samedi 4 avril 2015 - par Séraphin Lampion

C’était quand, le commencement de la France ?

L’INRAP a publié en 2012 un livre - La France racontée par les archéologues - qui pourrait remplacer les manuels scolaires chargés de couches successives d’idéologies qui ont formaté nos pères et nous ont formatés.

L’histoire racontée par les archéologues est en effet assez différente de celle que contiennent les manuels scolaires depuis Lavisse. Du néolithique à l’époque contemporaine, les 200 sites de fouilles livrent une vison nouvelle concernant le du territoire sur lequel s’étend aujourd’hui notre pays.

 L’archéologie remet en cause les idées reçues et les clichés qui ont la tête dure.

  • Les hommes « préhistoriques », terme flou amalgamant plusieurs millénaires et des populations hétérogènes n’étaient pas « des sauvages » survivant péniblement en milieu hostile.Ils vivaient bien dans leur environnement et mangeaient une nourriture saine qu’ils se procuraient grâce à des techniques complexes.
  • Les Gaulois n’étaient pas des barbares, mais constituaient une société urbaine avec des états, une économie et des systèmes monétaires
  • Les invasions « barbares » n’ont jamais été la vague destructrice décrite par les historiens influencés par la renaissance italienne
  • Le Moyen-Age n’a pas été une période d’obscurantisme mais l’époque de la première révolution industrielle.
  • Et le territoire de la France actuelle, situé à la pointe occidentale du continent euro-asiatique a été continuellement une terre d’immigration.

Non seulement les périodes anciennes où les textes faisaient défaut ont été décrites avec beaucoup de fantaisie, mais celles dont l’histoire avait été écrite surtout sur la base de textes épars et peu nombreux nous sont présentées par des groupes sociaux réduits, souvent religieux et exclusivement masculins, dont l’objectivité n’était pas le souci premier.

On sait maintenant que le néolithique – et surtout l’agriculture – n’ont pas été inventés sur place ce qui confirme le résultat de fouilles menées au Proche Orient. Il s’agissait d’un double mouvement de colonisation, en provenance du Proche-Orient :

- l’itinéraire nord ,via les Balkans et le Danube a franchi le Rhin il y a 7000 ans environ

- l’itinéraire sud, via les côtes de Méditerranée, est arrivé il y a 7600 ans en France

Les chasseurs cueilleurs ont alors été submergés, leur nombre est estimé à quelques dizaines de milliers, contre environ deux millions d’agriculteurs lorsqu’ils parviennent à occuper l’Europe.

Les traces laissées par cette extension permanente permettent de mieux connaitre leur mode de vie, les premières implantations, l’organisation des villages, les traces matérielles des croyances… Dès qu’un village voyait sa population passer les 200 personnes, une partie s’en séparait pour aller fonder une nouvelle implantation, au détriment de la forêt, sans doute pour conserver un modèle social, assez homogène avec peu de différences de richesses et de statuts entre groupes et individus et qui aurait été menacé par une population trop dense.

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D’où un étonnant conservatisme social et technique, avec les mêmes plans de maison, les mêmes types de décors de Kiev à Brest, alors qu’il n’y avait pas la moindre unité politique. Le village néolithique regroupait des maisons rectangulaires en bois et terre, qui pouvaient aller jusqu’à 40 mètres de long. Une économie basée sur le blé, l’orge, les lentilles, le porc, la chèvre, le mouton, le bœuf et le chien.

L’apparition de clivages sociaux semble correspondre à des évolutions démographiques très fortes et à l’apparition des agglomérations dès les débuts du néolithique au Proche Orient. Les premiers points de fixations s’effondrent puis les gens se dispersent dans toutes les directions. Sauf dans les régions – Mésopotamie, Égypte – où une sorte « d’effet nasse », car les populations sont cernées de déserts ou d’eau, provoque l’apparition des premières villes, des premières stratifications sociales et des États. En Europe, cela va être beaucoup plus lent et progressif… car l’effet nasse ne se fait sentir que lorsque les agriculteurs viennent buter sur les « finisterres » (Portugal et Bretagne) et l’océan Atlantique.

On peut lire l’expansion néolithique en Europe comme la volonté des hommes d’échapper au piège social d’une densité démographique trop forte pour s’accommoder d’une grande égalité.

Ce n’est donc pas un hasard si les premiers sites où apparaissent des différenciations sociales fortes – avec les dolmens qui sont des tombeaux monumentaux – surgissent le long de l’Atlantique… et le long de la mer Noire, là où la densité de population est la plus forte. Ni que l’on observe des effondrements de la civilisation mégalithique au bout de quelques siècles, comme si les hommes ne supportaient plus cette stratification.

