripta manent

    Certes, du fait de la mondialisation, l’État n’est plus maître des enjeux économiques et sociaux sur son territoire.
     Si l’Europe y a contribué, c’est en trahissant les valeurs qui l’ont fondée. Quand je dis l’Europe, ce sont les idées néo-libérales qui lui ont imposé leur tempo en faisant prévaloir la méthode de décision intergouvernementale aux dépens du Parlement et de la Commission.
    Il « suffit » (nyaka) de remettre l’Europe sur ses rails et les efforts du Parlement européen sont encourageants.
    D’accord pour restaurer le contrôle aux frontières de l’Europe, et pour restaurer le pouvoir monétaire de façon coordonnée en Europe, loin de l’illusion souverainiste créatrice de concurrence mortifère entre les États et de conflits destructeurs entre les citoyens.


  • BA 21 mars 2013 22:06

    Jeudi 21 mars 2013 :

     

    Chypre : l’Union Européenne craint une fuite de capitaux de 30 milliards d’euros.

     

    Lorsque les banques rouvriront la semaine prochaine, dans le cadre d’un « plan B » acceptable par toutes les parties, les non-résidents mais aussi certains résidents chypriotes pourraient vouloir transférer leurs avoirs sur des comptes à l’étranger.

     

    L’Europe a fait ses calculs. Son « erreur de communication » sur le plan de sauvetage chypriote - c’est ainsi que le président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem l’a qualifié - devrait lui coûter 30 milliards d’euros. Cette somme correspond à la fuite de capitaux redoutée.

     

    http://www.lefigaro.fr/mon-figaro/2013/03/21/10001-20130321ARTFIG00595-chypre-l-ue-craint-une-fuite-de-capitaux-de-30milliards.php

     

    On voit maintenant qu’il n’y a pas 36 solutions :

     

    1- Première solution : les dirigeants européens violent les traités européens.

     

    Les dirigeants européens imposent un blocage des capitaux à Chypre.

     

    Problème : les traités européens interdisent absolument toute restriction à la libre-circulation des capitaux. La libre-circulation des capitaux est gravée dans le marbre des traités européens.

     

    2- Seconde solution : les dirigeants européens respectent les traités européens.

     

    Les dirigeants européens laissent sortir les capitaux hors de Chypre dès la reprise des activités bancaires mardi 26 mars, à minuit une.

     

    Problème : les capitaux sortiront par dizaines de milliards d’euros hors de Chypre, dès mardi, à minuit une !

     

    Je recopie une dépêche AFP :

     

    « Les autorités chypriotes ont trois choses à faire d’ici mardi : présenter un plan B crédible et viable pour remplacer le plan de sauvetage rejeté par le Parlement, instaurer un blocage sur une longue période des capitaux placés dans les banques, et préparer la fusion entre les deux principales banques en difficultés, a expliqué cette source sous couvert de l’anonymat. Le risque sinon est une sortie de Chypre de la zone euro, a-t-il averti. »

     

    Quelles seraient les conséquences concrètes de cette seconde solution ?

     

    Faillite des banques chypriotes.

     

    Et ensuite sortie de Chypre de la zone euro.


  • mario mario 22 mars 2013 00:31

    belle Europe ! vive Europe !

    avec ses rois et ses reines contes barons et ducs et lords, paradis fiscaux , amis ,frères, ennemis ,concurrents ,anciens riches, nouveaux pauvres , des droites et même très.. des gauches et même très...pales, protestants,juifs,musulmans,chrétiens, bouddhistes,etc.....bref.

    tous cela pour une seule chose :

    l’euro !

    parce que sans la création de l’euro, jamais il n’y aurait eu de crise .......financiere !

    quoi j’invente ?


  • lloreen 22 mars 2013 10:47

    L ’imposture dévoilée et les solutions préconisées.

    http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=T2aif0Wk9E0

    Vous comprenez parfaitement pourquoi rien ne change jamais...
    A nous d’ y remédier.


