samedi 19 décembre 2015 - par Serge ULESKI

Django au pays de « Candie land »* : une sucrerie cinématographique amère

 

       Dés-enchaîné dès les premières minutes du film, puis rapidement déchaîné un colt dans chaque main, c’est Django de Quentin Tarantino, le justicier aux bras armés d’une justice vengeresse élevée au rang d’une esthétique d’une beauté encore inégalée dans sa représentation … car jamais le châtiment aura été aussi savoureux à partager et la libération aussi belle à contempler !

Ironie, humour macabre et noir, pastiche, parodie de western, dérision, bande musicale impeccable aux voix profondes, dialogues foisonnants qui claquent comme un fouet, une claque aussi en plein visage, Tarantino s’amuse encore mais quand il rit, sans doute pour ne pas désespérer totalement, c’est d’un rire jaune… un rire inédit chez Tarantino ; il faudra alors se reporter à « Jackie Brown » réalisé en 1997 pour trouver un tel élan compassionnel.

 

 « Pendant des siècles, ils ont été les barbiers de mes ancêtres, le rasoir en main, sous leur menton, sous leur gorge, trois fois par semaine… mais alors, pourquoi ne les ont-ils pas tués ? » questionne le maître de Candie Land…

La réponse ne se fera pas attendre. Soudain, on ne joue plus. Le rideau tombe ; ailleurs, il se lève, et tout s’éclaire. Le rasoir a été remplacé par les armes à feu (soyons modernes que diable !) ; la passivité, une servitude résignée souvent prisonnière d'un processus de chosification mortifère, s'est muée en courage féroce…

C’est le théâtre du Grand Guignol à Candie land du nom de la plantation du maître des lieux : Calvin Candie.

Les balles pleuvent par dizaines, par centaines, par milliers, ça ricoche et ça siffle comme des missiles avant impact, des lambeaux de chair ensanglantée virevoltent, les corps sont criblés et couverts de sang, à flots ce sang, le sang de plusieurs siècles de générations de négriers et de leurs larbins sadiques, l’ancien testament d’une main, fouet de l’autre, un protestantisme fanatique dont la bible a bon dos qui nous rappelle étrangement ceux qui, la Torah d’une main, le flingue de l’autre, tiennent en respect le Palestinien qui rêve de liberté tout en continuant de lui voler sa terre et sa vie, et d’autres encore, Coran et décapitation, comme autant d’échantillons d’une humanité de cloportes.

Le sang gicle au passage sur la fleur de coton immaculé d'une plantation au labeur esclavagiste, pétales de sueur, de larmes et de sang… nectar et miel d’une justice expéditive…il faut alors faire vite et frapper fort… car, si la vengeance est impatiente, la liberté l’est tout autant.

Un chant choral se fait entendre maintenant car partout ça crie, ça hurle, ça souffre, ça meurt, une fois, dix fois, cent fois, mille fois…

Mais alors combien de fois faudra-t-il les tuer tous pour qu’ils meurent ?!

La mort se répand sur « Candie Land », cette terre infâme maintenant jonchée de cadavres ! Bientôt, une bâtisse blanche, de la couleur de son commerce – le coton -, contre celui de sa main d’oeuvre, volera en éclats… il n’en restera rien ; en cendres… cendres fumantes.

 

         Django c'est Zorro chevauchant pour délivrer la femme qu'il aime, un Zorro noir qui partage la condition de ceux dont il vole au secours ; c’est le retour de d’Artagnann, du nom ironique de l’esclave que son propriétaire donne à dévorer vivant aux chiens ; le d’Artagnan d’un Alexandre Dumas d’outre-atlantique qui rentre à la maison pour régler quelques comptes ; et c'est aussi le Christ, un Christ noir : "Voici leur sang versé, celui de ma liberté ! Voici leurs corps déchiquetés, le juste prix de mon émancipation !"

 

       La traite, le colonialisme, un monde de gagnants abjectes : tout se tient. Surprenant qu’il y ait encore des trous du cul ou des salauds pour s’étonner que de temps à autre, le perdant lève la tête et le bras la main pour frapper.

Si chez Tarantino c'est souvent le Blanc qui sauve le Noir ( voir Jackie Brown), ce que Spike Lee ne supporte pas, il n'en reste pas moins que la représentation du Noir et du Blanc, telle qu'elle nous est le plus souvent donnée par Hollywood - un Noir larmoyant, soumis, résigné, impuissant -, est inversée chez le réalisateur de Django : le Noir est futé, rusé même ; le Blanc est bête et méchant, méchant parce que bête, aussi bête qu’une bête, plus bête encore puisque sadique et cruel… même si c’est elle, cette bête, qui tient le fouet et la laisse.

Tarantino met un point d’honneur à nous restituer la force et la dignité de l'esclave. En cela, Django c’est l’anti 12 years a slave du réalisateur britannique passé outre-atlantique, Steve Mcqueen, le Josh Randall de la traite négrière, réalisateur noir au producteur blanc ; 12 years a slave remportera l'Oscar du meilleur film : normal, le Blanc sort intact de "12 years a slave". En revanche, chez Tarantino, le Blanc sort laminé, rincé et essoré. Manifestement, Hollywood ne lui a pas pardonné ce jugement sans appel : « Que voulez-vous, Monsieur Calvin Candie, docteur Schultz est Allemand ; il n’a pas encore l’habitude des Américains et de leurs moeurs ; il ne connaît pas le spectacle d’un être humain que l’on donne à dévorer vivant aux chiens ».