Pour imposer la servitude – nécessaire pour que riches et dominants existent, ils ont besoin d’accaparer la production d’autrui – il faut qu’elle soit en grande partie volontaire. Le dominé doit montrer un certain enthousiasme à l’être. L’archéologie des 20 dernières années a permis de suivre la mise en place de ces systèmes.

Les dolmens de pierre ont été précédés de tombes moins spectaculaires en bois et terre dont les traces ont été retrouvées et datées. Elles montraient une première différenciation sociale

Le site de Carnac montre bien qu’avant d’aligner des menhirs, les hommes ont construit des tertres en terre. Reste à expliquer pourquoi certains hommes ont voulu être plus puissants et riches que d’autres. Et comment la manipulation de l’imaginaire a pu être aussi efficace. Comment l’idée que le chef et exploiteur avait un destin spécial après la mort, qu’il bénéficiait d’une essence différente – comme le Pharaon dont les rituels sont nécessaires à la crue du Nil – d’une relation spéciale avec le surnaturel et les dieux, a pu être imposée mais aussi partagée par les dominants et les dominés. La dialectique du maître et de l’esclave est au cœur de cette archéologie.

Pour ce qui concerne les Gaulois, leur image a complètement changé. Nous savons que 300 ans avant Jésus-Christ, la Gaule est densément peuplée, quadrillée de fermes aristocratiques de grandes dimensions et lieux de pouvoirs politiques. Deux siècles avant la conquête, apparaissent des formes d’États, environ 60, centrés autour d’autant de villes fortifiées – des oppida - où se concentrent les fonctions économiques, religieuses et politiques. La très grande majorité de ces oppida découverts depuis vingt ans par l’archéologie préventive était absente des textes antiques et ignorée des historiens. Elles montrent un urbanisme organisé, avec des rues à angle droit, des bâtiments spécialisés, un artisanat très sophistiqué – bois, fer, salaison de porcs. Les villes battaient monnaies, avec même un alignement sur le denier romain pour le quart sud-est de la France bien longtemps avant la conquête, une sorte de zone monétaire intégrée avec l’empire romain.

L’une des grandes découvertes ce sont ces sanctuaires, vastes espaces clos avec de grands bâtiments de bois où se déroulaient des cérémonies religieuses… les Gaulois avaient des temples et ne se réunissaient pas dans la forêt pour des réunions sacrées, avec druides et gui.

L’idée des invasions barbares dévastatrices est une manipulation de l’histoire qui s’opère dès le Moyen-Âge. En fait, la relocalisation des élites à la campagne et la rétraction de la population des villes débutent dès le IIème/IIIème siècle. Et les villes sont dès lors moins densément peuplées, avec des sortes de potagers urbains.

Par contre, l’archéologie n’observe pas de traces de destructions massives dans les villes, et à l’inverse les campagnes montrent une solide continuité des grandes exploitations agricoles à travers cette période soit disant bouleversée. La toponymie confirme d’ailleurs cette réalité.

Du coup, cela a conduit les historiens à une relecture des textes vers des migrations de groupes qui voulaient s’intégrer à l’empire. C’est plutôt un phénomène de réorganisation lent, sur trois siècles, avec des implantations d’élites qui négocient leur entrée.

L’histoire de la France est celle de brassages et de mélanges. L’idée d’une permanence et d’une essence de « La France » est sans fondement. Il n’y a jamais eu de commencement de la France, il y a une construction permanente, qui implique tous les habitants, d’où qu’ils viennent.

On ne trouve pratiquement rien de ces découvertes dans les manuels et les programmes scolaires actuels. Est-ce un simple retard ? Ou un signe plus grave. Pourquoi l’enseignement ignore-t-il totalement la généalogie et l’origine de la construction des inégalités, des États, des stratifications sociales ? Pourquoi débuter par les grandes civilisations étatiques, comme si leur émergence ne réclamait pas une explication historique mais relevait d’une nécessité quasi « naturelle ». L’archéologie inciterait-elle à s’interroger sur ces soubassements de nos sociétés inégalitaires et donc à les mettre en cause ?



209 réactions


  • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 5 avril 2015 13:17

    La gaule est apparue un matin et Françe est montée dessus .


