samedi 19 novembre 2011 - par Taverne

L’Allemagne dit « nein ! » à l’Europe solidaire

L'aide européenne aux plus démunis, le PEAD - Programme européen d'aide aux plus démunis - sera finalement maintenu pendant deux ans. Mais l'Allemagne a été claire : « Ce qui est en jeu c'est le principe qu'à l'avenir l'Union européenne ne finance pas de politique sociale », a affirmé la ministre allemande de l'Agriculture, Ilse Aigner. Pas de politique sociale ! Et l'on retrouve bien là l'esprit allemand qui a dicté le TCE : surtout pas de solidarité.

Selon les états opposés à la reconduction de l'aide alimentaire - en tête l'Allemagne qui avait déposé plainte devant la Cour européenne - , le PEAD doit relever des politiques sociales nationales. Bref ! Chacun pour soi et dieu pour tous. Cinq autres Etats membres étaient opposés à la poursuite de ce programme que la Commission avait prévu de réduire comme peau de chagrin, amputant ses crédits de 400 millions d'euros (doté de 480 millions d'euros en 2011, le PEAD passerait à 112,5 millions d'euros en 2012). Le programme est pourtant vital pour bon nombre d'associations caritatives. Le ministre de l'Agriculture français Bruno Le Maire avait appellé « l'ensemble de ses homologues européens à tout mettre en œuvre pour défendre ce programme au niveau européen ».

Forcée par les opinions publiques révoltées, l'Allemagne a accepté un compromis, provisoire.... Rappelons que le PEAD a été créé en 1987. Il était à l'origine alimenté par des excédents agricoles. Ces derniers ayant été fortement réduits ces dernières années, ils ont progressivement été remplacés par des crédits de la PAC utilisés pour acheter directement des denrées sur les marchés. Ce que la Cour européenne de justice a jugé illégal dans un arrêt du 13 avril 2011. Pour se conformer à l'arrêt de la Cour de justice, la Commission européenne avait été contrainte de réduire fortement les crédits du PEAD en 2012. Mais le 3 octobre 2011, elle s'est ravisée en adoptant par procédure d'urgence une nouvelle solution de transition pour les deux ans à venir, avant de mettre en œuvre un nouveau mécanisme de financement après 2014.

Jean-Luc Bennahmias, député européen et vice-président du Mouvement Démocrate, s'est félicité que "l'essentiel du Programme européen d'aide aux plus démunis" soit sauvé, mais il a regretté qu'il ne s'agisse que d'un "sursis de deux ans". "La vigilance reste de mise car la question n'est en rien réglée sur le fond".

"L'Allemagne a annoncé la couleur : après 2014 elle ne veut plus entendre parler de ce programme ni d'ailleurs de politique sociale à l'échelle européenne (...). Dire cela dans la période actuelle, au moment où les politiques d'austérité frappent durement les peuples européens et où l'Union est en pleine crise existentielle, c'est nier le futur de l'Union Européenne : car il n'y aura pas d'Union Européenne à l'avenir sans Europe sociale, sans rééquilibrage de la dimension économique par une prise en compte du social".

L'Allemagne de plus en plus égoïste, imposant ses vues avec "la Boche" veut garder toute sa richesse, ne rien partager. Les forts écrasent les faibles, un programme qui rappelle aussi le sarkozisme mais aussi une certaine philosophie rappelant une page sombre de notre Histoire...En tous les cas, l'Europe a montré son vrai visage à travers cette décision brutale et les peuples se méfieront plus que jamais de cette Europe construite autour de l'Allemagne.



10 réactions


    • Taverne Taverne 19 novembre 2011 11:58

      La question que je soulève est celle de la domination de plus en plus forte de l’Allemagne au détriment de tous les autres pays d’Europe y compris de la France. Quant aux mécanismes de solidarité, ils ne sauraient venir encourager la fraude mais cela pose l’autre question : faut-il supprimer toute solidarité au sein de l’Union ?


    • BlackMatter 19 novembre 2011 15:07

      Pour ce qui est de l’Allemagne, elle a tout à fait raison de ne pas vouloir payer pour tous les pays-boulets-mafieux qu’elle traîne à ses chevilles. Rien de plus à ajouter.



