mercredi 1er avril 2009 - par TSAKADI Komi

Faut-il une « charte de l’égalité » pour la fonction publique en Afrique ?

Le 2 décembre dernier, a été signée en France, la Charte pour la Promotion de l’Égalité dans la Fonction publique, visant à promouvoir l’égalité dans toutes les fonctions publiques et de prévenir toutes formes de discriminations, en ce qui concerne l’accès à la fonction publique.
Une telle initiative peut inspirer le continent africain où la fonction publique est ethnocentralisée dans la plupart des pays. La fonction publique y est gangrénée par une discrimination ethnique, en contradiction avec le discours officiel sur une prétendue unité nationale, définie comme fondement de l’Etat.
Au Togo, la presse privée a ouvert le débat depuis quelques jours en publiant la liste des collaborateurs du chef de l’Etat avec leur origine ethnique pour montrer ethnocentralisme au sommet de l’Etat.
 
Il est légitime que, comme en France où le débat sur la diversité fait son chemin (boosté par l’élection d’Obama aux Etats-Unis), qu’en Afrique le débat sur la diversité ethnique soit relancé. Il ne s’agit pas d’incriminer une ethnie mais le constat est fait que les chefs d’Etat ont tendance à cultiver l’ethnocentrisme à la tête de l’Etat d’où le mal développement du continent.
 
J’admets que relancer le débat sur la diversité ethnique dans la fonction publique en Afrique posera à coup sûr la problématique des statistiques ethniques comme en France pour savoir comment chaque ethnie est représentée dans l’Administration…
 
Un chef d’Etat avait proposé en son temps, pour calmer la contestation suite à son arrivée au pouvoir à la suite des élections truquées et sanglantes, la création d’un « comité pour l’égalité dans l’accès à la Fonction publique ». Mais il a vite fait d’oublier cette idée. Pourquoi ?
 
Nos Etats n’étant pas des royaumes (même si on peut noter ça et là une tendance à la monarchisation avec le fils qui succède à son père de Président de la République dans des conditions anti- démocratiques), l’organisation des élections libres et transparentes en Afrique a vocation à déboucher nécessairement sur des alternances ethniques à la tête de l’Etat. 
 
Il importe de promouvoir la diversité ethnique au sein des appareils de l’Etat pour lui permettre de jouer pleinement son rôle de « médiateur de toutes les ethnies » et de capter toutes les compétences issues de la diversité ethnique pour remplir sa mission de développeur au service de la communauté nationale.
 
 En donnant l’impression de favoriser une ethnie aux dépens des autres (alors que c’est les cadres zélés et arrivistes issus de cette ethnie en majorité et d’autres ethnies qui profitent du système aux dépens de la grande majorité de la population), les chefs d’Etat africains plongent inexorablement nos pays dans la division, quoique cela les arrange pour mieux nous gouverner et nous maintenir dans la misère et le mal développement.
 
Il est plus qu’urgent, cinquante ans après la naissance de nos Etats multiethniques, de relancer le débat sur la diversité ethnique, notamment dans la fonction publique, le plus gros pourvoyeur d’emplois dans nos pays et régulateur des marchés publics avec 40 à 70% des dépenses de fonctionnement et d’investissement de l’Etat.
 
Nombreux sont des cadres africains, faute de trouver des postes dans la fonction publique ethnocentralisée ou de créer des entreprises dans un environnement d’affaires sein , sont obligés de rester en France à attendre le train de la diversité pour avoir un emploi à la hauteur de leur diplôme.
 
Les pays africains gagneraient à ouvrir le débat sur la diversité ethnique dans la fonction publique pour corriger la pratique ethnocentralisée en cours depuis les indépendances, sous les différents régimes politiques et qui constitue l’un des freins au décollage économique sur le continent.
 
Komi TSAKADI
 


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