Il y a le feu dans l’Europe des traités
La mise en place de l’Euro, dont la propagande qui l’accompagnait souligne à quel point la masse des gens a été trompée et conditionnée à un niveau tel que la sortie de l’Euro leur apparait encore comme impossible, a, dans la réalité, engagé tous les pays qui l’avait adopté dans une phase de dégradation de leur économie, puis aujourd’hui dans la récession amenant à la déflation.
Dans les idées reçues, en fait imprimées dans les cerveaux par le canal médiatique, il y a celle d’une Allemagne florissante et surmontant tous les problèmes grâce à une austérité sans failles et à une grande capacité d’exportations. Dans ce qu’il faut bien qualifier de naufrage économique des pays de l’Eurozone, il était plus que nécessaire de mettre en avant un modèle qui marche, où une austérité rigide était couplée à une politique monétaire sans aucune souplesse, dédiée à l’unique objectif de combattre l’inflation [ce qui est une manière de garantir les profits financiers réalisés sur la base d’intérêts de prêts ou de mouvements spéculatifs].
Le commerce extérieur de l’Allemagne est certes excédentaire, mais ses échanges avec la Chine sont maintenant déficitaires et l’essentiel de son commerce, c’est à dire avec les pays européens, dans le cadre d’un système économique ultralibéral, l’a conduite à intégrer dans son système bancaire de la dette des pays avec qui elle commerce. Au niveau financier l’Allemagne est donc totalement liée aux pays de la zone Europe. L’Allemagne s’est aussi empêtrée elle-même dans une transition énergétique qui lui coûte très cher et n’aboutit pas [ni les émissions de CO2, ni la consommation électrique ne baissent et il y a toujours une bonne part de nucléaire dans son électricité].
Les conditions sont donc réunies pour qu’un problème survenant dans un pays de la zone se propage à l’ensemble. Cela dépend évidemment de la taille du problème. En 2012, où la Grèce a déjà été en défaut de paiement. Une partie de sa dette a été effacée [en fait plutôt déplacée des banques privées au secteur public] pour un montant total d’environ 100 milliards d’euros.
Un des thèmes majeurs de ce qui s’est révélé n’être que de la propagande pour la construction dite européenne, est celui de la paix. Ces traités de nature ultralibérale, mettant en place des institutions non démocratiques, en tous les cas très éloignées de l’expression de la volonté des peuples, - voir ce que l’on a fait du vote anti constitution en 2005-, devaient assurer la paix dans l’espace géographique des traités. Et cet esprit de paix devait se traduire dans une diplomatie de négociations politiques.
Nous avons déjà vu ce qu’il en était dans l’ex Yougoslavie, puis en Lybie en Syrie et maintenant en Ukraine. Il y a eu aussi l’épisode un peu comique de la Géorgie où les gouvernants ont cru pouvoir compter sur le soutien de l’Europe et des USA contre la Russie déjà. L’ouverture de ces fronts en Syrie et en Ukraine, avec l’activation et le soutien à des mouvements terroristes montre s’il en était besoin que l’Iran et la Russie sont les pays visés. Qu’il s’agit de mettre à genoux par l’action économique puis militaire.
Comme dans le cas de la Grèce, où visiblement l’Allemagne a choisi la manière forte du chantage brutal à l’exclusion de ce pays de la zone euro.
L’état de l’Europe des traités
La débâcle économique qui a suivi la mise en place de l’Euro dans le cadre d’un système ultralibéral, conditions, - monnaie surévaluée à la gestion rigide et ultralibéralisme-, qui, notons le, avait déjà précipité l’Argentine dans la faillite, a déjà conduit au non respect de beaucoup d’aspects des traités européens.
Le côté monétaire et financier est évidemment en première ligne dans ces manquements aux conditions imposées par les traités.
Pour beaucoup de pays de la zone euro, les règles sur les déficits, plafonds à 60% et 3%, sont intenables. Mais est ce que ces limites ont un vrai sens économique ? Évidemment non. Ce sont juste des limites définies pour justifier devant les peuples des politiques d’austérité.
Celles-ci ont soi-disant pour but de rembourser des dettes, mais sur le fond il s’agit plutôt de faire payer aux peuples la spéculation généralisée, les prêts privés, la privatisation des services publics essentiels... Dans les budgets des Etats, des collectivités locales, il y a ainsi un poste majeur consacré au paiement des intérêts des prêts privés. La récession oblige à emprunter encore plus, à vendre des actifs,… puis il y a un moment où le peuple ne peut être encore plus exploité. Ce constat vient d’être fait pour la Grèce par Obama lui-même.
