samedi 3 octobre 2015 - par Ramy

L’égalité des chances en Afrique : mythe ou réalité ?

Le lancement de la « Fondation pour l'égalité des chances en Afrique » par le milliardaire mauritanien Mohamed Ould Bouamatou au début du mois d'août est l'occasion de s'interroger sur un problème de fond dans notre rapport à ce continent. Au-delà des discours bien pensants qui n'ont aucune prise ni sur le terrain ni avec la réalité, la vision qu'ont les Occidentaux de l'Afrique est biaisée. Là où l'on devrait s'activer pour assurer une égalité des chances, on se borne à donner de l'argent qui disparaît bien souvent dans les poches de certains.

L'éducation est la clé de tout. Certains ne l'ont pas encore compris malgré les discours de circonstance et d'autres l'ont tout simplement oublié. Il avait été promis un avenir radieux au continent africain grâce à des ressources naturelles abondantes et une population en mouvement. Malheureusement, des années plus tard, les seules populations qui sont en mouvement sont celles qui fuient les atrocités ou la misère. Le bon compte n'y est pas, et les recettes pour enfin parvenir à des avancées profondes et pérennes ne sont appliquées qu'avec parcimonie.

Un juste milieu entre éducation et économie

Le succès réside dans l'éducation. Les jeunes générations doivent aller à l'école et penser par elles-mêmes afin de développer les idées qui transformeront un continent trop souvent considéré comme un grand terrain d'expérimentations où les anciens colons viennent soulager leur conscience de voir des Africains souffrir avec dans un coin de leur tête l'idée que si la situation est si mauvaise parfois, c'est que les choses clochent depuis plus d'un siècle. Des milliards d'aides sont déversés chaque année sans que les racines du problème ne soient traitées avec assez de sérieux et de rigueur. Il ne s'agit en rien de dire que l'Afrique doit être « sauvée » par les pays du Nord. La véritable solution viendra des Africains eux-mêmes si les grandes puissances arrêtent un temps soit peu de prendre ce continent pour un sympathique hochet.

La Chine est devenue en quelques années un acteur incontournable dans l'économie de nombreux Etats africains. La relation Chine-Afrique est bien différente de la relation qu'entretient le continent avec les autres grandes puissances actuelles ou passées. Tout n'est que « business » et si beaucoup de choses sont à redire sur le comportement de certaines firmes chinoises (embauche quasi-exclusive de travailleurs chinois, non respect de certaines législations, etc.) la priorité donnée à l'aspect économique aide plus au développement que les discours de moral et le saupoudrage économique qui sont devenus l'alpha et l'omega de nombreuses chancelleries. Seul le développement économique et humain peut permettre à l'Afrique de dépasser l'horizon qui lui a trop longtemps été assigné. Donner de l'argent est utile, mais donner les conditions qui permettront le développement de tous est bien plus efficace. En d'autres termes, il faut montrer comment jardiner au lieu de donner un fruit de temps en temps.

Cela passe par le développement de l'égalité des chances (et non l'égalité des revenus, vieille utopie marxiste dont une partie encore importante de la gauche n'a pas réussi à se détacher). Dans un continent où les ressources sont trop souvent captées par une petite élite qui voit dans le faible développement de leur pays un moyen d'asseoir leur autorité, la possibilité pour le plus grand nombre à accéder à des fonctions plus prometteuses est un gage de stimulation économique et sociale.

La Fondation pour l’égalité des chances en Afrique : le miroir aux alouettes de Bouamatou

Dans ce cadre, le lancement de la « Fondation pour l'égalité des chances en Afrique » par le milliardaire mauritanien Mohamed Ould Bouamatou paraît répondre aux attentes les plus légitimes. Le triptyque promotion de la démocratie, lutte contre la pauvreté et la male gouvernance est le bon car il libère les énergies et met tout le monde sur un pied d'égalité. Mais si l'idée apparaît à première vue comme appropriée, beaucoup chuchotent que derrière cette idée humaniste se cache un agenda politique bien moins défendable ou en tout cas universel.

Et pour cause, à la tête de la Fondation, Mohamed Ould Bouamatou, est un homme d'affaires, accessoirement milliardaire, bien connu en Mauritanie. En exil volontaire depuis quatre ans, Bouamatou se dit « citoyen du monde » et bien loin des affres de la politique. L'homme n'est plus en odeur de sainteté auprès du pouvoir mauritanien. La Fondation est perçue par le parti majoritaire, mais aussi par une partie de l'opposition comme une coquille pour préparer la prochaine grande messe électorale de 2019.

Se donner une image d'homme qui œuvre pour le bien commun plutôt que d'œuvrer réellement dans cette voie. La démarche devient dès lors beaucoup moins sympathique et vient souligner un autre problème auquel aucun pays (africain) n'échappe : la tentative d'influence auprès d'un public non averti. Les pays africains ont besoin de personnes désintéressées et la course constante au pouvoir et à la reconnaissance sont des fléaux qui alimentent des maux terribles comme la misère et les conflits. Le chemin est encore long, mais au moins la voie à suivre est balisée. Reste à l'emprunter sans dévier de la trajectoire. 



2 réactions


  • leypanou 3 octobre 2015 15:12

    Comment est-il devenu milliardaire ce Mohamed Ould Bouamatou ?


  • Le p’tit Charles 4 octobre 2015 09:30
    L’égalité des chances en Afrique.. ?..Question de point de vue..Ce continent à la « chance » d’être pillé par les belles démocrachies, quand aux habitants de l’Afrique une paire de basket ne fait pas hélas entrer dans l’histoire... !

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