lundi 6 avril 2009 - par
Haro sur l’Eglise catholique (1/2)
Incroyable déchaînement que celui subi par l’Eglise en Occident, et en particulier en France depuis le début de cette année 2009. De l’anticléricalisme traditionnel de notre pays, largement essoufflé par la déchristianisation rapide qui a caractérisé ces 50 dernières années, nous sommes passés à une haine aussi violente qu’elle est irrationnelle et ignorante.
Le paradoxe, par rapport à la naissance douloureuse de la laïcité il y a un peu plus d’un siècle, est que l’Eglise n’est aujourd’hui plus une référence majoritaire dans la société française, qui est probablement la plus sécularisée d’Europe. On pourrait imaginer que la majorité de non croyants ou de non pratiquants fasse usage de sa liberté et se contente, vis-à-vis du discours de l’Eglise, d’une indifférence polie ou d’une vague curiosité. Après tout, si la majorité des Français ne se reconnaît pas dans l’Eglise, que lui importent ses préceptes, ses dogmes, ses prises de position, son droit canon ? La laïcité n’est-elle pas présumée permettre la liberté religieuse et apaiser les rapports entre l’Etat, la nation et les religions, dans le respect de lois communes ? Je suis donc très étonné par la vindicte anti-catholique de mes frères agnostiques ou athées. Je respecte leur irreligion, qu’ils respectent ma religion ! Dans cette société qui prétend promouvoir la tolérance et défendre les particularismes, seul le catholicisme serait-il insupportable ?
Il y a, au départ de cette incompréhension croissante et violente vis-à-vis de l’Eglise, une erreur de jugement sur sa nature, dont les catholiques sont un peu responsables depuis cinquante ans. L’Eglise a en effet été largement perçue comme une espèce de grande ONG, dédiée principalement aux œuvres humanitaires sur fond d’un message dilué d’amour un peu benêt. Or, l’Eglise est avant tout une institution hiérarchique, fondée il y a un peu moins de 2000 ans par un personnage bien réel, Jésus, que les catholiques considèrent comme le fils incarné de Dieu. « Tu es Pierre et, sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise ». La mission de cette institution est de transmettre le message du Christ et d’expliquer la nouvelle alliance qu’il est venu offrir au monde. L’Eglise s’inscrit dans la continuité de l’Ancien Testament, l’histoire du peuple juif, mais repose sur la rupture fondamentale qui universalise l’alliance. C’est ce « changement de portage » qui lui vaut son nom de catholique (= universel). Voici quelle est la « raison sociale » de l’Eglise. Tout le reste, les milliers de dispensaires, les écoles répandues à travers le monde, les maisons de retraite, les distributions d’aide alimentaire, c’est un effet du message de Jésus Christ et un témoignage de son message au monde.
En France et dans le reste de l’Europe, l’Eglise a assumé la mission historique de transformer la fin de l’empire romain sous les assauts barbares en nouveau départ. L’Eglise a façonné l’Europe, ses moines développant l’agriculture et ouvrant les territoires au peuplement, ses prêtres et ses chanoines transmettant le savoir, ses fidèles finançant l’architecture et les arts. Elle a donc une légitimité particulière, malgré les quelques décennies de laïcité, pour rappeler les fondements de la civilisation.
C’est au regard de tout ce qui précède qu’il convient, me semble-t-il, d’apprécier les trois « Affaires » dont la presse s’est repue depuis janvier. Cela permet d’une part de replacer les choses dans leur contexte et, d’autre part, d’en relativiser la portée alors que quelques journalistes enflammés parlent de grand soir de l’Eglise.
A suivre.