Le second dogme financier est d’ordre monétaire et portait sur le rôle de la BCE. Les médias sont naturellement discrets sur l’objectif majeur de la BCE, aux termes des traités, qui est de contenir l’inflation. Et de laisser évoluer librement l’Euro sur les marchés. Il faut parler de cela au passé parce que dès 2012, il y a eu des rachats de dettes sur le second marché par la BCE et des prêts aux Banques (déjà de l’ordre de 1000 milliards d’euros). Aujourd’hui nous sommes dans une création de monnaie pour 1.100 milliards d’euros sur le mode Quantitative easing, c'est-à-dire sur une initiative clairement inflationniste.
A peine mis en place, le Mécanisme et le Fonds de stabilité au niveau européen sont déjà dépassés. Leur financement a été difficile et il est exclu pour un pays comme la France de sortir encore de l’ordre de 20 milliards d’euros et plus, pour des mesures de renflouement qui ne seront que provisoires. [Ce sont des prêts mais quand on voit la capacité de remboursement des pays auxquels on va les consentir !]
L’aspect démocratique n’a jamais été l’apanage de la construction européenne, mais devant les urgences qui se succèdent de plus en plus vite, le fonctionnement de la zone Euro est maintenant ouvertement assuré par l’Allemagne. La France ne jouant qu’un rôle subalterne de caution, dans le cadre de son allégeance à l’Allemagne et aux USA sur la base de son orientation atlantiste, qui va au-delà de l’engagement de l’Angleterre. Celle-ci fait actuellement le chemin inverse.
Mais la situation est telle que l’Allemagne a du mal à la contrôler. Elle a ainsi du se résoudre à laisser la BCE dévier de son objectif fondamental.
Sur la question grecque l’Allemagne vient de réagir avec brutalité en imposant à la BCE de couper les facilités monétaires consenties à la Grèce.
- Aristote
La Grèce
Alan Greenspan, l’ancien président de la Fed, Banque Fédérale américaine, en fonction lors des problèmes du sud-est asiatique à la fin des années 90 et l’auteur, à cette époque, d’une précision sur le FMI : « The IFM loans are not gifts », effectivement les prêts du FMI ne sont pas des cadeaux, ils sont accompagnés d’exigences sévères de réformes et d’une politique d’austérité imposée, vient de déclarer au sujet de la Grèce [propos diffusés par l’AFP] :
« Il s'agit d'une crise et je ne pense pas qu'elle puisse être résolue facilement, en fait je ne pense pas qu'elle puisse être résolue sans une sortie de la Grèce de la zone euro »
C’est l’avis de l’Allemagne puisque celle-ci a conduit la BCE à renvoyer le gouvernement grec vers sa propre Banque d’Etat pour créer les liquidités dont son économie a un besoin urgent.
Si la Banque de Grèce crée des euros, cela ne peut se faire que dans un cadre très limité et contrôlé par la BCE. Il n’y a donc pas d’invitation plus claire à sortir de l’Euro.
Il faut toujours se méfier, mais on ne voit pas le peuple grec, surtout dans une confrontation avec l’Allemagne, renoncer à la politique de relance, notamment du pouvoir d’achat, déjà engagée par le gouvernement Tsipras.
D’autant que dans les relations avec la Russie, on a déjà expliqué à la Grèce qu’elle ne pesait rien. Ce qui est également une remise en cause des institutions, au niveau de la politique extérieure de l’Europe des traités.
Dans cet enchainement logique d’un point de vue du système, on ne peut que constater le dépassement des responsables politiques. Syriza n’avait pas du tout la sortie de l’Euro à son programme. Jusqu’à présent les dirigeants européens voulaient aussi maintenir la Grèce à tout prix dans l’Europe.
Pour éviter l’exemple d’une sortie de l’Euro, mais également pour empêcher la Grèce de se tourner vers la Russie dont elle dépend pour le gaz notamment. Dans le cas d’une sortie de l’Europe ultralibérale, la Grèce n’a pas d’autre choix que de s’entendre avec la Russie aux niveaux commercial et financier. Ainsi qu’avec la Chine. Particulièrement pour le problème clé, concernant son commerce maritime, du port du Pirée.
On en vient ainsi naturellement à la question de l’Ukraine.
L’Ukraine
Hollande vient de déclarer qu’en cas d’échec de l’entremise diplomatique que l’Allemagne et la France mènent en ce moment, il y aurait la guerre en Ukraine.
Comme d’habitude il faut renverser la proposition de Hollande :
Il y a une véritable guerre en Ukraine qui fait rage depuis un certain temps déjà et comme le gouvernement de Kiev, intégrant une bonne part de fascistes authentiques, qui est l’agresseur, n’a pas le dessus, il faut un recours diplomatique pour rétablir une supériorité militaire des protégés de l’Union européenne et des USA.
Dans la même veine Genève II était une tentative diplomatique de chasser Assad du pouvoir alors que l’on n’y arrivait pas sur le terrain.