  •  C BARRATIER C BARRATIER 5 avril 2015 17:35

    La France a existé d’abord comme puissance militaire, royale ou bonapartiste, la France des dominants qui combattaient d’autres dominants. Ill y a eu la France révolutionnaire, l’partition de la liberté de conscience et de l’égalité, la France des Lumières. La nostalgie de la France appartenant aux dominants maintient l’actuel clivage anti Républlcains et Républicains.
    Voir en table des news :

    République : ses ennemis réactionnaires contre l’égalité

     

    http://chessy2008.free.fr/news/news.php?id=271

     


    • Baasiste 2 5 avril 2015 21:14

      @C BARRATIER
      la république est une invention des dominants ploutocrates capitalistes et bourgeois 


    • berry 6 avril 2015 00:04

      @C BARRATIER
      Elle est belle votre république...
       
      Elle a commencé en coupant des têtes comme l’état islamique et elle a mis l’europe à feu et à sang pendant 25 ans.
       
      Elle se perpétue de nos jours grâce à la corruption et aux mensonges.
      Elle trahit le peuple français pour lui préférer n’importe quel étranger qui passe, fut-il le dernier des voyous ou des abrutis.
      Elle affiche tous les jours sa soumission envers les deux pires états agresseurs de la planète : les USA et israël.


    • La Dame du Lac La Dame du Lac 6 avril 2015 02:44

      @berry

      Pas mieux. Plus 1000


  • Hannibal GENSERIC Hannibal GENSERIC 7 avril 2015 16:20

    @ l’auteur

    C’est bien connu :

    Immigration : le dernier entré ferme la porte

    On voit cela en France, aux USA et partout ailleurs.

    Si on remonte à l’origine des Européens, donc des Français, on sait que l’homme moderne (Homo Sapiens) a commencé à peupler l’Europe il y 40.000 ans environ. D’où venaient-ils ? d’Afrique puis Arabie. 

    "Nous sommes tous des Arabes ! Telle est la dernière révélation fracassante des généticiens. Que cela plaise ou non à Marine Le Pen et à Claude Guéant, tous autant que nous sommes, Français, Américains, Esquimaux, Chinois ou Papous, nous descendons d’ancêtres communs ayant peuplé la péninsule arabique ! Après être née en Afrique, l’humanité aurait donc fait une étape dans l’Arabie heureuse, après avoir franchi la mer Rouge. C’est du scoop. En effet, jusque-là, les grands experts des migrations humaines pensaient que la division des troupes s’était plutôt faite au Proche-Orient ou en Afrique du Nord." Le Point, 27/01/2012

    http://numidia-liberum.blogspot.com/2015/04/a-part-les-africains-tous-les-peuples.html#more

    .


    • Baasiste 2 7 avril 2015 18:41

      @Hannibal GENSERIC
      osef on veut préserver nos origines plus récentes, celles qui comptent le plus. pourquoi ne pas remonter nos origines jusqu’au poisson pendant qu’on y est ? 

      d’ailleurs pour un musulman défendre la théorie de darwin est incohérent. 
      ah aussi avoir des origines communes lointaines avec les noirs et arabes ne fait pas de nous des arabes ou noirs, nous sommes des singes aussi selon cette logique.

      « Immigration : le dernier entré ferme la porte »
      quand on aime le pays qui nous accueille on est obligatoirement vs l’immigration détruisant ce pays, surtout quand elle est calamiteuse. aussi selon votre logique, je pourrais dire qu’un antillais doit soutenir l’esclavage car c’est à cause de ça qu’il existe, il serait hypocrite d’être vs quelque chose qui lui a donné la vie. il faudrait qu’un patriote fr soutienne aussi les invasions et guerres car c’est comme ça que son pays et lui sont nés. faudrait que tous le monde soutienne l’immigration massive et la colonisation car tous le monde vient de la Mésopotamie (théorie de la création) ou de l’Afrique (théorie de darwin) et donc ainsi nous sommes tous des descendants d’immigrés. et la plupart des pays ont pour origine : l’immigration, l’invasion, la guerre et la colonisation, faut soutenir tous ça dans votre logique ? et le mec qui ferme la porte derrière soi pense au bien de ceux qui l’on accueilli et de lui-même, malheureusement on peux pas satisfaire tous le monde parfois et il doit y avoir des priorités. vous n’avez aucun argument en faveur de l’immigration donc vous culpabilisez : « tu es issu de l’immigration et tu veux arrêter l’immigration, égoïste ! tu ne penses qu’à toi ! ».

    • César Castique César Castique 7 avril 2015 20:22

      @Hannibal GENSERIC

      « Que cela plaise ou non à Marine Le Pen... »


      Quel c..., ces médiateux smiley 

      Avant cela, nous étions tous des simiens, et bien avant encore des eumétazoaires, l’essentiel, c’était de ne pas le rester...

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