Grandeur et décadence du bon docteur
Le bon Dr K. avait à son actif un départ de carrière fulgurant. Il est devenu rapidement une figure de l’humanitaire puis un promoteur du devoir d’ingérence. Aujourd’hui, il siège dans un gouvernement de droite dure... pour les faibles. Confronté à un conflit d’intérêt avec la nomination de sa compagne à la direction de France-Monde, sera-t-il encore ministre après les municipales ?
En 1979, il quitte MSF pour fonder Médecins du monde.
Les missions se multiplient, en Ouganda, au Liban, au Tchad, en
Erythrée, au Soudan, en Afghanistan, au Salvador, au Bangladesh... Un
beau parcours.
Jean-François Revel, en 1979, invente la formule "le droit d’ingérence", qui sous la plume de Bernard Kouchner devient en 1987 "le devoir d’ingérence".
Tenté par la politique politicienne, il devient en 1988 secrétaire d’Etat chargé de l’Insertion sociale, puis secrétaire d’Etat à l’Action humanitaire, puis ministre de la Santé. Mari de Christine Ockrent, il commence à agacer sérieux. Fin 1992, il s’exhibe avec un sac de riz sur le dos, en Somalie. C’est pour la photo, que pour la photo. L’ego que l’on n’avait feint de ne pas trop remarquer se met à gonfler, gonfler...
Paraphrasant Boris Vian qui s’attaquait à un autre docteur humanitaire de l’époque, j’avais envie de gueuler de plus en plus fort :
Qu’il soit midi, qu’il soit minuit,
Vous me faites chier, Dr Kouchner
Si vous entrez dans la légende
Mettez des semelles de caoutchouc
Vos godasses de vieux trappeur
Ça fait du bruit sur les cailloux
Après l’effondrement électoral du PS en 1993, il devient député européen sur la liste PS de M. Michel Rocard puis adhère au Parti radical en 1996, dont il devient président délégué, mais échoue dès le premier tour à une élection législative partielle. Après la dissolution de 1997, il revient vers les socialistes, et c’est in extremis qu’il est nommé secrétaire d’Etat à la Santé dans le gouvernement Jospin, sous la férule de Martine Aubry... Il étouffe.
En
juillet 1999, il devient, à 60 ans, haut commissaire chargé de
l’Administration civile au Kosovo. La tâche sera rude. Il quitte le
Kosovo en janvier 2001, épuisé après avoir construit la Grande Albanie
et sans doute laissé quelques belles sources de conflits pour les années
à venir. En 2001, il est nommé ministre délégué de la Santé, sous
l’autorité d’Elizabeth Guigou. En 2003, il fait un rapport sur le
comportement de Total en Birmanie. Un rapport très discutable et
discuté.
Le déclin continue... BK soutient l’invasion de l’Irak par les Américains qui lui décernent le titre de héros. De plus en plus, l’homme qui s’était investi dans l’humanitaire devient une baudruche d’ego gonflée de vent. En 2007, il soutient la candidature de Ségolène Royal. Il voudrait une alliance avec François Bayrou. Il critique Nicolas Sarkozy, puis devient le ministre des Affaires étrangères de celui-ci. Il cautionne les expulsions d’étrangers manu militari de son proche collègue Brice Hortefeux. Il sert la soupe de la politique internationale pro-américaine et pro-sioniste de son président.
Sa compagne, Christine, la reine des ménages, est nommée à la direction de France-Monde. Bernard sera-t-il victime du petit remaniement post-municipal de son ami Nicolas ? Qu’importe, de toutes façons, c’est le déclin... Un déclin bien triste pour quelqu’un qui avait la chance d’avoir à 40 ans une si belle image.
A moins qu’il ne rebondisse, mais ce sera dur de se refaire après avoir montré une telle âpreté au gain (de popularité), une telle soif de notoriété et de pouvoir. Pour renouer avec l’humilité, peut-être faut-il inventer "le devoir de modestie"... je suggère l’ashram de Mathieu Ricard, le fils de Jean-François Revel. Avec des méthodes bouddhistes, inspirée du Dalaï-Lama, on y soigne à merveille, paraît-il, les ego surdimensionnés et proches de l’explosion.
Cerise sur le gâteau, cette vidéo du bon docteur au bal des menteurs.