samedi 5 mars 2016 - par Jean Pasquier

De l’anglophilie rampante dans la societé Française

Réflexions sur la prépondérance d'anglicismes dans notre langage et moeurs

Je tiens à préciser d'avance que ce texte ne sera pas un pamphlet contre le langage internationalisé mais plus un réquisitoire sur son influence contemporaine qui participe
à la dépréciation du notre, celui de Musset, Rousseau et autres joyeux drilles.

"Week-end", "French touch", "Deadline", "Business"... Ces mots sont aujourd'hui des éléments de langage parmi tant d’autres venants de la noble langue de Shakespeare.

 

Des rapports de force dans l'Histoire

Ces deux langues souvent opposées, du fait de leur concurrence en tant que langue véhiculaire du monde, se sont entremêlées au cours de l'histoire commune de nos deux pays. Celle-ci commence par une conquête, l’histoire contée sur la Tapisserie de Bayeux, celle de Guillaume le Conquérant, Duc de Normandie au XIème siècle.

A l'époque, l'ensemble des cours européennes parlaient le français, la langue de la culture, et plus tard ensuite, conséquence de la colonisation, de nombreux Pays extra-européens adopteront le Français comme langue officielle (près de 80 pays et gouvernements).

Avant la première guerre mondiale et le traité de Versailles, le Français était la langue diplomatique employée par les grandes puissances. Aujourd'hui, dans ce monde régit par les affaires, le "business", il est normal que l'Anglais, possédant non pas le plus grand nombre de locuteurs mais ayant en moyenne les locuteurs possédant le capital le plus important s'impose dans notre société commerciale.

Auparavant c'était la langue de Shakespeare qui nous empruntait des éléments de langage. Les plus connus sont le "déjà vu", le "vis à vis" et d'autres, représentatifs, comme : "Entrepreneur". 

 

Le "Business English"

Il faut dire que les "start-ups" sont majoritairement dotées d'une appellation à consonance anglaise, bien que d'invention française : Wing, Guestviews, MaSmartHome... Aujourd'hui c'est Thomas Piketty, économiste, qui s'exporte le mieux, et c'est en Anglais dans le texte. Et l'accompagnant, l'ensemble des Français diplômés du tertiaire, ayant étudié dans des écoles de "management". 

Ajoutons à cela qu'il est pratiquement impossible de croiser un seul slogan publicitaire ou support "marketing" qui ne possède pas un seul mot en anglais. C'est tendance, c'est "punchy" ! C'est dans l'air du temps.

Du moins, c'est l'état actuel du rayonnement de la langue française qui pose un problème prépondérant. Bien que des économistes sur le devant de la scène appelle à une union de la francophonie, il faut assurément déplorer que cette insistance vienne encore et toujours de la problématique économique.

On peut supputer que cette recrudescence de l'économie, qui est aujourd'hui la colonne vertébrale de notre société, a englouti le côté artistique et non monétaire de la culture.

 

Du mécénat à la capitalisation de l'Art

De nombreux intellectuels ou érudits étrangers parlent encore aujourd'hui la langue de Molière. Mais ces intellectuels de niche ne sont pas les acteurs de block-busters, mis sur le devant de la scène par l'industrie de "l'entertainement".

Dans notre histoire, la production artistique n'a jamais été davantage soumise à la rentabilité qu'aujourd'hui. Rarement l'aspect créatif aura été autant dans l'émotion et l'artifice, délaissant la raison et la réflexion. Les artistes Français, traditionnellement plus dans cette deuxième mouvance, subiraient t'-'ils ce changement de format de plein fouet ? La génération d'aujourd'hui étant même astreinte par les majors de le suivre, et tout cela pour un intêret pécunier ?

Un Gainsbourg, chantre de la langue Française avait même terminé par chanter en anglais dans son dernier album. Aujourd'hui des artistes français sur le devant de la scène comme les Daft Punk, bien artistiquement étant à la pointe, continuent d'utiliser l'anglais dans le peu de textes présents dans leurs chansons. 

Effectivement, l'Anglais étant une langue chantante dû à sa phonétique et plus propice à la dysphonie, elle est préférée pour susciter l’émotion. On pourra déplorer que cela se fasse au dépend de la langue de Férré et de Brel, celle de la raison et du romantisme.

 

Une soumission de nos élites à l'hégémonie anglophone

Alors qu'il n'y aura jamais autant de francophones dans le monde qu'en 2050, la plupart de nos ministres ou officiels argumentent à coup de "French Tech" ou autre, délaissant la langue officielle pour parler celle du "business". Cette logique gouvernementale a été lancée en 1999 par Claude Allègre qui souhaitait que "L'Anglais ne soit plus considérée comme une langue étrangère"

 

Bien qu'en berne, la Francophonie a de l'avenir

Les élites francophones sont partagées : l'intelligentsia Français de la métropole est anglophile au possible, se soumettant de la plus vilaine des manières en dépréciant la langue de la culture, notre langue natale. Faisant parti aujourd’hui des plus fervents atlantistes, ils laissent nos alliés historiques partageant la même langue comme le Liban sur le bas-côté uniquement pour faute d'intérêt économique et favorisent les monarchies du Golfe comme le Qatar, bien moins démocratiques.

