samedi 30 mars 2013 - par rakosky

François Hollande, comme un avion sans ailes

Disons-le clairement, il n'y eut jamais ou rarement une si totale et si peu banale indifférence à l'égard de quelqu'un appelé à une si haute fonction.

La vérité étant que malgré les efforts des journalistes pour donner sang et vie à ce fantôme, chacun se fout éperdument de savoir s'il aime le gigot, ou prend du clafoutis au dessert.

Cette solitude n'est même pas celle attachée à la sacralité du pouvoir, le voile racinien qui protège les puissants par la terreur et la crainte magiques qu'ils inspirent, ce voile s'est déchiré depuis longtemps et cet homme n'est plus, comme il le dit lui même dans un aveu terrible de sens, qu'un Président banal.

Cet homme n'inspirera aucun roman, il aurait du pour cela être au moins un Rastignac et son nom ne sera jamais donné qu'à un square ou une impasse.

Bien entendu, la seule chose qui importe est la racine historique de ce décalage si frappant entre l'insignifiance maussade de cet homme, le tragique son époque et la charge terrible qui lui incombe.

Il est le premier Président de la 5ème République à avoir été porté au pouvoir sans aucune espérance ni aucune illusion ou des illusions si faibles qu'elles se sont vite fracassées sur la réalité de sa politique.

L'impasse historique dans laquelle il se trouve enfermé est celle de toutes la bourgeoisie européenne,celle qui découle de la tache monstrueuse qu'elle s'est assignée, en finir avec la civilisation européenne, détruire de fond en comble les fondements de la démocratie politique et des droits ouvriers.

Un tel programme, celui contenu dans les différents traités européens et en particulier le TSCG, celui qui est inscrit dans les actes et déclarations de tous les gouvernements européens, prend un véritable contenu de guerre civile, il implique un bouleversement complet de tous les rapports de la forme même de l’État, des rapports entre les gouvernements et la société civile.

Ce que l'on appelle la gauche française s'appuie sur 2 héritages historiques qui trouvent leur sanction juridique et sociale dans l'organisation même de la République.

L'héritage de la Révolution française,c'est à dire l'existence d'une démocratie parlementaire, d'une organisation du territoire fondée sur les communes et les départements et enfin l'unité de la République, cette unité s'incarnant dans l'existence d'une école publique unifiée par des programmes nationaux et le statut national de ses personnels.

Le second héritage est celui des luttes de classe, du combat séculaire pour arracher un Code du travail, des conventions collectives, le droit des organisations syndicales à la libre négociation, l'existence d'un régime général de Sécurité Sociale fondée sur le salaire différé, les droits à la retraite, aux allocations familiales, à l'accès aux soins et à tout ce qui nous préserve de la déchéance et du dénuement complet.

 

La solitude de François Hollande, le drame historique dans lequel il va jouer le plus vilain rôle est l'obligation où il s'est placé d’être le fossoyeur de la République, le liquidateur de ce l'écrasante majorité du peuple considère comme sacré et inviolable.

Le drame de François Hollande et sa solitude, son isolement ,le gouffre béant qui s'ouvre devant lui a une origine sociale et politique.

Le corps de la République est encore vivant,la classe ouvrière et ses organisations sont encore vivants et bien décidés à survivre.

Ils sont vivants dans la conscience de millions d'hommes et de femmes.

Ils sont vivants dans l'attachement fanatique et qui pourrait devenir féroce de millions d'hommes et de femmes a préserver tout ce qui fonde une existence dans la liberté et la dignité.

Ils sont vivants dans la résistance des maires et des élus, leur attachement à la démocratie communale menacée.

Ils sont vivants dans le refus des organisations syndicales de s’intégrer à l' Union Nationale, de signer des accords scélérats, vivants dans ces centaines de délégués au Congrès de la CGT, debouts et scandant pour exiger le Retrait de l'accord MEDEF-CFDT .

Vivants dans la grève générale des instituteurs, les 80% de conseils municipaux refusant d'appliquer la Réforme Peillon à la prochaine,ni à aucune autre rentrée pour beaucoup.

Vivants enfin dans ces regards tournés vers Athènes, Lisbonne ou Madrid, attendant l'étincelle qui allumera le soulèvement de tous les peuples d'Europe.

Certains hommes ont la prétention ou la vanité de croire qu'ils peuvent écrire l'Histoire :

'il considère la vie des peuples, leur activité et celles de l’État, comme une comédie au sens le plus vulgaire du mot, comme une mascarade, où les grands costumes, les grands mots et les grandes poses ne servent qu’à masquer les canailleries les plus mesquines.' ils ne sont rien d'autre que 'le grave polichinelle qui ne prend plus l’histoire pour une comédie, mais sa propre comédie pour l’histoire.'

