jeudi 16 avril 2009 - par HugoV

Il y a bien un lien entre la surpopulation et la « sursuicidité »

La France est le mauvais élève de l’Europe pour le nombre de suicides dans ses prisons. Depuis le début de l’année, une quarantaine de suicides de détenus ont été recensés et neuf suicides de surveillants. Patrick Marest, président de l’Observatoire international des prisons, dénonce -sur Mediapart- des conditions de détention qui font fi de « la dignité humaine », et « l’allongement infinie des peines ».

La France est montrée du doigt, en Europe, pour le taux de suicide dans ses prisons. Les détenus s’y suicident deux fois plus qu’en Espagne, en Suède ou l’Italie.

" Le mouvement est reparti à la hausse, depuis trois ans, alors que l’on est rentré dans une phase de surpopulation endémique. Avec une augmentation de 20% des suicides en 2008 (115 cas recensés par l’administration). Pire, le premier trimestre de 2009 indique un doublement des morts suicidaires par rapport à la même période de l’année précédente. Ce qui semble indiquer que le taux de suicide s’affole quand la surpopulation est à son comble."


En même temps, certains pays européens ont des taux d’incarcération plus forts que la France mais recensent moins de suicides...

"Ce sont aussi des pays où l’on ne laisse pas l’administration pénitentiaire restreindre les droits des détenus à sa guise, selon ses critères et ses objectifs. Où ne règnent pas l’arbitraire ou le pouvoir discrétionnaire laissés à l’administration française. Où l’on a pris des mesures pour éviter que la prison ne fabrique des récidivistes et où l’on privilégie la réinsertion des détenus dans la société."

"Une bonne proportion des suicides interviennent dans les quelques jours qui suivent l’incarcération. Le premier contact avec le milieu carcéral, c’est : « Tu te déshabilles, tu écartes les jambes et les bras, tu te baisses, tu tousses. » C’est ce qu’on appelle la fouille intégrale. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on est déshabillé pas simplement de sa montre et de ses affaires mais aussi de sa dignité."

"Quand on songe que les effets psychologiques et physiques de l’emprisonnement sont irréversibles au bout de quatre ans – tous les sens s’atrophient alors, sauf l’ouïe –, vous imaginez l’état du psychisme. Or, on est entré dans une période d’allongement infini des peines et ce type de condamnés l’ont bien compris. Ils ont parfaitement saisi qu’ils sont les premiers visés par la récente loi de rétention de sûreté. Que la période ouverte en 1981 avec l’abolition de la peine de mort s’est refermée. Et que cette époque où on leur garantissait l’espoir de sortir, un jour ou l’autre, c’est terminé."

La France consacre 34 € par an et par habitant à son système pénitentiaire, l’Italie 47, l’Angleterre 54. Si l’on ne retient que la prise en charge quotidienne d’un détenu, cela coûte 112 € en Belgique, 124 € en Angleterre et seulement 77 € en France. Acceptons-nous de dépenser plus pour améliorer la prison réelle ?

" En France, la conception de l’enfermement reste de l’ordre de la poubelle sociale. D’autres pays investissent ce temps, financièrement en misant leur argent sur tous les aspects de réinsertion et de prévention de la récidive – pas sur la sécurisation à tous crins des établissements. D’autres encore privilégient le fait d’envoyer moins de gens en prison mais de les sanctionner autrement. Ce qui coûte d’ailleurs moins cher et qui est couronné par des taux de récidive moindres."

"En France, on dépense plutôt les budgets à construire de nouvelles prisons avec des grilles et des miradors de plus en plus hauts. La portion congrue est laissée à l’éducation, à la culture, aux activités ou à l’alimentation, des détenus. Tout cela révèle que notre système carcéral est totalement anachronique."



5 réactions


  • calach calach 16 avril 2009 12:02

    65000 détenus pour 52000 places ! Et plus d’amnistie pour le 14 juillet ! Un état catastrophique sur le plan hygiénique. Absence d’activité et de politique de réinsertion. Dans ces conditions, le suicide devient une porte de sortie pour des détenus de plus en plus atteints sur le plan psychologique.
    Il faut préciser également que parmi les 65000 détenus, 30 % (20 à 22000) le sont à titre provisoire donc en étant présumés innocents. Parmi eux, il y a de vrais innocents qui souffrent encore plus que les autres. Décidément, la tolérance zéro tolère beaucoup de bavures !


  • Internaute Internaute 16 avril 2009 13:50

    La solution est simple. Nous avons des territoires vierges immenses du côté des îles Tuamotu. Pourquoi ne pas y héberger nos populations à risque dans des centres de vacance avec matelas pneumatiques et télévisions ? On ferait d’une pierre deux coups. Tout d’abord on baisserait la densité dans nos prisons résolvant ainsi le problème des sucides et deuxièmement on assainirait nos banlieues permettant aux habitants d’y mener une vie normale.


    • paul muadhib 16 avril 2009 15:26

      vous mettez l umps-medef dans la population a risque ??, apres tout ce sont eux les createurs d une societe injuste, inhumaine et violente , donc responsable avant et devant les autres.
      c est de l humour...pas tant que ca en fait..


  • hans lefebvre hans lefebvre 16 avril 2009 20:23

    Pour en savoir plus sur un sujet complexe :
    http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/034000724/index.shtml
    En attendant que soit rendu public le travail récent du Dr Albrand.


  • appoline appoline 17 avril 2009 14:33

    Bah, il faut quand même se dire que personne ne vous force à aller en prison. Dans la vie, vous avez le choix de bien faire ou mal faire, c’est le libre arbitre alors quand ça tourne au vinaigre, il ne faut pas venir pleurer.


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