    • scripta manent scripta manent 22 mars 2013 11:09

      L’imposture, la conspiration, le grand secret, le complot ...
      Il y a aussi des charlatans, qui débitent leurs fadaises, dans diverses langues et notamment en anglais.


  • BA 22 mars 2013 13:04
    Jeudi 21 mars 2013 :

    17:06

    L’Europe s’attend à une fuite de capitaux de 30 milliards d’euros.

    L’Europe a fait ses calculs. Lorsque les banques chypriotes réouvriront, mardi, les responsables européens s’attendent à une fuite de capitaux de 30 milliards d’euros environ, en quelques jours.

    Cette somme correspond aux avoirs détenus par les non résidents (individus ou sociétés ; russes ou britanniques) dans les banques de l’île estimés à 30% des dépôts évalués à 70 milliards d’euros, soit 20 milliards d’euros.

    Il faut y ajouter 10 milliards d’euros que les résidents chypriotes voudront, par précaution, retirer en liquide ou transférer sur des comptes à l’étranger. C’est plus que les 10% de fuite de capitaux évoqués par le gouverneur de la Banque centrale chypriote en début de semaine. C’est pourquoi l’Europe veut imposer une limitation des mouvements de capitaux, dans le cadre du « plan B » chypriote.


    Le problème de Chypre sera résolu, d’une façon ou d’une autre, à partir de mardi 26 mars.

    C’est mardi 26 mars, à minuit une, que les activités bancaires reprendront, à Chypre.

    Concrètement : c’est à partir de ce moment précis que les gigantesques ordres de virement passés par les épargnants se réaliseront.

    C’est à partir de ce moment précis que nous assisterons à un spectacle tragique : une île va se vider de ses capitaux.

    Quel sera le résultat de cette énorme hémorragie ?

    Et, surtout, comment ravitailler tous les distributeurs automatiques de billets dans l’île de Chypre ?

    Est-ce que les pays européens du nord donneront des milliards d’euros à Chypre, en établissant un pont aérien, avec des avions chargés de billets en euros ?

    Est-ce que la BCE lancera ses rotatives à plein régime, avec là-aussi un pont aérien pour ravitailler l’île de Chypre, avec des avions chargés de billets en euros ?

    Est-ce que la Russie sauvera Chypre en échange de ses gisements de gaz ? Vendredi, on apprenait que la Russie a refusé.

    Ou alors est-ce que Chypre deviendra indépendante et commencera à imprimer sa propre monnaie nationale ?

    On va voir.


  • Ricquet Ricquet 22 mars 2013 14:27

    « Pour sauver l’Europe, il faut une autre Europe. »

    Bruno Le Maire, veut une autre Europe : il n’a qu’à la repeindre en rouge.
    Faire diversion en changeant la devanture étant la spécialité de ces bougres.
    Toujours la forme à minima, (on ne change que les hommes) mais jamais le fond.
    Pourquoi rouge ? Disons que c’est aussi la couleur des cardinaux en costumes.

    Si les abattoirs avaient des fenêtres, tout le monde serait végétarien." 
    (Paul McCartney)
    Si l’Europe et la mondialisation avaient des vertus, tout le monde le saurait et tous les médias s’en féliciteraient. (c’est tout dire.)


    • scripta manent scripta manent 22 mars 2013 14:38

      @ Ricquet

      Joli !
      Mais je ne suis qu’à moitié d’accord avec vous :
      - je ne vois guère de vertus à la mondialisation ultralibérale ;
      - par contre, j’en vois beaucoup à la construction européenne, même si je vous accorde bien volontiers que l’UE s’emploie à les dissimuler depuis une vingtaine d’années. 


    • Ricquet Ricquet 22 mars 2013 15:29

      « par contre, j’en vois beaucoup à la construction européenne »

       ?
      Par exemple...
      Dites moi, ce qui en vertu de l’U.E., a été réalisé, qui n’aurait pu l’être en dehors ?
      • Synergie ? 
      • Harmonisation ?
      • Echanges ?
      L’argument que l’euro protège est discrédité par des contre exemples...
      L’Europe, c’est le vol de la démocratie aux peuples et l’aliénation des états.


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