Il y a deux ans, éclatait l’affaire Amamra : récit d’une islamophobie ordinaire
Comme chaque 8 mars, nous venons de célébrer
J'ai été l'un des premiers, sur le web francophone, à dénoncer le martyr de l'actrice de charme August Ames, harcelée par les SJW et poussée au suicide suite à un simple tweet jugé homophobe, en décembre 2017. Un autre épisode de lynchage – qui n'eut pas de dénouement aussi tragique mais qui a durablement marqué la victime – s'est déroulé il y a exactement deux ans, visant la jeune actrice Oulaya Amamra.
Replongeons-nous dans le contexte : début mars 2017, la campagne présidentielle bat son plein entre une extrême-droite qui se sent pousser des ailes et une droite à la peine qui chasse sur les terres du FN. Deux semaines après l'affaire Meklat (un jeune écrivain talentueux poussé à l'exil suite à des tweets "controversés"), on cherche un nouveau punching-ball. C'est alors qu'une jeune femme de vingt ans, Oulaya Amamra, reçoit un César de jeune meilleure actrice. Tout de suite, les journalistes épluchent son compte twitter afin d'y dénicher quelque chose qui sente le soufre et dont ils puissent se repaître. Bingo ! La jeune Oulaya a bel et bien tenu des propos "controversés" entre 2011 et 2012, soit… à l'âge de quinze ans. Cela ne fait rien pour nos duègnes de la conscience qui vont s'empresser de descendre en flèche la jeune femme dont la carrière artistique commence tout juste à éclore.
Mais qu'a-t-elle bien pu dire de si horrible ? Dans un tweet posté en 2011 (soit à l'âge de quatorze ans), elle déplorait que certaines filles qu'elle connaissait s'embrassent mutuellement sur la bouche ; un an plus tard, elle exprime sa réprobation face aux couples qui se font des french-kiss de manière publique ou qui exécutent des danses trop suggestives en boîte de nuit ; puis, elle critique le rap, les vêtements trop légers, le racisme intrinsèque de
De Libé à Valeurs Actuelles, gauche et droite confondues allaient déverser un torrent de haine sur la jeune femme. La gauche voyant en elle une réactionnaire, tandis que la droite la figurait en islamiste. Phénomène intéressant : l'extrême-droite, à travers la fachosphère, était également montée au créneau pour réclamer que la jeune femme soit "déchue" de son César. Ainsi, par réflexe antimusulman primaire, les nationalistes français se faisaient les défenseurs des minorités sexuelles, de l'hédonisme et de la révolution des mœurs – dont ils sont, d'habitude, les premiers contempteurs, n'hésitant pas à se vautrer dans une homophobie et une pudibonderie abjectes qui n'ont d'égale que leur hypocrisie.
Cette affaire, en apparence anecdotique, jette un éclairage édifiant sur la société française et sur notre échiquier politique. On relève, en premier lieu, le "consensus islamophobe" entre la gauche et l'extrême-droite. N'oublions pas, en effet, que le rejet de l'islam n'est pas l'apanage des seuls nationalistes. De fait, il existe en France deux islamophobies : une islamophobie nationaliste (dans laquelle l'islam est rejeté à cause de son caractère "étranger" et où le Musulman est vu comme un ennemi héréditaire de
Pour en revenir à la collusion entre gauche et extrême-droite et à l'islamophobie qui leur sert de dénominateur commun, celle-ci s'est aussi manifestée dans d'autres affaires. Nous avons évoqué ci-dessus l'affaire Meklat, l'on pourrait également parler de l'affaire Mennel. Une jeune chanteuse de talent qui a vu sa carrière artistique étouffée dans l'œuf à cause de ses idées. Là encore, fachos et SJW se sont alliés contre la jeune femme : les premiers lui reprochant de porter le voile et les seconds ressortant de vieux tweets où elle avait mis en cause l'État français dans la montée du terrorisme. Une impudence qu'elle a payé de sa carrière.
Comme je le dis depuis quelques temps à mes camarades de banlieue, la gauche ne nous aime guère plus que l'extrême-droite. Cependant, là où les fachos disent franchement qu'ils nous rejettent, la gauche nous utilise comme faire-valoir. Oh, elle aime les étrangers, mais à condition qu'ils se contentent de jouer aux petits citoyens lisses et irréprochables qui dispensent des poncifs irénistes et font l'éloge de l'hédonisme occidental. Ainsi, la romancière Leila Slimani, partisane de la "libération sexuelle" et critique acerbe de l'islam qu'elle juge rétrograde, se voit primée d'un Goncourt et invitée sur les plateaux télévisés où l'on lui tend le micro pour y délivrer la bonne parole. Idem pour Jamel Debouzze, Omar Sy et d'autres personnes issues de la banlieue qui acceptent sagement de servir d'alibis à la gauche. Mais dès qu'un banlieusard ose sortir des sentiers battus, clamer son attachement à ses origines, critiquer les "valeurs" occidentales et avoir d'autres ambitions que d'être un native informant, il se verra immédiatement descendu en flèche et jeté en pâture, fût-ce à cause de tweets vieux de dix ans écrits durant l'adolescence. Mehdi Meklat, Oulaya Amamra, Médine, Houria Bouteldja, Majid Messaoudene, Marwan Muhammadi, Yassine Belattar et Mennel en ont fait les frais. D'ailleurs, vous ne risquez pas de voir ces personnes chez Anne-Sophie Lapix ou au festival de Cannes. Non, la gauche charlie aime les personnes d'origine étrangère mais uniquement s'ils sont des émules du servile Massinissa, malheur à eux s'ils s'avèrent être des héritiers d'Hannibal.
Cette affaire, parmi tant d'autres, prouve encore une fois que notre pays, dite "Patrie des Droits de l'Homme", est en fait malade de son racisme et de son islamophobie latents. L'extrême-droite putride n'est que la partie émergée de l'iceberg. Les idées d'extrême-droite sont, quant à elles, métastasées sur l'ensemble de l'échiquier politique, y compris au sein de la gauche qui est loin d'être exempte de la peste brune. Le salut de la banlieue ne viendra donc ni d'une extrême-droite qui rêve de "renvoyer au pays" tout ce qui n'est pas Gaulois, ni d'une gauche infantilisante qui prétend remodeler les banlieusards à l'aune de ses idées (et gare à eux s'ils ne s'y plient pas). Ce n'est que de lui-même, en prenant conscience de sa force et en se constituant en une grande mouvance socio-politique, que le peuple des banlieues pourra enfin peser sur la scène politique face aux deux écueils que sont le gauchisme et le nationalisme.