On pense alors au chaos du Moyen-Orient aux millions de morts (1) ; bilan de la fausse guerre dite "contre le terrorisme" lancée par les USA depuis 1990. Toute une région et sa population livrées vivantes aux chiens de la géopolitique.

 

        Dans ce monde de la traite, de l’esclavage et des plantations, "le nègre domestique" (incarné par Samuel Lee Jackson - sans doute le rôle de sa carrière), nègre de l'intérieur, sait que la force est du côté des Blancs esclavagistes et négriers ; sa sécurité et prospérité aussi quand il est promu au rang de Major d’homme et qu’il règne alors sur toute une colonie de nègres des champs. Dans ces conditions, mieux vaut, à ses yeux, être le domestique du Blanc en 1858 que son salarié "libre" cent ans plus tard, à trois dollars de l’heure.

C'est sûr ! Ce nègre-là avait du flair d’autant plus qu’à son époque, il n’y avait qu’un trou dans la roulette, tout comme aujourd’hui soit dit en passant… car jamais il n’y en aura pour tout le monde aussi longtemps que les bénéfices de la trahison de l’un reposeront sur l’exploitation de tous les autres.

         

 

        Django, ce film déterminé, sincère, qui se veut tout sauf malin, est d’une violence d’une beauté rare et renversante car portée par la dénonciation d’un crime d’Etat, le premier d’entre eux, les USA, et dont on peut encore tracer l’argent de ses bénéfices chez ses milliardaires d’aujourd’hui (JP Morgan…)

 

        « Django, tu ne pourras jamais détruire Candie Land », hurle le nègre domestique avant d'aller rejoindre le monde des morts des mains de Django ; pourtant, Tarantino l’a fait le temps d’un film, même si aujourd’hui tout est à refaire pour des millions d’entre eux.

 

 

* Du nom du propriétaire esclavagiste de la plantation de Calvin Candie ; rôle tenu par DiCaprio ; Candy - homonyme -, signifie en Français : sucrerie, bonbons, confiserie...



9 réactions


  • juluch juluch 19 décembre 2015 17:14

    Bonne analyse sur cet excellent film.


    • Aristoto Aristoto 19 décembre 2015 18:12

      @juluch
      pas lu l’article il dit quoi : que c’est pas bien d’egorer pour le nègre d’égorger son esclavagiste ?!


  • Julien30 Julien30 19 décembre 2015 17:37

    L’outrance sur ce genre de sujet est toujours dangereuse et en voyant ce film grotesque sur le plan historique on se dit que derrière l’infantilisme de Tarantino, il n’a qu’une seule vocation : alimenter les tensions raciales. Quel autre effet pourrait avoir un tel film sur l’esprit de jeunes noirs à qui on apprend sans cesse à se voir en victime et à en vouloir aux blancs, à peu près tous d’immondes ordures dans le film, qui ont exploité leurs ancêtres et continueraient à le faire. D’ailleurs une phrase dite par le héros, positif, résume bien le « climat » du film, quelque chose comme ’tuer des blancs pour de l’argent, ça a tout pour plaire". 


    • Aristoto Aristoto 19 décembre 2015 18:11

      monsieur et contre le fait que le nègre égorge son esclavagiste.

      bien faut arreter alors de chialer a longueur de journée sur les « l’oligarchie’ la »technocrachie«  »l’ue« la »commission« les »1%" etc etc...Soit cohérent avec ton discours et soumet toi .


  • Aristoto Aristoto 19 décembre 2015 18:04

    Ce film ma fait chialer surtout le discours de Candy à propos de nègre barbier de son grand père !! Faut les égorger ces chiens d’esclavagiste patron propriétaire rentier humaniste de mes c*, les saigner comme de porcs.

    Il est temps de se DECHAINER !

    Très très beau film de tarantino, au magnifique discours.


  • Phoébée 19 décembre 2015 18:35

     « La traite, le colonialisme, un monde de gagnants abjectes : tout se tient. Surprenant qu’il y ait encore des trous du cul ou des salauds pour s’étonner que de temps à autre, le perdant lève la tête et le bras la main pour frapper. »

    Vous en savez quelque chose ULESKI... attisant les haines sans donner de solution.

    Moraliste du pauvre que vous êtes *


    • Phoébée 19 décembre 2015 20:20

      @Phoébée
      La traite menée chez nous par les juifs, cet autre film de Tarantino : Inglourious Basterds

      J’espère vous faire jouir Uleski, Pauvre taré ....


  • xana 19 décembre 2015 23:00

    A en croire les réactions à cet article, la bête ignoble respire encore...


  • cathy cathy 20 décembre 2015 08:42

    Ils sont passés de la traite négrière à la production hollywoodienne, c’est d’un pathétique.


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