Cependant, les élites des autres pays se positionnent comme les meilleurs remparts pour la préservation de notre langage, car ils l’adorent ! Ils ont compris l'importance de ce patrimoine.

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Personne n’en parle mieux que le président du Sénegal. De plus, au Canada, le nombre en pourcentage de francophones augmente ! En 2050, le Français sera la deuxième ou troisième langue mondiale, avec 750 millions de locuteurs...

L’Histoire nous adresserait un beau pied de nez si les anciennes colonies, après ce que certains représentants de la France ont pu leur faire subir, devenaient les étendards de notre langage millénaire, oubliant les rixes du passé.

 



14 réactions


  • jocelyne 5 mars 2016 19:25

    Un bel article, merci, vous ne le soulignez pas suffisament , mais le gros soucis vient des business skoul et aussi du snobisme consistant à utiliser des mots « anglais » pour faire « in » , excusez moi...


    • Alren Alren 7 mars 2016 17:48

      @jocelyne

      « [le] snobisme consistant à utiliser des mots ’’anglais’’ pour faire ’’in’’ »

      À mon avis ce n’est pas seulement un snobisme, c’est un code social visant à signaler que l’on appartient à la classe éduquée, donc supérieure.

      Beaucoup d’auteurs et de commentateurs d’Agoravox sont apparemment sensibles à ce phénomène inconscient puisqu’il leur arrive de reproduire un texte en anglais sans le traduire, chose impensable si ledit texte était en allemand, en espagnol, en russe etc.

      Au temps du Bourgeois gentilhomme de Molière, c’était le latin qui jouait ce rôle discriminant.


    • Jean Pasquier Le Connétable 8 mars 2016 11:10

      @jocelyne

      L’enseignement anglo-saxon est porté aux nues aujourd’hui, car il favorise l’insertion en entreprise et ne se focalise que sur le « nécessaire » : l’utilité professionnelle, et non le développement de la pensée, jugée pas assez rentable !


  • Aristide Aristide 5 mars 2016 21:01

    En place de se lamenter, il s’agit simplement de constaer le réel et de ne pas revisiter l’histoire.



  • VICTOR Ayoli VICTOR 6 mars 2016 09:00

    Á l’auteur. Merci pour ce constat.

    On assiste à la volonté de mise à mort non seulement du français mais de la plupart des langues du monde. Responsable : l’impérialisme étazunien qui sévit à tous les niveaux : industriel, commercial, militaire mais aussi et surtout culturel.

    On nous abreuve jusqu’à l’écœurement de sous-merdes des séries télévisées étazuniennes, qui – largement amorties au USA - arrivent par plein cargo à prix cassés, ruinant ainsi la création française qui n’existerait plus sans les subventions gouvernementales.

    On nous emmerde jusqu’à en dégueuler de ces collections de bruits abrutissantes que les programmateurs déversent à pleins seaux dans nos pauvres oreilles et qu’ils ont le culot d’appeler « musique ».

    Même les chanteurs français beuglent maintenant dans cette langue et…sont récompensés par des « victoires de la musique ». Comme les programmateurs des radios, ils sont des collabos et méritent (pour le moins) le goudron et les plumes.

    Les boutiques se croient obligées de se donner des noms anglais. Il y a plus de mots anglais sur les murs qu’il y avait de mots allemands pendant l’occupation !

    Ras les aliboffis de cette invasion ! Et merde à ce globish qui est à l’anglais de Shakespeare ce que le macdo est au tournedos Rossini !


    • amiaplacidus amiaplacidus 6 mars 2016 17:33

      @VICTOR

      Mise à mort de la plupart des langues du monde

      Ceci inclut la mise à mort de l’anglais, parce que ce que l’on nous présente comme de l’anglais n’est qu’un improbable sabir de base anglaise avec un vocabulaire tout ce qu’il y a de plus restreint.

      Et ce ne sont certainement pas les anglophones qui vont me contredire. La plupart du temps, ceux qui utilisent le franglais (cf Étiemble) ne sont pas capables de faire une phrase anglaise (ou française d’ailleurs) correcte.


    • amiaplacidus amiaplacidus 6 mars 2016 17:35

      @VICTOR

      J’ai oublié de vous dire que je suis tout à fait en accord avec vous.


    • Plus robert que Redford 7 mars 2016 14:25

      @VICTOR
      Globish ???

      Plutôt« globiche » !!


    • Jean Pasquier Le Connétable 8 mars 2016 13:00

      @VICTOR

      Tout le plaisir est pour moi !

      Le « Soft Power » a détruit ce que les bombardements n’ont pu raser, l’esprit français. Merci au plan marshall pour la construction de macdo et la surabondance de « blockbusters » débilitants, j’en passe et des meilleures.

      M’est avis que cette puissance a profité d’une tradition bien particulière qui est la notre, celle de l’universalisme. L’équilibre que nous possédions, entre une culture forte, alliée avec un langage riche et une connaissance ainsi qu’une compréhension d’autrui, nous a permis de faire de grandes choses. Tout cela a été brisé.