L' Histoire, la vraie, n'est pas encore écrite et la messe n'est pas dite, ou plus précisément elle est en train de s'écrire dans cet isolement, ce rejet où sont exposés tous ceux qui portent à bout de bras et bien au delà de leurs forces, les plans destructeurs de l'Union si peu européenne .

L'impression profonde d'ennui qu'a suscité une intervention présidentielle n'est que le signe annonciateur d'une rupture dont chacun commence à mesurer, avec beaucoup d'effroi ou d’espérance, les conséquences à venir.



14 réactions


  • eric 30 mars 2013 08:56

    Vous êtes extrêmement injuste.

    Bon, admettons tous ce fatras de révisionnisme historique. Les départements sont un projet qui était dans les cartons de l’ancien régime, et la sec soc a été crée par De Gaulle.

    Il n’en reste pas moins que hollande est le président qui a été choisit par l’ensemble des gauches dans une rare unanimité pour représenter ses intérêts.

    La participation aux « primaires » socialistes, a largement dépassé le seul PS. Vous avez eu genre un an pour choisir ce que vous aviez de mieux a nous proposer.

    Vous avez tous voté sans exception au second tour en toute conscience et connaissance de cause.

    Sur tous les blogs, on voit toutes les gauches essayer de ce consoler en disant, au moins on a plus Sarkozy. Il faut vous en contenter si cela vous suffit et si vous parvenez a y croire.

    Ce type est le résultat de vos mode de fonctionnement, publics ou occultes, de vos marchandages internes plus ou moins transparents. De vos négociations, de vos compromis sur vos programmes et idées. ( genre une centrale en moins, un mariage pour tous en plus, une journée de carence en moins une exonération fiscale pour les journalistes en plus).

    Il est très injuste d’en faire un bouc émissaire parce qu’il est très exactement un président a votre image.

    Hollande est a l’image de ce qu’est la gauche aujourd’hui. Le sacrifier n’y changera rien. C’est bien cette éternelle reconstruction, refondation, toujours promise jamais tenue qui est en cause.

    C’est aussi pourquoi la prochaine alternance vous fera regretter la volonté Sarkozyste de tenter de reformer le pays dans un minimum de respect de l’opposition.


    • Ariane Walter Ariane Walter 30 mars 2013 10:05

      Êtes-vous stupide Éric ? Pardonnez-moi cette franchise mais comme le BA-BA semble vous échapper , qui est que l’Americanisation de notre société a Crée un bipartisme politique ds lequel nous sommes englués et Qu on nous donne à choisir entre les serviteurs de la finance et les serviteurs de la finance, ceux qui ont voté Hollande , sachant qui est ce parti qui s’était déshonore en laissant passer le MES, ne pouvaient attendre que deux choses ::

      -d’une part le mariage pour tous’ La droite ne l’aurait pas laissé passer’ et c’est un immense progrès societa. Ceux qui hurlent contre cette décision auraient été dans les rues contre l’abrogation de l’esclavagé ,le vote des femmeś ,l’avortement. C’est ainsi.
      -d’autre part , d’être obligé de tomber le masque. Impossible de cacher qui l’on est trop longtemps. Ainsi Hollande et le socialisme se déshonorent en tant que tels. Ils se tient politiquement jour après jour.

      Quant a votre désir de voir revenir Sarkozy !!!!! Mais vous êtes fou ! Ou alors vous êtes aux affaires et dépecer des peuples et des pays vous va !
      Comment peut-on vivre et ne rien voir de ce qui se passe ?

    • Ricquet Ricquet 30 mars 2013 23:27

      @Ariane Walter 

      Vous dites : « d’une part le mariage pour tous’ La droite ne l’aurait pas laissé passer’ et c’est un immense progrès societal. Ceux qui hurlent contre cette décision auraient été dans les rues contre l’abrogation de l’esclavagé ,le vote des femmes ,l’avortement. C’est ainsi. »

      Je lis vos posts avec attention, mais là, il me semble que vous faites fausse route. 
      Le mariage pour tous n’est pas une affaire droite / gauche. 
      Je dénonce cette dérive englobante donnée à cette institution qu’est le mariage, qui pour la proposer à tous au nom de l’égalité, perd de sa symbolique et se ternie.
      Du reste, cette loi de crétins, contre le peuple, générera par la suite bien des déconvenues qui ont été explicitées par les adversaires de cette tartuferie. (je n’y reviens donc pas et c’est HS / article)

  • Fergus Fergus 30 mars 2013 09:47

    Bonjour, Rakosky.