      Dans un premier temps, je rappelle que le traité de Lisbonne prévoit des clauses sociales dans son article III alinéa 3 :


      « 3. L’Union établit un marché intérieur. Elle œuvre pour le développement durable de l’Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement. Elle promeut le progrès scientifique et technique.
      Elle combat l’exclusion sociale et les discriminations, et promeut la justice et la protection sociales, l’égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l’enfant.
      Elle promeut la cohésion économique, sociale et territoriale, et la solidarité entre les États membres. Elle respecte la richesse de sa diversité culturelle et linguistique, et veille à la sauvegarde et au développement du patrimoine culturel européen. »


      Croyez vous que le comportement de l’Allemagne est conforme au traité ?
      Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la grande partie des excédents de l’Allemagne se fait au détriment des autres pays européens. L’Allemagne aurait beaucoup moins d’excédents si nous avions la même politique qu’eux... Je rappelle pour ceux qui prennent le modèle allemand en exemple que le smic n’y existe pas et que beaucoup de gens sont obligés de travailler pour un euro de l’heure. Ces travailleurs très précaires ne sont pas compter comme chômeur d’où l’illusion que le chômage y est moins fort alors qu’il concernerait en réalité près de 20% de la population. A cela s’ajoute les 20% de travailleurs A TEMPS COMPLET qui gagne moins de 720 euros par mois.
      En fait, il faut le dire, l’Allemagne s’est aligné sur le modèle chinois.
      Malgré tout cela, la dette publique allemande atteint 85% du PIB soit le même (et même un peu plus) que celui de la France.
      D’ailleurs tout va si bien en Allemagne que les femmes n’y font plus d’enfant et qu’on assiste à une diminution de la population depuis une dizaine d’années. On prévoit même un effondrement d’ici 2050, la population passant de 82 millions aujourd’hui à moins de 70 millions. 40% des allemands auront plus de 60 ans. A ce moment là, la France redeviendra le pays le plus peuplé d’Europe.
      Pendant ce temps,


  • Jean-paul 19 novembre 2011 10:26

    Les Francais 2sur 3 ne veulent pas payer pour les Grecs .


    • Taverne Taverne 19 novembre 2011 11:56

      Vous n’en savez rien. Il n’y a eu aucun référendum sur cette question.


    • BlackMatter 19 novembre 2011 15:30

      Cela dit, en dehors de la responsabilité grecque, une bonne part de la situation est aussi lié aux tergiversations de l’Allemagne.

      Certes la Grèce s’est lourdement endettée, à hauteur de 120% de son PIB. Mais ça ne représentait que 400 milliards d’euros ce qui pouvait être gérable au niveau de l’Union avec un plan sur 10 ans (aide financière, rigueur acceptable, effacement de certaines créances).
      Sauf que l’Allemagne a traîné des pieds et que l’on a imposé au grecque un plan de rigueur tel que le pays est passé en récession. En conséquence de quoi, les taux d’intérêt de la dette sur 10 ans sont passé de 4 à 40% ce qui n’est plus gérable. Elle s’est retrouvé en situation ou plus elle remboursait plus elle devait. Si la BCE avait été autorisé à refinancer la dette grecque, ce pays n’en serait pas là.

      Cela n’excuse en rien bien sur le comportement léger des gouvernements successifs grecs qui ont menti et qui ont aussi été incapable de prélever l’impôt et de mettre fin à des privilèges innaceptables.


  • Mor Aucon Mor Aucon 19 novembre 2011 12:22

    Attention à l’amalgame. Le gouvernement allemand n’est pas toute l’Allemagne. Celle-ci a une politique intérieure qui compte. L’union CDU/CSU n’est pas au beau fixe et le SPD exprime beaucoup de doutes au sujet de l’intransigeance dont fait preuve Merkel.

    Curieusement, au Royaume Uni, le débat sur l’intégration à la zone euro semble repartir. Serait-ce un indice de la faille où enfoncer le coin qui éclaterait l’emprise des marchés financiers sur la zone ?


  • François51 François51 19 novembre 2011 13:56

    avec l’Allemagne, c’est un éternel recommencement en fait. ils n’ont pas réussi a conquérir l’Europe militairement au XXème siècle. il vont donc remettre ça au XXIème. mais cette fois çi, c’est économiquement qu’ils vont faire la pige au vieux continent.. sacré teutons. !

    bon.. c’est du second degré. quoique. ....


  • foufouille foufouille 19 novembre 2011 15:27


    obliger les gens a mendier est pas genial
    voire a payer en plus comme une epicerie sociale
    ou payer le 4* des exiles fiscaux


  • Taverne Taverne 19 novembre 2011 16:36

    « Maintenant l’Europe parle allemand  ! » (Volker Kauder, président du groupe parlementaire CDU-CSU, au Bundestag, le mardi 15 novembre).

    Ach, nostalchique ?


  • Loatse Loatse 19 novembre 2011 16:46

    Le financement des retraites, le coût de la dette, les difficultés d’équilibrer les budgets, le faible taux de croissance prévu ne peuvent qu’à moyen ou court terme laisser prévoir que le financement de l’aide alimentaire ne sera plus à charge des états mais bien laissée aux associations caricatives...

    Drôle d’Europe que nous construisons là.... :(




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