samedi 22 août 2009 - par
Guerre Russie-Géorgie : un an après
Rappelez-vous, il y a un an, presque jour pour jour, j’avais écrit un papier sur la guerre Russie-Géorgie. Celui-ci s’intitulait « Guerre et vassalité » et, contre toute attente, a eu un large écho auprès des lecteurs d’Agoravox. En fait, pour être exact, c’était à une analyse géopolitique de ce conflit entre deux pays de l’ex URSS que je m’étais livré sans avoir néanmoins le moindre doute que mon article allait être repris sur « Yahoo actualités ».
J’avoue que, ce jour-là, de joie je jubilais ! Oui, de joie j’exultais. Non pas parce qu’il y a eu cette guerre. Non. La guerre ne me réjouit pas ; quel que soit l’endroit ou elle a lieu, quels que soient les belligérants qui y sont impliqués ou que l’on a délibérément monté les uns contre les autres, la guerre ne m’emballe pas. Pour dire vrai, la guerre, je la déteste et si ça ne tenait qu’à moi, il n’y aurait pas de guerre du tout. Le monde en serait débarrassé. Définitivement débarrassé.
Je disais donc que, ce jour-là, je jubilais. Je jubilais de cette joie certes difficile à décrire, difficile à définir, mais qui envahit certainement tout "agoravoxien" qui se respecte et qui se découvre subitement une âme d’analyste politique alors que sa formation de scientifique, par exemple, ne le prédestinait guère à cette vocation.
Cela dit, revenons maintenant à l’ordre du jour si je puis dire.
Il est utile de rappeler que c’est, en grande partie, grâce au tonitruant président français, Nicolas Sarkozy, qu’un cessez-le-feu a pu être signé entre les deux parties, et que les dommages, de part et d’autre, liés au conflit armé, ont pu être minimisés. La guerre n’a pas duré longtemps (cinq jours) car les forces en présences étaient largement disproportionnées. Le président de la Géorgie, en s’engageant dans ce conflit, comptait certainement sur l’aide des pays occidentaux notamment des américains dont des conseillers militaires étaient, depuis longtemps déjà, sur place ; mais ni l’Europe ni les Etats–Unis n’ont bougé le petit doigt car, en face, on avait affaire non pas à un pays du tiers monde mais à la Russie de Vladimir Poutine ... autrement dit à un ours blessé et qui vient tout juste de sortir d’une longue hibernation.
Ne serait-il pas intéressant, une année après, de revenir sur ce conflit et de voir ce qui a pu changer dans les relations de la Russie avec l’Europe et les Etats-Unis ?
Lors du cette guerre qui, faut-il le rappeler encore ( ?), n’a duré que quelques jours, l’on se rappelle qu’aux Etats-Unis on était en pleine campagne électorale. Il était alors difficile d’avancer un quelconque pronostic quant à l’issue de ces élections tellement la bataille entre les deux camps (Démocrates Républicains) était rude.
Pendant ces quelques jours de conflit, l’administration de Georges W Bush, qui était encore en place, avait d’ailleurs tenu un profil bas ; elle ne pouvait intervenir de manière directe dans ce conflit d’autant plus que, du côté de l’Irak et surtout de l’Afghanistan, l’armée américaine éprouvait des difficultés sérieuses liées principalement au manque de logistique. La guerre dans ces deux pays leur coûte cher et a contribué, indubitablement, à la crise économique et financière qui les a sérieusement secoués ces derniers temps.
En Afghanistan, les Talibans avaient repris du poil de la bête et dressaient de temps en temps des embuscades aux boys toutes aussi meurtrières les unes que les autres. Par ailleurs, l’Iran, qui tenait tant à son "nucléaire" posait un sérieux dilemme aux stratèges américains : les sanctions internationales n’ont pas eu d’effet escompté sur la politique de Téhéran, l’on commençait alors à sérieusement envisager le bombardement de l’Iran pour ne pas avoir à craindre la bombe iranienne. (1) Or, pour obliger l’Iran à renoncer à son programme nucléaire, les sanctions internationales d’ordre économique et commercial ne suffisent pas et les Etats-Unis ont besoin des Russes qui, malgré tout, entretiennent toujours des relations diplomatiques et autres avec ce pays. Ils ne pouvaient donc se permettre ne serait ce que de se fâcher avec les Russes en soutenant la Géorgie dans une entreprise vouée d’emblée à l’échec.
Est-il possible dans ces conditions, même à l’armée la plus puissante du monde, d’être sur plusieurs fronts en même temps ? Il est évident que la réponse est non. Les Russes ont donc profité de cette "fenêtre politique" pour s’engouffrer dans le Caucase et rétablir l’équilibre géostratégique en leur faveur. Qui peut leur reprocher le fait d’avoir agi ainsi ? En réalité, la Russie, même du temps de l’URSS, n’a jamais été un pays à vocation impérialiste comme il est sous entendu ça et là, particulièrement dans certains écrits de la presse française (2). Son intervention militaire contre les troupes de la Géorgie n’avait pour but que de venir en aide aux populations de l’Ossétie du Sud soumises à une répression de la part de Saakachvili pour leurs velléités séparatistes. Cette intervention leur a permis également de montrer au monde occidental que l’armée russe n’était pas du tout "obsolète" et qu’elle pouvait être mobilisée en moins de temps qu’il faut pour le dire.
Pierre Rousselin (du Figaro) résume bien, dans son blog, la situation actuelle de la Russie "Le Kremlin a étendu sa zone d’influence, infligé une sévère leçon à l’imprudent président Mikhaïl Saakachvili - dont le pays est amputé de 20 % de son territoire -, adressé une mise en garde aux autres États de son « étranger proche », dit-il .
A suivre
(1) En fait, il est fait, ici, allusion à la fameuse phrase de Nicolas Sarkozy : "la bombe iranienne ou le bombardement de l’Iran".
(2) J’ai encore en tête la fameuse phrase du rédacteur en chef de l’express, Christophe Barbier, pour qui tout pays qui se rapproche de la Russie est traité de vassal et tout pays qui se met sous la botte des Etats-Unis n’est qu’ami de l’oncle Sam.