    Vous écrivez « il n’y eut jamais ou rarement une si totale et si peu banale indifférence à l’égard de quelqu’un appelé à une si haute fonction ». Ce n’est pas exact, et les plus de 8 millions de Français qui ont regardé sa prestation sur France 2 ont démontré le contraire, alors même que de nombreux médias avaient claironné qu’il n’y aurait rien à en attendre.

    Et de fait, il ne s’y est quasiment rien passé, si ce n’est que Hollande aura gagné dans cette interview le nouveau surnom de « Monsieur Bricolage ».

    L’évidence est qu’il ne fallait surtout pas faire une émission de ce type sans avoir prévu une annocne quelque peu spectaculaire. Ayant créé une attente, Hollande a déçu ses propres électeurs, au point que le 1er sondage publité a montré qu’il n’avait convaincu que 31 % des sondés contre 66 % de non-convaincus.

    Les politiques qui croient encore pouvoir enfumer la population par de la com’ savent désormais qu’ils sont à côté de la plaque : Sarkozy, puis Hollande, en s’affichant pour ne rien dire, ont tué ce type d’exercice.


    • Ariane Walter Ariane Walter 30 mars 2013 10:09

      Il y a quand même eu des annonces spectaculaires : il n’est pas socialiste et il a le sang froid. Qu’ elle annonce voulez vous qu’il fasse ? La seule serait : « je vous ai trompé et je continue. »


      Qu’est-ce qui est pire selon vous : que quelqu’un prononce le nom « salopard » ou que quelqu’un agisse comme tel ?

      Merci de veiller sur mes articles en modération. C’est tout a votre honneur, noble Fergus !

    • eric 30 mars 2013 10:11

      Fergus bonjour. Il me parait peu judicieux de comparer les performances de Sarko et de hollande.

      Le premier a maintenu le pouvoir d’achat des français tout en poursuivant une vraie politique de réduction des vraies dépenses de l’État ( nombre de fonctionnaires et pas baisse des transferts sociaux) en pleine crise économique généralisée (même les chinois) et dans un contexte financier genre bord du gouffre voir a diminuer le déficit public. Le second parvient a faire baisser le PA alors que l’essentiel du monde ( USA Chine va mieux) que les taux d’intérêts sont quasi négatifs et que la croissance mondiale est repartie a déficit croissant

      De la meme facon, et sur le plan purement com. il y a quand meme deux methodes tres differentes. Sarko a dit qu’il allait allonger les delais pour la retraite et augmenter la TVA et l’a fait, Hollande l’a defait avant de le refaire en ayant dit qu’il ne le ferait pas. Ce sont quand meme deux types de com assez différents.

      Enfin, referez vous a tous les discours de gauche : ils reprochaient a Sarko d’avoir une politique, mauvaise dans leur esprit, donc d’agir. Ils reprochaient surtout a hollande de ne rien faire.
      Il reprochaient a Sarko d’être président. Ils reprochaient a Hollande de ne l’être pas.

      Ils lui reprochent désormais de n’avoir toujours pas de politique si ce n’est de tenter de faire semblant de mettre en œuvre les solutions préconisées et actées par son prédécesseur.

      On parle quand même de deux « objets » politiques très différents....


    • Ariane Walter Ariane Walter 30 mars 2013 10:13

      Deux salopards mais Sarkozy , du moins, annonçait la couleur.


    • Fred Fred 30 mars 2013 10:31

      Bonjour Ariane,

      le pire, c’est le salopard qui a appelé à voter Hollande en toute connaissance de cause, sacrifiant ainsi ses troupes comme un seul homme, lesquelles se retrouvent aujourd’hui la bave aux lèvres à l’image du salopard en chef.


    • Fergus Fergus 30 mars 2013 11:05

      Bonjour, Ariane.

      Je continue de récuser le terme de « salopard » car il n’a pas sa place dans un discours politique, particulièrement dans la bouche d’un leader de gauche qui cherche a élargir sa base.

      Quelle annonce pouvait faire Hollande ? Certainement rien d’agréable à nos oreilles en matière de retraites ou de politique de l’emploi, tellement il est enfermé dans une logique libérale.

      Mais il pouvait en revanche prendre une initiative en matière de modernisation de la vie publique, en annonçant par exemple un référendum pour faire valider par le peuple le non,-cumul des mandats, la réforme du statut pénal du chef de l’Etat et l’introduction d’une dose de proportionnelle aux législatives, fut-elle insuffisante.