      On en est arrivés à la détestation de soi, si bien que l’on peine à se réconcilier tous sur des valeurs communes. Ces dernières, qui sont censées être sociales, humanistes, ont été conchiées par le gouvernement actuel avec ces dernières lubies : alliance avec une monarchie théologiste et autoritaire, loi du travail que l’on pourrait nommer « loi du capital »...


  • JP94 6 mars 2016 15:42

    Pour les pubs, qui traduisent l’idéologie dominante, on en voit même totalement en anglais , c’est sidérant . Même Peugeot , qui se flatte sur certains modèles de les fabriquer en France ( sachant ce que ça signifie pour sa clientèle) , nous assomme de son « motion » au sens anglais mais mélangé à du vrai français , émotion : pourquoi ? 

    Pour nous faire comprendre que celles et ceux qui ne comprendraient pas cet anglais usuel ( pas celui de Shakespeare ni de Hammet , justement ) sont « out » , ne sont pas en phase avec ce que la société actuelle exige d’un bon citoyen ?
    Donc la pub illustre cette pression quotidienne, qui est fort bien pensée , car qui n’a pas remarqué que lorsqu’on voyage à l’étranger , l’un des signes les plus évidents que nous sommes à l’étranger est la présence dans l’espace public de ces panneaux publicitaires qui n’ont aucun sens pour nous ( et perdent toute efficacité de ce fait) alors qu’ils ont un sens immédiat pour les natifs du pays .
    Du coup, nous devenons exclus de notre pays par de tels signifiants car incapables de déchiffrer ce que « tous les autres comprennent ».

    Mais la ministre de l’Education a voulu imposer les cursus universitaires en anglais : donc là un citoyen français sera privé de diplôme parce qu’il ne maîtrise pas à un niveau supérieur la pratique orale et écrite de l’anglais !! C’est une atteinte au droit à l’Education , mais pilotée par qui ? 
    Du reste , l’anglais est déjà imposé lors des concours d’ingénieurs , avec juste une heure de cours par semaine. Qui passe donc devant pour l’admissibilité ? ceux qui ont pu faire de petits séjours en pays anglo-saxons , si toutefois ils ont aussi un niveau valable en maths , quand même.
    Mais pourquoi éliminer des étudiants brillants, sauf en langue ? (On n’exige pas des autres qu’ils soient matheux ).

    Pis , pour le travail , le Patronat et le gvt suiviste, veulent imposer la pratique de l’anglais dans certaines entreprises.
    Naturellement , dans une entreprise internationale, même en France , il y a des postes où l’anglais peut être une nécessité,à un certain niveau ou pour certains postes.
    Mais pas pour tout le personnel ! 

    En parallèle , le recrutement en filtrant par l’anglais est du pipeau car le recruteur , en réalité, n’est pas lui-même en mesure de comprendre un candidat qui parle couramment l’anglais et ne comprend pas le vocabulaire technique . Mais ça permet de discriminer et de justifier une non-embauche.

    On voit à quel point ce « tout-anglais » vise essentiellement le monde du travail !

    Car rien n’est prévu pour développer réellement l’amitié et les échanges entre simples citoyens .

    Mais même pour le travail , ce tout-anglais est sujet à caution : nos partenaires aimeraient sans doute trouver des Français parlant leur propre langue : allemand , russe, chinois, arabe, japonais, grec ... au lieu de trouver des clones .

    • Jean Pasquier Le Connétable 8 mars 2016 11:38

      @JP94

      Pour l’anecdote, aujourd’hui des gens compétents ne peuvent pas rejoindre de grandes écoles comme Sciences Po sans connaître l’Anglais.

      Pour les écriteaux publicitaires, il y a deux facteurs importants :

      - L’un est que la France est le pays le plus visité au monde (70 millions de personnes par an), et que cela peut influer sur le fait d’angliciser les écriteaux pour que la plupart de ces gens reçoivent le message publicitaire.

      - L’autre est que tout ce qui est vocabulaire du « management », « marketing » et de la finance est aujourd’hui à 80% anglais. C’est donc souhaitable de comprendre le « globish » afin de bien rentabiliser sa force de travail...

      Dire qu’à un moment le Roi d’Angleterre ne parlait que le Français ! Foutredieu on en est loin !


  • Folacha Folacha 7 mars 2016 06:48

    Mais Kevin et Jenifer sont déjà parents de petits Killian et Shana . Quand je pense que ma fille et mon gendre britannique se sont creusé le citron pour trouver un prénom compatible aux deux cultures qui leur plaise à tous les deux .


  • Bombe Bombe 7 mars 2016 12:27

    Le Français n’est pas notre « langage millénaire » il y a un peu plus d’un siècle, la majorité de la population indigène de France parlait une langue régionale et non le Français. La France à tout intérêt à détruire la francophonie dans le monde afin de se replier sur l’Europe, terre de ses racines. La Francophonie n’apporte rien de bon à la France.


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