Dès le début, la construction européenne a été une entreprise de vassalisation de l’Europe de l’ouest par les Etats Unis, puisque l’adhésion à l’OTAN est partie intégrante des traités européens. Jusqu’à présent, en dehors du refus notable de la deuxième guerre en Irak de 2003 par la France et l’Allemagne qui, remarquons le, étaient appuyées par la Russie, il y a eu un suivisme complet de la part de l’Union européenne vis-à-vis des Etats Unis. Parfois contre des intérêts propres. Comme cela a été le cas pour les sanctions contre l’Iran qui ont lésé notre industrie. Il est aussi à noter qu’à cette époque la Russie a participé au boycott de l’Iran, notamment au niveau de l’armement, ainsi qu’aux pressions sur le nucléaire iranien, sans doute dans un esprit de maintien de bonnes relations avec Israël. Et avec une certaine dose de naïveté parce qu’à travers l’Iran c’était une mise au pas de la Russie qui était visée également.
Cette Europe de l’ouest participe aux sanctions contre la Russie, mais cette politique fait de moins en moins l’unanimité au sein de l’Europe des traités. Pas mal de pays ont besoin du gaz russe et les promesses américaines sur leur gaz de schistes perdent de la crédibilité au fur et à mesure de la fermeture des puits aux USA. Outre la Grèce, on peut citer l’Autriche et la Tchéquie.
L’initiative diplomatique de Merkel et Hollande, précédé d’une déclaration sur la non livraison d’armes à l’Ukraine, qui peut évidemment être un leurre, et même si elle a été soumise à un entretien Merkel/Obama, s’apparente tout de même à un recentrage sur des intérêts propres. Merkel est sous la pression politique et économique intérieures dans ses relations avec la Russie.
L’Europe ultralibérale va vers l’implosion
Michel Sapin, le médiocre incompétent en charge de notre économie, couvert par nos médias asservis, vient de déclarer que la question grecque n’aura aucun impact sur l’Eurozone. Cela a fait monter l’inquiétude d’un cran comme n’a pu s’empêcher de le noter le Figaro :
« Reste à convaincre le G20 et notamment les partenaires européens dont certains sont loin de partager l'optimisme de Michel Sapin. »
Michel sapin et la France par la même occasion, se sont récemment fait humilier par un commissaire européen par intérim, sur le problème soulevé par le déficit budgétaire de l’Etat.
A ce propos il n’est pas inutile de rappeler que si nous voulions le faire passer sous les 3% il nous faudrait, au choix : - faire défaut sur le remboursement des intérêts de la dette, remettre en cause notre système social dans son ensemble, faire pleuvoir sur les français taxes et impôts d’une manière inégalée, vendre des actifs de l’Etat : participation dans des sociétés, patrimoine…-.
Qu’est ce qui nous distingue de la situation grecque sur le fond ? Uniquement l’aspect politique.
Bien au contraire, si Syriza choisit de sortir de l’Euro plutôt que de s’en faire exclure, cela aurait l’effet d’un véritable séisme. Nul doute que la sortie de l’Euro, au moins, apparaitrait rapidement dans le programme de partis politiques dans les pays latins.
La survie de l’Eurozone est donc momentanément suspendue aux décisions politiques de ce pays où nos racines culturelles plongent, mais qui est aujourd’hui méprisé par la finance européenne.
Avec l’accroissement de la crise, particulièrement sur les aspects économiques et au niveau de l’emploi, La Grèce venant de faire la démonstration que l’austérité renforcée mène à la faillite et on sait par les exemples japonais et américains que les QE ont un impact très faible sur ces questions majeures, les divergences entre les pays de l’Eurozone vont s’accentuer.
Sans que bien naturellement nos médias l’aient relevé à sa juste valeur, l’Angleterre s’est progressivement dégagée des contraintes européennes. D’une manière étonnante en fonction du passé et des liens, l’Union britannique s’est même éloignée des Etats Unis. Dans sa nouvelle politique énergétique, basée sur l’indépendance, elle s’assoit même sur des règles européennes de concurrence non faussée. Ce qui lui vaut une plainte de la part de l’Autriche qui y voit une possibilité de peser sur le programme électronucléaire anglais.
L’Angleterre a renoué avec l’Iran, ce qui parait non moins impensable sur la base du passé.
Finalement l’initiative diplomatique Merkel/Hollande en direction de Poutine n’est qu’un volet d’une action plus vaste pour maintenir la cohésion de l’Eurozone. Parce que le soutien financier supplémentaire à une Ukraine divisée serait un fardeau de plus.
- Poutine
Tout cela fait que Poutine n’est pas en position d’infériorité sur le dossier ukrainien. Ce qu’il sait parfaitement, puisqu’il joue notamment avec le temps qui s’égrène pour lui.
La position de Syriza aura un impact sur ce problème également, bien que ce mouvement ait été écarté brutalement de la discussion sur la position de l’Union européenne.