      Il pouvait également annoncer un remaniement du gouvernement visant à le débarrasser de des scories inutiles pour en faire une équipe de combat dans la lutte contre la crise économique.

      Il pouvait aussi annoncer la mise en oeuvre rapide de la réforme territoriale qui s’impose pour supprimer le millefeuille administratif.

      Bref, il aurait pu faire des annonces plus ou moins fortes au lieu des mesures cosmétiques dont il a parlé. Mais avant tout, ce qu’il aurait dû faire : parler vrai aux Français, leur dire réellement quelle est sa ligne politique, au lieu de continuer à les enfumer comme il n’a cessé de la faire depuis qu’il est arrivé au pouvoir.

       


    • Fergus Fergus 30 mars 2013 11:12

      @ Ariane.

      Non, Sarkozy n’annonçait pas la couleur. Pas plus que Hollande, sauf en début de quinquennat lorsqu’il a fait voter la désatreuse loi Tepa. Mais ensuite, il n’a cessé, lui aussi, de louvoyer et de donner des coups de barre dans un sens, puis dans l’autre, quand il ne prenait pas carrément des mesures contradictoires avec ses propres décisions antérieures.

      Mais Sarkozy a fait cela sur un ton de conviction, y compris lorsqu’il mentait effrontément aux Français ou se livrait à des envolées messianiques délirantes. Ce faisant, il réussissait mieux que Hollande à enfumer, et cela d’autant plus qu’il était entouré de communicants redoutables et de porte-flingues sans scrupules. 

      Bonne journée.


  • Ariane Walter Ariane Walter 30 mars 2013 10:12

    Rakosky, 


    Magnifique ton texte, puissant et vrai. Traduisant tellement cette colère, cette haine qui monte. Oui, de la haine pour ce parti qui tue la démocratie de notre pays. Merci ! Je le PTG sur fb

  • eric 30 mars 2013 13:32

    Je suis protestant et j’y tient. C’est un mien cousin Gatines, qui a fait l’essentiel du boulot sur les textes pour l’abolition de l’esclavage. Ce sont les conseiller protestants de Ferry qui ont préparé l’école pour tous, et le compromis de 1905 a été obtenu par les travaux de protestants.On a eu des femmes pasteurs a une époque ou les gauches préféraient donner des congés payes a la majorité masculine au travail que le droit de vote aux femmes, nous qui avons été le fer de lance du planning familial et la famille, au sens large, collectionnait les médailles des justes pendant que Thorez était a Moscou, mais ils furent également les premiers (cimade) a apporter une aide humanitaire aux collabos emprisonnes). Rien que ces quelques trucs entre autres devraient vous conduire a vous demander pourquoi nous somme hostiles dans une écrasante majorité a ce texte débile.
    Mais bon, avoir la mémoire courte est un droit de l’homme.... Voir des fascho partout aussi.


  • Dwaabala Dwaabala 30 mars 2013 16:50

    Une très belle et noble réflexion.


  • leypanou 30 mars 2013 19:45


    @auteur :

    "Il est le premier Président de la 5ème République à avoir été porté au pouvoir sans aucune espérance ni aucune illusion ou des illusions si faibles qu’elles se sont vite fracassées sur la réalité de sa politique«  : discutez avec un socialo et vous changerez d’avis. Ils y croient eux, et je peux vous garantir qu’ils ont des réponses à tout, que les régressions sociales et dans tous les domaines qui sont en train de se mettre en place n’en sont pas, qu’il ne peut pas tout faire en même temps, etc, etc.

    Un article d’aujourd’hui a même parlé de social-impérialisme, sous couvert de défense de la liberté, comme d’habitude.

    La France est mal partie, et il faut seulement espérer que les millions de retraités se rappelleront du dernier coup que ce gouvernement social-libéral leur a fait, même si la dernière élection législative partielle dans le Val d’Oise n’est pas de bonne augure.

    Je ne suis pas d’accord quand vous dites : » L’impression profonde d’ennui qu’a suscité une intervention présidentielle " ; pourquoi impression d’ennui ? Voilà quelqu’un qui avait dit au fameux discours du Bourget que son ennemi c’est la finance et qui, là, devant des millions de téléspectateurs ose faire une déclaration qui aurait pu être prononcée par L Parisot, future ex-patronne du Medef ? Le mot ennui n’est certainement pas le bon mot pour qualifier l’impression de cette prestation.


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